Réunis ce lundi 6 octobre lors d’un déjeuner dans la célèbre brasserie de Saint-Germain-des-Prés, les jurés du prix des Deux Magots ont dévoilé leur 92e lauréat : c’est Joseph Incardona, avec Le Monde est fatigué (Finitude) qui l’a emporté, au troisième tour, après des délibérations très serrées, à tel point que le président du jury a dû utiliser sa voix double au troisième tour. Incardona était en lutte avec Victor Pouchet, chacun ayant obtenu quatre voix au deuxième tour. Les autres prétendants (Lucie-Anne Belgy, Il pleut sur la parade, chez Gallimard, et Feurat Alani, Le ciel est immense, chez JC Lattès) avaient également des voix au premier tour.
Joseph Incardona succède à Jean-Pierre Montal, couronné en 2024 pour son roman La Face nord (éditions Séguier).
Passer la publicitéLe prix des Deux Magots récompense un livre en langue française paru dans l’année et s’attache à révéler un talent littéraire, romancier ou essayiste, qui vient d’éclore ou qui, aux yeux du jury, ne bénéficie pas encore de la reconnaissance qu’il mérite. Guidés par leur enthousiasme et leurs coups de cœur, les jurés s’autorisent néanmoins à accorder leurs suffrages à un ouvrage répondant à d’autres critères.
Style efficace, images fortes
Étienne de Montety, président du jury, et directeur du Figaro littéraire, a expliqué que ce prix venait consacrer un écrivain qui était suivi depuis quelques années. Son originalité, le thème qu’il abordait ont probablement fait la différence. Le Monde est fatigué met en scène Eve, une sirène professionnelle qui nage dans les plus grands aquariums du monde. Sous sa queue en silicone, elle cache un corps mutilé. La jeune femme a survécu à un accident de la route et a juré de se venger. En attendant de trouver le coupable, elle sillonne la planète pour se faire justice.
Dans sa chronique du 4 septembre, Étienne de Montety affirmait qu’il y a la manière Incardona : «Style efficace, images fortes ; il passe d’un style à un autre, manie l’art des dialogues affûtés, sait alterner des descriptions longues et soignées et d’autres crachées comme un jet d’encre sous la forme d’une rafale de chiffres résumant un lieu. Et de ces fulgurances ; pour décrire l’acolyte d’Ève, un volumineux sybarite nommé Matt Mauser, il écrit : « II est une apologie du libéralisme, à lui tout seul, Mauser, alors qu’il n’y a pas plus décroissant que lui dans ses convictions ; c’est dur quand votre apparence dit le contraire de ce que vous êtes. »
Le président est entouré de Laurence Caracalla, journaliste, Nicolas Carreau, journaliste, chroniqueur et auteur, Jean-Luc Coatalem, journaliste et écrivain, Pauline Dreyfus, écrivain, Clara Dupont-Monod, éditrice et écrivain, Jessica Nelson, écrivain et cofondatrice des Éditions des Saints Pères, Marianne Payot, journaliste, et Abel Quentin, écrivain.
Le Prix des Deux Magots a été créé en 1933, en réaction au Goncourt, jugé trop académique. Le premier lauréat n’était autre que Raymond Queneau pour son premier roman Le Chiendent. Le lauréat 2025 rejoint un palmarès prestigieux, avec des auteurs aussi célèbres qu’Antoine Blondin, Albert Simonin, Pauline Réage, Elvire de Brissac, Roland Topor, Michel Del Castillo, Geneviève Dormann, Sébastien Japrisot, Bernard Frank, Christian Bobin, Marc Lambron, Eric Neuhoff, Jérôme Garcin… Fidèle à sa vocation de découvreur, il a distingué et révélé de nombreux auteurs parmi lesquels Marc Dugain, Serge Joncour, et plus récemment Pierre Adrian.
Passer la publicitéL’heureux lauréat se verra remettre un chèque de 7 700€.