Deux femmes enceintes buvant un verre de vin : le cliché de trop d’«Emily in Paris» ?
Emily in Paris , le programme signé Darren Star et diffusé sur Netflix depuis 2020, est la série qu'on adore détester. Pour rappel, on y suit les tribulations d’une Américaine à Paris ; un genre de Sex and the City, très édulcoré et surtout rempli de clichés. D’épisodes en épisodes, les Français y sont décrits comme râleurs, fumeurs, dragueurs, mangeurs et plus particulièrement buveurs dans la première partie de la quatrième saison dévoilée mi-août. Si cette dernière image est loin d’être mensongère dans un pays réputé mondialement pour ses vignes, les autorités sanitaires alertent depuis plusieurs années déjà sur les dangers de l'alcool sur la santé, et notamment son facteur cancérigène. Un message qui ne semble pas être arrivé aux oreilles des scénaristes d’Emily in Paris puisque dans le troisième épisode de ce nouveau chapitre, dont la deuxième partie devrait sortir le 12 septembre, deux femmes enceintes y sont présentées en train de siroter un verre de vin rouge.
Une banalisation dangereuse
La scène se déroule dans un restaurant chic de la capitale. Emily y dîne avec son amie Mindy. Pour l’apéritif, l’héroïne questionne un serveur désabusé à propos des options sans alcool que propose l’établissement. Celle qui travaille dans une agence marketing se dit très intéressée par le potentiel du marché du sans alcool. Le serveur lui affirme le contraire. Emily persiste dans sa réflexion, en lui apportant une preuve : «Les femmes enceintes en boivent», observe-t-elle en désignant la table d’à côté. «Non, c’est du vin normal», lui répond-on, sans plus d’élaboration.
Si dans les années 1960 en France, les règles en matière de consommation d’alcool durant la grossesse étaient plus souples (on tolérait deux verres par jour), en 2024 la tolérance zéro est préconisée par les autorités sanitaires et ce durant l’allaitement également. Et pour cause, les effets irréversibles de l’alcool sur l’enfant à naître sont majeurs. Le placenta ne faisant pas barrage à l'alcool, sa consommation est susceptible d’entraîner chez le fœtus des malformations et/ou des troubles du neurodéveloppement, rappelle le Centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT) de l’hôpital Armand Trousseau sur son site, données à l’appui. Et ce, peu importe la quantité absorbée et le type de boisson.
De plus, en cas d’alcoolisation importante de la femme enceinte, un syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF) peut survenir chez l’enfant, entraînant des anomalies de visage, un retard de croissance, des handicaps comportementaux et/ou cognitifs, ainsi que des malformations d’organes plus fréquentes (système nerveux, cœur, os, etc.), détaille le site de l’Assurance maladie.
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Une consommation en baisse
Ainsi, cette scène d’Emily in Paris sans aucun message de prévention l’accompagnant, a de quoi hérisser le poil des professionnels de santé. Et encore davantage à la lumière des derniers chiffres publiés par les autorités sanitaires. Dévoilé ce lundi 9 septembre à l’occasion de la Journée mondiale de sensibilisation au syndrome d’alcoolisation fœtale, le dernier baromètre de Santé Publique France révèle que malgré la préconisation d’abstinence totale, environ 7% des femmes enceintes déclarent avoir consommé de l’alcool en 2021, ne serait-ce que quelques gorgées. Si cette tendance reste toutefois à la baisse par rapport aux données précédentes (12% en 2017), l'Agence nationale de santé publique juge dans son rapport «important de poursuivre les efforts de prévention et d’accompagner les femmes qui pourraient être en difficulté avec la consommation de substances pendant leur grossesse, car le nombre de femmes et d’enfants concernés est loin d’être anecdotique», rapporte l’AFP.