La vie est faite de symbole, en politique plus qu’ailleurs. Et bien s’il en est un révélateur, c’est bien que la salle du Conseil de Paris, là où se décide l’avenir de la capitale, ne soit pas accessible aux personnes en fauteuil roulant. Alors que nous fêtons les vingt ans de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap – cette participation reste entravée par une logique qui favorise encore les personnes non handicapées, et les excluent, de facto, de décisions qui, pourtant, les concernent aussi.
Dans la loi de 2005, il est pourtant reconnu à toute personne en situation de handicap « l’accès aux droits fondamentaux reconnus de tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa citoyenneté ». Malgré les efforts que nous avons portés, ces dernières années, pour améliorer la mise en accessibilité des rues ou des services municipaux, nous avons encore tellement de retard. Paris n’est toujours pas accessible. Tous les jours, c’est 7 % de la population parisienne, soit au minimum 140 000 personnes, en situation de handicap, qui sont entravées dans leurs déplacements, dans leurs accès à un emploi ou un logement, dans leurs démarches administratives, dans leurs vies amicales et affectives, leurs accès à des lieux sportifs et de loisirs.
L’une des raisons de cet état de fait est l’absence de personnes en situation de handicap présentes dans les cénacles de prises de décision. Le pouvoir reste l’apanage des personnes dites valides. Comment, dans ce cas, faire une ville réellement inclusive quand les personnes qui la gouvernent ne connaissent pas intimement les difficultés des personnes concernées par la question de l’accessibilité (ou, plutôt, de l’inaccessibilité) et les discriminations validistes.
Si nous voulons refaire lien, si nous voulons mieux partager nos rues, notre ville, si nous voulons aussi réussir l’adaptation de la capitale à la situation climatique qui ne cesse de se dégrader, qui exige que nous avancions collectivement, nous avons un besoin intime, vital même, de trouver le chemin d’une ville accessible. Et comment faire sinon commencer par permettre aux personnes concernées de s’exprimer et, surtout, de décider ? Alors que nous célébrons la loi sur l’accessibilité universelle, nous sommes convaincus qu’il nous faut assurer à chaque Parisienne et Parisien un réel accès à la démocratie et à la fabrique de la décision publique. En adaptant nos lieux de pouvoir pour permettre l’accès aux personnes en situation de handicap. En permettant aux personnes concernées engagées dans ces combats de devenir candidates et candidats, puis élues. En renforçant la délégation en charge de l’accessibilité pour en faire une vraie politique transversale, irriguant toutes les décisions. C’est la condition sine qua non pour remettre à plat toutes les actions de la ville, pour les faire évaluer à l’aune de l’accessibilité par et pour les personnes concernées.
Pour mener, enfin, un véritable big-bang de l’accessibilité, oui, nous avons besoin de permettre de construire ensemble, personnes en situation de handicap ou pas, notre avenir
commun. Sortir d’une approche purement validiste est un changement de braquet, et en premier lieu démocratique. Elle appelle beaucoup de travail et d’humilité. Mais face aux enjeux et aux défis qui sont devant nous, c’est vital.
Signataires :
Lydie RAER, militante handiféministe
David BELLIARD, maire-adjoint, candidat les Ecologistes à la mairie de Paris
Paulin ROY, militant associatif concerné par une maladie rare
Annah BIKOULOULOU, militante écologiste
Tom TALLIEU, militant anti-validiste
Emmanuelle PIERRE-MARIE, maire les Écologistes du 12e arrondissement
Pierre Emmanuel ROBERT, militant associatif pour l’accessibilité
Anne SOUYRIS, sénatrice les Écologistes de Paris
Le journal des intelligences libres
« C’est par des informations étendues et exactes que nous voudrions donner à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde. »
Tel était « Notre but », comme l’écrivait Jean Jaurès dans le premier éditorial de l’Humanité.
120 ans plus tard, il n’a pas changé.
Grâce à vous.
Soutenez-nous ! Votre don sera défiscalisé : donner 5€ vous reviendra à 1.65€. Le prix d’un café.
Je veux en savoir plus !