Qu’est-ce que le Fattah, le missile balistique hypersonique utilisé par l’Iran contre Israël ?
Les Gardiens de la Révolution iraniens ont affirmé mercredi avoir tiré des missiles hypersoniques vers Israël, au cinquième jour de la guerre qui oppose les deux pays. L’armée iranienne a mené «la onzième vague de la fière opération Promesse Honnête 3 en utilisant des missiles Fattah-1», ont déclaré les Gardiens, armée idéologique de la République islamique, dans un communiqué diffusé par la télévision d’État, affirmant que Téhéran avait acquis «un contrôle total du ciel des territoires occupés». Ces projectiles avaient été utilisés pour la première fois en octobre 2024, parmi une salve de 180 missiles tirés contre l’État hébreu.
Présenté officiellement en 2023, le Fattah-1 («vainqueur» en persan), est l’arme la plus récente dans l’arsenal balistique iranien. Elle peut parcourir plus de 1400 kilomètres, atteindre une vitesse située entre Mach 13 et Mach 15 (entre 16.000 et 18.500 kilomètres par heure) et pourrait contourner «tous les systèmes anti-missiles», selon des déclarations iraniennes.
Qu’est-ce qu’un missile balistique ?
Un missile balistique est l’une des deux grandes familles de missiles, avec le missile de croisière, qui est propulsé tout au long de son vol effectué à basse altitude. À l’inverse, le nom du premier renvoie à la notion de trajectoire balistique, celle décrite par un corps soumis à la seule gravité. Lors de sa phase ascendante, il est propulsé à haute altitude, dépassant la limite de l’atmosphère pour rejoindre l’espace, où il n’est soumis à aucun frottement de l’air, mais seulement à la gravité. C’est à partir de ce moment-là que sa trajectoire - une ellipse - devient réellement balistique. Une fois atteint son apogée, il redescend sur terre et la force de gravitation lui confère une vitesse considérable. Lors de sa phase de rentrée dans l’atmosphère, il est de nouveau soumis aux frottements de l’air, jusqu’à l’impact.
C'est ainsi que les missiles balistiques, notamment intercontinentaux, peuvent dépasser les Mach 20. Nombre d’entre eux sont ainsi hypersoniques (convention fixée à Mach 5 soit cinq fois la vitesse du son) : la chose, en soi, est loin d’être nouvelle. Mais la vulnérabilité des missiles balistiques traditionnels vient de leur trajectoire, qui est facilement prévisible. Les armées cherchent donc depuis des années à développer des trajectoires complexes et rendre ces missiles «manœuvrants» (notamment lors de la phase de rentrée dans l’atmosphère) afin d’échapper aux défenses anti-missiles adverses. Technologiquement, la difficulté est d’obtenir en même temps une vitesse élevée et une capacité manoeuvrante. C’est en la matière que l’Iran se targue d’exceller avec son nouveau «Fattah». Il pourrait non seulement manœuvrer lorsqu’il est dans l’atmosphère, mais également lors de sa phase dans l’espace, selon les déclarations de responsables iraniens cités par Reuters en 2023.
De conception potentiellement simple, les missiles balistiques ont été privilégiés depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale par des puissances comme l’Iran qui ne disposent pas d’une aviation suffisante pour frapper des cibles à longue distance - à l’image du succès planétaire du «Scud» soviétique. Mais ils sont aussi intimement liés à l’arme nucléaire, puisqu’ils en sont l’un des principaux vecteurs. Si l’Iran reste à ce jour sous le seuil nucléaire, son programme balistique très avancéa toujours été une préoccupation majeure pour Israël.
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En plus de son «dôme de fer» capable d’intercepter des roquettes à courte portée, Tsahal dispose d’intercepteurs «Arrow» dédiés aux missiles balistiques à plus longue portée, qui ont été mis à rude épreuve depuis le début de la guerre ouverte avec l’Iran vendredi dernier. Un responsable américain a d’ailleurs confié au Wall Street Journal qu’Israël pourrait bientôt faire face à une pénurie de ce matériel. Lors de la précédente attaque de l’Iran, en octobre 2024, les Gardiens de la Révolution étaient allés jusqu’à affirmer que «90% des missiles» avaient «atteint leurs cibles», ce qui était sans aucun doute exagéré. De son côté, Tsahal avait déclaré avoir intercepté «la plupart» des missiles, reconnaissant seulement «quelques impacts dans le centre et d'autres dans le sud du pays». À cette occasion, la première utilisation des Fattah sur un théâtre d'affrontement marquait déjà une intensification du conflit entre Israël et l’Iran.