Saut à la perche : pourquoi Duplantis bat son record du monde d’un centimètre à chaque fois ?
À force de creuser, on peut trouver du pétrole. Mais à force de monter ? Armand «Mondo» Duplantis se rapproche de la réponse à chacun de ses meetings. Le Suédois a battu, mardi à Budapest (Hongrie), le record du monde de saut à la perche pour la 13e fois de sa carrière. Il n’a plus lâché ce record sur lequel il a fait main basse en février 2020 (6,17 m) et qu’il vient d’établir à 6,29 m.
À chaque fois, Duplantis ne bat le record que d’un petit centimètre. Pourquoi ? La première raison qui vient à l’esprit du grand public est celle de l’argent. Pour chaque record du monde, Duplantis, comme tous les athlètes, bénéficie d’une prime. Elle varie en fonction des meetings. À Torun (Pologne) lors de son premier record, le Suédois avait empoché 6.000 euros. À Glasgow (Écosse) où il avait sauté 6,18 m la semaine suivante, c’était environ 27.000 euros.
Passer la publicitéPrime de 50.000 dollars en Ligue de diamant
Lorsqu’il le bat en Ligue de diamant, compétition qui compte une quinzaine d’étapes par an, on monte à 50.000 dollars, jauge fixée par la fédération internationale World Athletics. Le montant était le même lors des Jeux olympiques de Paris 2024, où Duplantis avait atteint les 6,25 m. Mais penser que seul l’appât du gain motive son choix d’avancer centimètre par centimètre serait «un faux procès», estimait Gérald Baudouin, entraîneur national du saut à la perche à l’INSEP, pour Eurosport en 2020.
«Un procès qu’on ne ferait pas à un athlète de niveau moyen qui bat son record d’un centimètre, ajoutait Baudouin. Quand on connaît la difficulté d’avoir cette motivation, tout le temps, chaque jour à l’entraînement…» On en vient à l’autre raison derrière cette approche minimaliste : prendre le temps de se surpasser et garder un objectif en ligne de mire.
Laisser retomber l’adrénaline
«N’importe quel athlète ferait la même chose, ça lui permet de rester dans le “game”, de conserver une motivation sur le long cours. Car on sait à peu près tous qu’il peut faire 6,30 m, il les vaut dès maintenant», déclarait Philippe Collet, ancien perchiste français, dans les colonnes du Parisien en septembre 2023, lorsque Duplantis venait de sauter 6,23 m à Eugene (États-Unis).
Enfin, cette méthode évite de s’enflammer, enivré par l’adrénaline d’un record du monde, et de se blesser. C’est ce qui est arrivé à Renaud Lavillenie, tombeur du record le 15 février 2014 à Donetsk (Ukraine). Le Français avait franchi une barre à 6,16 m, un centimètre plus haut que l’illustre Sergueï Bubka en 1994.
À peine l’émotion retombée, Lavillenie a tenté 6,21 m. Mais, renvoyé par sa perche, le Charentais s’est mal réceptionné et s’est blessé au pied gauche. Résultat : 16 points de suture et plus de deux mois sur la touche. Il a beau se rapprocher des étoiles, Duplantis, 25 ans, s’efforce de garder les pieds sur terre.