Plainte pour agression sexuelle et insultes racistes : climat délétère dans un Ehpad municipal de Lyon
À la rudesse des tâches ingrates se sont progressivement ajoutées des tensions entre salariés, dans un contexte d’effectifs contraints et de direction instable. Une vingtaine d’employées de la maison de retraite municipale de l’île Barbe s’était réunie sous les fenêtres de l’hôtel de ville lundi pour se faire entendre du CCAS, leur employeur. Soutenues par le syndicat FO, ces aides-soignantes pour la plupart dénoncent un climat délétère alimenté par des insultes racistes au sein de cet Ehpad de 90 lits situé dans le 9e arrondissement de Lyon.
«Ça sent comme à Bamako ici», «il n’y a que des grosses fesses», «l’île Barbe c’est devenu l’Afrique». Plusieurs salariées de la structure que nous avons rencontrées dénoncent des insultes racistes, grossophobes et sexistes de la part d’au moins un employé. «Ce sont des insultes jetées comme ça à la cantonade au milieu du couloir», précise au Figaro une aide-soignante en poste depuis une dizaine d’années.
La mairie de Lyon assure avoir pris en compte et traité le problème il y a déjà plusieurs mois. «Il a été repris par la direction et s’était calmé, nous n’avions pas eu de retour mais allons reconvoquer cet agent», indique Alexandre Chevalier, adjoint au maire écologiste délégué à la qualité de vie des aînés. Les salariées de l’Ehpad assurent pourtant que la situation persiste. Plus largement, c’est un climat de défiance communautaire qui se serait installé entre deux camps désormais irréconciliables dans cette structure d’une soixantaine d’employés. «Il y a les Maghrébins d’un côté et les Noirs de l’autre», confirment plusieurs salariées au Figaro.
Climat délétère
Une guerre de tranchées qui se double désormais d’une opposition syndicale entre la CGT, historiquement majoritaire dans l’établissement, et FO, qui défend les salariées montées au créneau ces dernières semaines. Le tout sur fond d’instabilité managériale avec quatre directions successives ces cinq dernières années. «On était en autogestion», lance une salariée. Si bien que le serrage de vis lancé par la nouvelle direction, arrivée il y a un an pour reprendre la main et mettre fin à certaines pratiques, déplaît parfois selon la mairie.
«On essaie de remettre un cadre et il y en a qui ne le supportent pas, répond Alexandre Chevalier. Nous avons pris des mesures vis-à-vis de certains agents qui dysfonctionnaient. Ils se sont ensuite syndiqués chez FO.» Des lettres de recadrage ont été envoyées à certaines salariées qui dénoncent une discrimination syndicale. «Je les ai reçues juste après la réunion avec FO, disant que j’avais quitté mon poste, lance l’une des concernées. Alors même que je ne suis allée à la réunion que pendant ma pause».
La mairie dénonce, elle, «un conflit social très fort avec FO qui profite un peu de toutes les situations conflictuelles de l’Ehpad pour faire le buzz». Le syndicat dément une telle instrumentalisation. Et rappelle que ce climat délétère a été retranscrit par la conseillère en prévention et chargée d’inspection en santé sécurité au travail tout récemment.
Plainte pour agression sexuelle
Le rapport de cette dernière notait un fort absentéisme des agents qui se traduit par un recours à l’intérim dans ces métiers où les professionnels sont sortis abîmés après le Covid, ressentant une perte de sens au travail. Une tendance commune sur les trois structures similaires de la ville, mais qui explose cette année à l’Île Barbe. Le coût de l’intérim coûterait 900.000 euros par an. Afin de remotiver le personnel, la mairie tente de proposer des aménagements horaires avec des semaines plus courtes pour compenser des journées plus longues.
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En parallèle, des accusations plus graves ont vu le jour. Une plainte pour agression sexuelle a été déposée par une employée, qui accuse un homme de lui avoir touché la poitrine. Des agentes syndiquées chez FO assurent que d’autres jeunes stagiaires en auraient été victimes. «C’est un homme qui aime bien les jeunes filles. Dès qu’il y a une nouvelle, il se rapprochait d’elle pour lui toucher les cheveux», raconte l’une d’elles.
La mairie de Lyon assure avoir mis à pied l’individu concerné qui, après avoir soldé ses congés, est aujourd’hui en arrêt maladie. «Il sera mis à pied à son retour et ne retravaillera plus ici», assure Alexandre Chevalier. Pas sûr que cela suffise à ramener la sérénité dans les couloirs de la maison de retraite.