Retailleau, Dati, Barnier : une réunion de conciliation avant la commission fatidique du 28 juillet est-elle possible ?
Ils sont nombreux chez Les Républicains à espérer une entente cordiale entre Datistes et Barniéristes à Paris autour de la brûlante législative partielle de la 2e circonscription, dont le député macroniste sortant Jean Laussucq a été déclaré inéligible par le Conseil constitutionnel. Pour cette élection prévue en octobre, le choix de la candidature LR sera fixé lundi 28 juillet, par la commission nationale d’investiture (CNI), comme nous l’annoncions dans nos colonnes vendredi et comme l’a confirmé Bruno Retailleau le lendemain dans Le Figaro. Pour autant, si ce calendrier semble gravé dans le marbre, beaucoup veulent croire qu’une réunion préalable de conciliation resterait souhaitable pour déminer la bombe d’une guerre interne qui menace l’unité de la droite parisienne et risque de brouiller les messages des Républicains à huit mois des municipales.
Avant ce rendez-vous électoral jugé crucial pour la droite, qui rêve d’une vague bleue aux municipales en mars prochain, les tensions ne cessent d’agiter le microcosme parisien depuis l’annonce par Michel Barnier de sa volonté de participer à cette législative partielle. Le président du Conseil national, soupçonné par les proches de Rachida Dati d’être animé par d’autres desseins qu’un siège parlementaire à l’Assemblée, a publié une lettre aux Parisiens vendredi dans laquelle il assure n’avoir « aucune ambition municipale ». Promettant un engagement «loyal», il ajoute: «Ma démarche est une démarche de rassemblement. Je ne me présente contre personne, dans le respect de chacun et au service de tous». Un message qui laisse transparaître une volonté d’apaisement et la volonté de LR de tout faire pour tuer dans l’œuf une guerre dont tout le monde mesure les conséquences potentiellement désastreuses pour la droite.
Passer la publicitéCar si la droite se déchire à Paris, cela ne facilitera pas les appels à la mobilisation déjà lancés par les fédérations en vue des municipales. À peine ces bisbilles internes lâchées sur la place publique, aussitôt la concurrence se frottait les mains, y voyant une occasion inespérée de conquérir la 2e circonscription, réputée en or pour la droite et décidément très convoitée. Même si les LR ne la croient pas très sérieuse, l’hypothèse d’une candidature de Clara Chappaz, jeune ministre Renaissance de l’Intelligence artificielle et du numérique excite les commentaires. On a vu également le RN Thierry Mariani s’inviter dans la danse, considérant subitement ce territoire politique comme un terrain de jeu à ne pas manquer pour la rentrée.
Feuilleton risqué
Dans l’hypothèse où cet échange à trois serait possible avant la CNI du 28 juillet, le premier défi pour Bruno Retailleau sera de faire comprendre que personne, et encore moins Rachida Dati, qui croit en ses chances pour gagner Paris en mars 2026, n’a intérêt à laisser durer le feuilleton. Après avoir encouragé publiquement l’ex-premier ministre à s’engager aux législatives, avec le soutien affirmé de la première fédération LR de France, on voit mal comment le président des Républicains pourrait désormais reculer face à la colère de la ministre de la Culture.
Pour sa part, l’entourage de Rachida Dati assure qu’elle défendra bec et ongles son territoire au nom du respect des électeurs de la deuxième circonscription (qui comprend les 5e, 6e et 7e arrondissements). Ce week-end, il n’y avait aucune intention de participer à la moindre réunion de conciliation avant la CNI. Mais du côté de la présidence LR comme des proches de l’ex-premier ministre on veut croire que l’élue parisienne monte le ton pour obtenir un large soutien de la droite derrière sa candidature municipale. Comme si, derrière ses menaces à peine voilées d’une crise, il fallait surtout voir une pression tactique dans le but d’obtenir des garanties.
Depuis le départ de Rachida Dati vers le gouvernement de Gabriel Attal en janvier 2024, la droite parisienne a explosé en trois blocs. Critiquée pour son ralliement à la macronie, l’ex-présidente du Conseil national LR (poste occupé aujourd’hui par Michel Barnier), avait suscité l’exaspération au sein des Républicains. Nombre d’entre eux n’avaient pas compris comment l’élue parisienne, considérée comme l’une des figures féminines les plus visibles de la droite, pouvait s’engager derrière le parti présidentiel aux Européennes plutôt que de soutenir la candidature du Républicain François-Xavier Bellamy. Le mot « trahison » avait été prononcé.
Pagaille
Dans cette pagaille, rappelant d’autres crises passées, Rachida Dati n’a jamais cessé de garder la conquête de Paris dans son viseur. Et si elle a pu compter sur la fidélité de nombreux élus à droite, elle a également constaté un scepticisme naissant au sein de sa famille politique, nourri en partie par ses démêlés judiciaires dans l’affaire Carlos Ghosn et son potentiel risque d’inéligibilité (l’élue a engagé un recours en cassation après sa mise en examen depuis 2021 pour corruption et trafic d’influence).
Passer la publicitéProche du couple présidentiel, Rachida Dati a su conserver la confiance de l’ex-premier ministre, contre lequel elle affirme ne pas être en guerre même aujourd’hui mais elle sait que l’unité de la droite parisienne derrière son pari 2026 n’est plus aussi soudée qu’elle le fut. Au final, ce contexte pousse Bruno Retailleau et Michel Barnier à croire à la possibilité d’une issue concertée.
Les portes continueront-elles de claquer ou un accord sera-t-il trouvé, apte à enterrer la hache de guerre ? Une réunion de la troïka LR le dira peut-être avant la CNI dans huit jours. Chez Les Républicains, où les psychodrames ne sont pas une nouveauté, on parie sur les tempéraments du président des Républicains et du président du conseil national LR pour trouver les moyens d’une entente cordiale. Le premier n’a pas la réputation d’un sanguin incontrôlable, le second fut un négociateur reconnu du Brexit, doublé d’un animateur éprouvé du fragile socle commun à Matignon. Il n’en faudra sans doute pas moins pour rassurer Rachida Dati et canaliser son énergie légendaire vers l’objectif 2026 d’une vague bleue aux municipales. À Paris, comme ailleurs.