Défense, pêche, mobilité... Ce que contient l'accord entre l'Union européenne et le Royaume-Uni, cinq ans après le Brexit

Un nouveau "partenariat stratégique" vendu comme un nouveau chapitre profitable à toutes les parties. Le Royaume-Uni et l'Union européenne (UE) ont signé, lundi 19 mai, un accord lors d'un sommet à Londres. Véritable relance des relations entre les Vingt-Sept et les Britanniques, cinq ans après le Brexit, le partenariat a été négocié pendant des mois.

This is a new chapter in our EU-UK partnership. Starting with our Security & Defence Partnership. It’s first step towards the UK’s participation in our defence industrial readiness SAFE ↓ europa.eu/!VgjqKg

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— Ursula von der Leyen (@vonderleyen.ec.europa.eu) May 19, 2025 at 2:53 PM

Ce sommet "marque une nouvelle ère dans nos relations", a déclaré le Premier ministre britannique, Keir Starmer, lors d'une conférence de presse. Il avait promis de "remettre à zéro" les relations avec l'UE en arrivant au pouvoir en juillet dernier. "Nous tournons une page et ouvrons un nouveau chapitre, c'est important en ces temps où nous voyons monter les tensions géopolitiques", a affirmé de son côté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, lors de l'ouverture du sommet, au côté du président du Conseil européen, Antonio Costa.

Un rapprochement fort pour la défense

L'accord entre les deux parties porte sur plusieurs sujets, en premier lieu avec la signature d'un "partenariat de défense et de sécurité". Le but : "une coopération plus approfondie", selon Antonio Costa, qui "renforcera la contribution de l'Europe à l'Otan et nous permettra de mieux cibler nos priorités stratégiques communes". Ces derniers mois, la guerre déclenchée par la Russie contre l'Ukraine et le risque d'un désengagement américain du continent européen ont conforté Londres et Bruxelles dans leur volonté de rapprochement en matière de défense.

Les deux parties ont ainsi promis de renforcer leur soutien à l’Ukraine. Le Royaume-Uni pourra ainsi désormais participer à des réunions ministérielles de l'UE et rejoindre certaines missions militaires européennes.

Le texte ouvre aussi la voie à la participation des Britanniques à divers programmes d'achats communs d'armes et de munitions, rapporte Politico. Des négociations seront cependant nécessaires pour que Londres puisse participer au programme européen de réarmement baptisé "SAFE" (Security Action for Europe ou Action de sécurité pour l'Europe, en français), a précisé Ursula von der Leyen, rapporte le Guardian. Grâce à cet instrument, les Etats membres pourront emprunter à l'UE grâce à une enveloppe de 150 milliards d'euros. Si le Royaume-Uni devait rejoindre ce programme, il serait considéré comme un fabricant européen, au même titre que n'importe quel autre pays membre de l'union, et bénéficierait de conditions plus favorables qu'à l'heure actuelle.

Le maintien du statu quo sur la pêche

L'UE et le Royaume-Uni se sont aussi accordés pour assouplir certaines barrières commerciales, cinq ans après la sortie du pays du marché commun européen, en signant un document nommé "compréhension commune". Des blocages, notamment sur le dossier épineux de la pêche, particulièrement sensible pour la France, ont persisté jusqu'à la dernière minute. Finalement, Londres et les Vingt-Sept ont acté la reconduction de l'accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques, qui devait expirer en 2026, jusqu'en 2038.

En contrepartie, les Britanniques pourront exporter plus facilement leurs produits alimentaires vers le marché européen, grâce à un "alignement dynamique et rapide" du Royaume-Uni sur les règles sanitaires européennes. La suppression des formalités administratives et douanières sur la "grande majorité" des produits animaux et végétaux était une des priorités du gouvernement travailliste, les exportations britanniques ayant nettement reculé ces dernières années. La Cour de justice de l'Union européenne sera l'autorité en dernier ressort, une concession britannique susceptible de braquer les défenseurs du Brexit.

L'UE et Londres se sont aussi mis d'accord sur la nécessité pour le Royaume-Uni de rejoindre à nouveau le marché européen de l'électricité. Londres et Bruxelles ont également convenu d'une coopération sur les quotas d'émission, permettant aux entreprises britanniques d'échapper à la taxe carbone de l'UE. Selon Downing Street, ces mesures économiques doivent apporter "près de 9 milliards de livres [10,7 milliards d'euros] à l'économie britannique d'ici 2040", écrit le Guardian.

Des négociations sur la mobilité des jeunes

Tous les sujets mis sur la table dans le cadre de cet accord n'ont pas encore été tranchés. Les discussions doivent notamment se poursuivre sur les questions de mobilité. Les deux parties se sont engagées à avancer vers un programme de visas permettant notamment aux jeunes Européens d'étudier ou travailler au Royaume-Uni, et vice-versa. Bruxelles et Londres vont également discuter d'un éventuel retour du Royaume-Uni au sein du programme d'échange étudiant européen (Erasmus).

Le sujet est sensible côté britannique, avec la montée en puissance du parti europhobe et anti-immigration Reform, dirigé par l'ex-champion du Brexit, Nigel Farage. Ces dernières semaines, Keir Starmer avait répété ses conditions : pas question de revenir dans le marché commun ni dans l'union douanière et pas question de rétablir la libre-circulation.

Pas de quoi convaincre la cheffe du Parti conservateur, Kemi Badenoch, qui s'est dite "stupéfaite" par les accords, dénonçant même une "capitulation sur la pêche", rapporte la BBC. Le nouveau partenariat est "gagnant-gagnant", lui a répondu Keir Starmer, soulignant qu'avec les accords commerciaux déjà signés quelques jours plus tôt avec l'Iran et les Etats-Unis, "cela signifie des emplois (...) et plus de croissance créée" pour le Royaume-Uni.