Comment se déroule le voyage de Greta Thunberg et Rima Hassan, en route vers Gaza à bord d’un voilier ?

Entre sessions de guitare sur le pont, selfies au soleil couchant, et discussions autour d’une cafetière et d’une brique de jus d’ananas, l’équipage du voilier Madleen a mis le cap sur Gaza. Le navire de 18 mètres de long a quitté dimanche le port de Catane, à l’est de la Sicile avec douze militants propalestiniens à son bord. L’objectif de cette expédition, martelé sur les réseaux sociaux respectifs des passagers : accéder à la bande de Gaza pour demander la fin du génocide en cours et l’ouverture d’un corridor humanitaire maritime pour les habitants de l’enclave.

Six Français sont présents sur ce bateau affrété par la Coalition de la flottille pour la liberté (Freedom Flotilla Coalition), un mouvement pro-Palestinien né en 2010. Rima Hassan, l’eurodéputée LFI proche de Jean-Luc Mélenchon, est la personnalité emblématique du groupe. Autour d’elle, se trouvent deux journalistes, Yanis Mhadi et Omar Faiad, qui travaillent respectivement pour le média en ligne de gauche Blast et la chaîne Al-Jazeera. Plusieurs activistes français sont également du voyage : Pascal Maurieras, un marin encarté à la CGT, Reva Viard, un militant écologiste anti-A69, resté perché 39 jours en 2024 en haut d’un platane pour s’opposer à son abattage, et Baptiste André, présenté comme médecin. Le reste de l’équipage est multinational, on y trouve la Suédoise Greta Thunberg, une Allemande, un Hollandais, un Brésilien, un Turc et un Espagnol, tous dévoués à la cause palestinienne.

«Si on est attaqués, on coule»

Cette traversée de près de 2000 kilomètres (soit environ 1000 milles nautiques), a nécessité une «réflexion, une planification et une coordination minutieuse», lit-on sur la page Instagram de la Coalition de la Flottille de la Liberté, qui relaie des informations relatives au voyage. Rima Hassan a invité ses abonnés à télécharger une application marine pour suivre le parcours, affirmant que «la mobilisation citoyenne» est «le seul moyen de garantir notre sécurité et le succès de cette mission». Quant à la vie à bord du Madleen, baptisé ainsi en référence à une pêcheuse gazaouie, première femme à exercer cette profession dans l’enclave, elle est abondamment documentée par les marins.

Dans une vidéo publiée ce lundi, Rima Hassan fait une visite des cabines, s’enthousiasmant de la «vue sur la mer» depuis le hublot de la chambre qu’elle partage avec Greta Thunberg. L’eurodéputée dit également avoir suivi avec ses coéquipiers une formation de 5 heures «pour se préparer aux différents scénarios» qui les attendent. Les voici : une arrivée à Gaza réussie, une interception par les autorités israéliennes ou par leurs alliés ou encore une attaque («si on est attaqués, on coule, on peut tenir entre 6h et 8h avec nos gilets de sauvetage», précise-t-elle face caméra). Le Brésilien Thiago Avila affirme dans une autre vidéo que «même si l’entité sioniste cherche à nous faire mal, nous ferons ce que nous sommes venus faire». Il se félicite par ailleurs que «les choses bougent» et que «les gens comprennent désormais ce qu’est un génocide et un apartheid».

Soutien de l’actrice Susan Sarandon et la sœur de Bella Hadid

Greta Thunberg, la militante écologiste suédoise, très investie dans la cause antisioniste depuis le 7 octobre 2023, a également justifié à plusieurs reprises cette ambitieuse expédition. «Peu importe les obstacles, nous devons continuer à essayer de rejoindre Gaza, car le moment où l’on cesse d’essayer, c’est celui où l’on perd notre humanité», a-t-elle déclaré à des journalistes avant le départ. Le média Blast a relayé ce lundi une nouvelle déclaration de la jeune fille, depuis le pont du navire : «Bien sûr, cette mission comporte de nombreux risques mais nous avons aussi évalué le risque de ne rien faire. Ce risque est bien plus élevé que notre mission ici.»  Elle affirme ensuite qu’«il n’est jamais trop tard pour être du bon côté de l’histoire» et se fait menaçante : «Vos échecs resteront dans les mémoires et le monde en est témoin.»

Plusieurs personnalités médiatiques ont apporté leur soutien à cette mission, parmi lesquels l’actrice américaine Susan Sarandon (connue pour son rôle dans Thelma et Louise, NDLR), Liam Cunningham, célèbre pour avoir interprété Davos Mervault dans Game of Thrones ou encore la styliste et réalisatrice Alana Hadid. D’origine palestinienne par son père, elle est la demi-sœur des deux célèbres mannequins Bella et Gigi Hadid.

Si ce voyage est d’abord une opération communication de grande ampleur, a-t-il de réelles chances de succès ? Rien n’est moins sûr. Il y a un mois, un autre navire, appartenant également à la Coalition de la flottille pour la liberté, avait été endommagé au large de Malte et contraint d’abandonner sa mission. Les passagers avaient alors dit soupçonner une attaque de drones israéliens. En 2010, un assaut israélien contre une flottille humanitaire qui tentait de briser le blocus à Gaza, avait fait dix morts et engendré un vaste scandale. Cette fois, s’il n’est pas freiné en chemin, le Madleen aura bien du mal à accéder à l’enclave. Après deux mois d’isolement imposés par Israël, l’aide humanitaire est partiellement revenue à Gaza mais reste faible et très encadrée. Le matériel de secours et la petite cargaison alimentaire que transporte le navire, ont peu de chance d’arriver à bon port.