Malgré le coup de fouet des JO, les nuages s’accumulent au dessus de l’économie française

C’est certes un peu mieux que ce qui était anticipé, mais cela reste un portrait bien morose de l’économie française que l’Insee dresse dans sa dernière note de conjoncture, publiée ce lundi. L’institut table sur une croissance annuelle de 1,1 % en 2024, soutenue essentiellement par le rebond d’activité attendue des Jeux olympiques. Dans le détail, le produit intérieur brut (PIB) progresserait ainsi de 0,4 % cet été, dont 0,3 point grâce aux Jeux, avant de se replier de -0,1 % par contrecoup à l'automne, lors du dernier trimestre. « L'élan pour 2025 serait faible : l'acquis de croissance fin 2024 s'élèverait à +0,2 %», précise la note de l’institut. Dans cette ambiance maussade, il paraît alors fort probable que la croissance économique poursuit son ralentissement l’année prochaine.

Les grands moteurs de l’activité s’affichent en effet en petite forme. Au premier semestre, ce sont essentiellement le commerce extérieur et les dépenses publiques qui ont soutenu l’économie. A contrario, l’investissement des entreprises ne profite toujours pas de l’assouplissement de la politique monétaire. Après une année 2023 très dynamique, il n’en finit pas de ralentir. «D'ici à la fin de l'année, il resterait pénalisé par les conditions de financement, par le redémarrage entravé de la demande dans la zone euro et par l'incertitude politique», prévient l’Insee. Depuis la dissolution, les chefs d’entreprise s’inquiètent des prochaines orientations politiques et, en août, le climat des affaires restait inférieur à sa moyenne historique. La nomination de Michel Barnier à Matignon a semblé momentanément rassurer les milieux d’affaires. Mais les équilibres restent fragiles. 

Des gains de pouvoir d’achat

Au-delà du climat politique, l’Insee s’inquiète en particulier du décrochage du secteur de l’information-communication. «Alors qu'ils constituaient un soutien constant de la croissance française depuis la crise sanitaire, les investissements des entreprises françaises en logiciels semblent se gripper», écrivent les experts. C’est un mauvais signal pour l’évolution de la productivité. Du côté des ménages, les dépenses ne brillent pas non plus par leur dynamisme. Elles sont restées atones au premier semestre. «Ce qu’on voit dans les enquêtes, c’est que les ménages ont encore en mémoire l’inflation très importante des derniers mois sur les produits du quotidien. Alors même qu’elle diminue nettement, cela pèse encore sur la consommation», explique Dorian Roucher, chef du département de la conjoncture. L’inflation, qui est passée sous la barre des 2 % en août, continuerait en effet de décroître, pour s’établir à 1,6 % sur un an en décembre 2024.

L’Insee table toutefois sur un sursaut estival, provoqué en grande partie par les Jeux olympiques : achats de billets et dépenses de restauration-hébergement. Les gains de pouvoir d’achat, «du fait de la revalorisation des prestations sociales sur l'inflation passée», devraient aussi peu à peu inciter les Français à reprendre avec plus d’entrain le chemin des magasins... s’ils veulent bien renoncer à leur passion pour l’épargne. Les incertitudes économiques et budgétaires, qui laissent augurer de prochaines augmentations impôts, incitent en effet depuis des mois les ménages à penser en priorité à leur bas de laine. À fin juin, le taux d’épargne atteignait 17,9 % contre 14,6 % en moyenne pour 2019. Du côté de l’immobilier, l’Insee parie en revanche sur une lente reprise des acquisitions. Après une année de décrue, au second semestre, les achats immobiliers commenceraient déjà par se stabiliser avant de progresser à nouveau sous l’effet de la diffusion de la baisse des taux. 

Cette ambiance peu allante vient un peu plus compliquer l’équation du futur gouvernement Barnier. La dégradation des comptes publics nécessite en effet une potion budgétaire nécessairement amère. Potion qui pourrait miner encore davantage une conjoncture déjà bien fragilisée.