L’agent 007 serait-il sensible ? Son dernier interprète, Daniel Craig, l’est. Dans un entretien accordé au magazine The New Yorker , l’acteur britannique a affirmé que « la construction sociale de la masculinité » avait été l’une de ses principales « réserves » dans son approche du personnage de James Bond, qu’il a joué pendant près de 20 ans.
En pleine promotion du film Queer du réalisateur italien Luca Guadagnino, Daniel Craig a déclaré qu’il était « souvent risible » de jouer James Bond. Mais que le genre ne permettait pas de faire dans la nuance. « On ne peut pas s’en moquer et s’attendre à ce que ça marche. Il faut y croire », a-t-il estimé. Croire en ce personnage culte, presque connu de tous, qui a fait la gloire du cinéma britannique comme celle de l’acteur, compagnon de l’Ordre de Saint Michael et Saint George depuis 2022.
« Nous sommes tous vulnérables »
« Ce n’est pas mon travail de juger, a-t-il ajouté. Car commencer à juger le personnage que vous incarnez est la pire chose que vous puissiez faire en tant qu’acteur. » Daniel Craig se dit désormais plus enjoué à l’idée de jouer un personnage comme Lee, celui qu’il interprète dans Queer - « à la recherche de la luxure, de l’amour [...] et qui est une sorte d’homme différent » - que de reprendre le costume de l’agent du MI6, perclus de clichés. Et cela, car la « vulnérabilité des êtres humains [l]’intéresse toujours ».
« Ce qui compte, c’est la façon dont les garçons sont élevés, la façon dont les hommes sont censés se comporter »
Daniel Craig
« Nous sommes tous vulnérables. Peu importe qui vous êtes. Peu importe à quel point vous êtes dur, tout le monde est vulnérable », a-t-il tenu à rappeler. « Ce qui compte, c’est la façon dont les garçons sont élevés, la façon dont les hommes sont censés se comporter, la façon dont quelqu’un comme Burroughs était censé se comporter », poursuit l’acteur britannique, citant l’écrivain William S. Burroughs, dont l’histoire a inspiré Luca Guadagnino pour Queer.
James Bond, une époque révolue
La page James Bond tournée, Daniel Craig estime avoir changé de visage. L’agent secret « représente presque vingt ans de ma vie», rappelle-t-il. « Quand je l’ai accepté, j’étais quelqu’un. Je suis maintenant quelqu’un de complètement différent. » C’est pourquoi il donne aujourd’hui la priorité à des rôles qu’il juge plus « sincères », dans lesquels il ne s’oblige plus à jouer les durs à cuire, les sauveurs du monde. Il y a 18 ans, l’acteur britannique ne se serait jamais engagé dans un film comme Queer. « Je n’aurais pas pu faire ce film quand je faisais Bond. Je me serais dit : “Pourquoi ? Qu’essaies-tu de prouver ? ” », a confié Daniel Craig.
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Dans le nouveau film de Luca Guadagnino, l’interprète de Bond dans Casino Royale (2006), Quantum of Solace (2008), Skyfall (2012), Spectre (2015) et Mourir peut attendre (2021), joue le rôle d’un homosexuel toxicomane. L’intrigue se déroule dans les années 1950 à Mexico, où Lee (Daniel Craig), expatrié américain menant une vie solitaire dans une petite communauté ouvrière et universitaire, tente de courtiser un jeune étudiant, Eugene Allerton (Drew Starkey). Queer est déjà sorti aux États-Unis. Le film a été censuré lors d’un festival de cinéma à Istanbul pour « trouble à l’ordre public ». Son réalisateur s’est dit prêt à combattre « toute institution voulant ternir les pouvoirs » du cinéma, en marge du festival du film de Marrakech.