Stellantis : la rémunération de Carlos Tavares à l'épreuve du vote des actionnaires ce mardi
C’est une Assemblée générale scrutée de près qui se tient ce mardi après-midi à Amsterdam, aux Pays-Bas. Au cœur des crispations, la rémunération du patron, Carlos Tavares, sur l’exercice 2023 de Stellantis. Le directeur général du quatrième groupe automobile mondial pourrait recevoir 36,5 millions d’euros, dont une prime de 10 millions d’euros pour la «transformation» du groupe créé en 2021 après la fusion de PSA et Fiat Chrysler. Cette somme intègre également des pensions de retraite versées sur le long terme et un bonus s’il atteint des objectifs fixés pour 2025, dernière année de son mandat actuel à la tête du constructeur.
Si les actionnaires du groupe votent en faveur du versement de cette rémunération, Carlos Tavares pourrait ainsi recevoir directement 23,5 millions d’euros, composés principalement d’actions. Lundi, lors d’un déplacement à l’usine de Trémery, en Moselle, le patron de Stellantis a assumé ces montants, se comparant même à «un joueur de foot et un pilote de Formule 1». «Si vous estimez que ce n’est pas acceptable, faites une loi et modifiez la loi et je la respecterai», a-t-il lancé au micro de France Bleu Lorraine Nord.
En réalité, le vote des actionnaires ce mardi est uniquement consultatif, car le siège étant basé à Amsterdam, c’est le droit néerlandais qui s’applique. Mais Carlos Tavares aurait convenu lundi «qu’il réagirait de manière démocratique au vote des actionnaires», selon les informations de La Tribune.
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«De sérieuses réserves»
Les actionnaires voteront-ils cette rémunération ? Certains n'hésitent pas à se dresser contre cette somme, jugée excessive. C'est notamment le cas du cabinet américain de conseil aux investisseurs Glass Lewis, qui a émis de «sérieuses réserves». Idem pour Proxinvest, pointant «une rémunération trop élevée en comparaison des sociétés du même secteur», lançait lundi Charles Pinel, directeur général de l'agence de conseil, sur BFM Business. S'il souligne «des résultats étincelants» du groupe, il appelle le patron de Stellantis «à faire attention» : «Vous êtes responsable de la cohésion au sein de votre société et même un peu plus largement de la cohésion du système capitaliste».
De son côté, l’État actionnaire a précisé sa position. Fin mars, le directeur de la banque publique d'investissement, Nicolas Dufourcq, avait indiqué qu'il «s'abstiendrait sur ces questions de rémunération». «On est arrivé à des niveaux qui sont effectivement à l'américaine, pour un groupe qui est essentiellement américain, mais qui peuvent en effet ne pas être tout à fait compris en Europe», commentait-il.
Cela fait déjà plusieurs années que la rémunération de l’ingénieur fait débat. En 2022, Emmanuel Macron avait jugé «choquant et excessif» le montant «astronomique» de sa rétribution. Pour autant, les actionnaires avaient voté favorablement à son versement, à près de 80%. De son côté, la CGT de Stellantis dénonce un salaire «totalement choquant et scandaleux», avec «une augmentation de près de 50%, quand la plupart d’entre nous ont eu seulement 3,7% et galèrent pour finir le mois». Afin de calmer les ardeurs, le groupe avait annoncé le 15 février dernier une redistribution de près de 1,9 milliard d’euros à ses salariés dans le monde, représentant un minimum de 4100 euros pour les plus bas salaires en France.
En plus de ce dossier houleux s’ajoutent également des interrogations à propos du rôle de John Elkann, héritier de la famille Agnelli, dont la holding Exor est actionnaire majoritaire de Stellantis, à 14,2%. Aujourd’hui président exécutif du groupe, le salaire du dirigeant italien s’élève à 4,8 millions en 2023. «Quand vous avez un directeur général, vous devez avoir un président non-exécutif et ne pas le rémunérer autant», souligne sur BFMTV Denis Branche, cofondateur de Phitrust.