«Une incompétence crasse» : après les violentes intempéries à Cannes, David Lisnard fustige Agnès Pannier-Runacher
Le Figaro Nice
Le maire de Cannes, par ailleurs président de l’Association des maires de France et dont le nom a un temps été évoqué pour Matignon, est du genre direct, frontal. Un trait de caractère qui le conduit régulièrement à régler ses comptes sur les réseaux sociaux. Agnès Pannier-Runacher, fraîchement nommée à la tête du ministère de la Transition écologique, en a fait les frais lundi soir. Quelques heures plus tôt, la cité du cinéma avait été frappée par un épisode méditerranéen de haute intensité. Aux premières heures du jour, il est tombé en un temps record une quantité d’eau insensée : plus de 18 millimètres en 12 minutes. Et même 50 millimètres en une demi-heure. De véritables torrents ont inondé les rues, charriant véhicules et poubelles sur leur passage. Par chance, personne n’a été blessé.
Tandis qu’une cellule de crise était ouverte par la municipalité, David Lisnard a vite dénoncé une faille dans le niveau d’alerte émis par les autorités, le département n’étant alors placé qu’en vigilance jaune «pluies-inondations» et «orages». «Aucune alerte reçue, aucun modèle météo en anticipation, une situation gérée sur le terrain par les équipes municipales», a-t-il écrit sur X. «Si l’orage était resté plus longtemps, ça aurait pu être beaucoup plus grave», a-t-il ajouté dans un entretien télévisé avec France 5.
«Sururbanisation»
Si la préfecture n’a pas daigné donner suite aux remarques de l’édile maralpin, Météo France a répondu sans tarder aux sollicitations de la presse. «La Vigilance jaune indique que des phénomènes météorologiques sont en cours dans le département, et qu'ils peuvent être occasionnellement et localement intenses/dangereux», a rappelé le service météorologique. Et d’ajouter : «Les cumuls sur Cannes [...] et la dimension localisée du phénomène (qui n'a pas touché la totalité du département) correspondent à un niveau de Vigilance jaune. À titre de comparaison, un des critères de décision pour passer sur de la Vigilance orange est d'avoir un cumul de 80 mm sur 3 heures, ce dont on est assez loin avec l'épisode de ce matin (le cumul sur 24 heures à la station de Cannes-aéroport est de 41 mm)».
Sur les réseaux sociaux, d’autres spécialistes météo ont soutenu tout au long de la journée que l’orage et les pluies étaient bien attendus avec un tel niveau d’intensité. «Les modèles météorologiques avaient parfaitement anticipé cet orage (par ailleurs très classique). Le problème n'est pas la prévision mais la “sururbanisation” de la ville de Cannes, régulièrement inondée par les orages méditerranéens. Les images qui nous parviennent ce matin se situent en zone inondable identifiée, connue, mais pourtant bétonisée. Il faut se poser les bonnes questions», a ainsi analysé Serge Zaka, docteur en agroclimatologie et chasseur d'orages franco-libanais.
À force d'imperméabiliser et de densifier les villes, on arrive à des dégâts de cette nature. (...) 50 millimètres d'eau, ce n'est pas les chutes du Niagara non plus
Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique
Interrogée à son tour dans l’émission C à vous, sur France 5 lundi soir, Agnès Pannier-Runacher est revenue sur «la cause première» des évènements cannois, assurant par la même occasion que Météo France avait «fait son boulot». «À force d’imperméabiliser et de densifier les villes, on arrive à des dégâts de cette nature. (...) 50 millimètres d’eau, ce n’est pas les chutes du Niagara non plus», a-t-elle lancé. Une déclaration qui a fait bondir David Lisnard, accusant un «propos d'une incompétence crasse (...), irrespectueux des réalités et du travail local». «Nous sommes un des secteurs de France les plus actifs contre les crues éclair, y compris en réduction de l'artificialisation, reconnu par votre ministère. Et vous restez à ce niveau de prêchi-prêcha ? Pourriez-vous respecter les gens et le travail dans une ville sinistrée ?», a encore tancé le président de Nouvelle Énergie dans une série de tweets au vitriol.
D’autres élus montent au créneau
«Pour mémoire, Mme la Ministre, le record à Paris en 24 heures est de 78 mm. Ce matin à Cannes, il est tombé près de 50 mm en 30 minutes ! C'est une intensité de pluie que plus de la moitié des Français n'a jamais vue de sa vie !», a complété le directeur des services techniques de la ville, Thomas Onzon. Et d’autres élus de s’en mêler, tels le maire de Mandelieu-la-Napoule, Sébastien Leroy (LR) ou encore la députée (LR) des Alpes-Maritimes Alexandra Martin. «En résumé, en 24 heures, le ministre de la Justice nous explique que ses idéaux prévaudront sur le ministère de l'Intérieur et la ministre de l'Écologie insulte tous les élus locaux de France en affirmant que 50 mm de précipitations en 30 minutes c'est risible. Pas mal pour un premier jour», s’est gaussé le premier. «Quand on est ministre de l'Écologie Agnès Pannier-Runacher, soit on connaît les ressorts des risques naturels auxquels sont confrontées nos communes - ce qui me semble être le b.a.-ba -, soit on se renseigne avant de commenter», a persiflé la parlementaire cannoise.