L’objectif zéro artificialisation nette rayé de la loi « Trace » par les sénateurs

C’est au tour du zéro artificialisation nette (ZAN) des sols à horizon 2050 de vaciller. Le Sénat a voté le 18 mars la proposition de loi visant à instaurer une « trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux ». Cette loi, dite « Trace », doit remplacer le ZAN « devenu un repoussoir pour trop d’élus locaux », selon Guislain Cambier, l’un des coauteurs du texte.

S’il a été très largement adopté au Sénat, le texte est loin de faire l’unanimité. Plusieurs ONG, la Fondation pour la nature et l’homme (FNH), la Ligue pour la protection des oiseaux, France Nature Environnement, Notre affaire à tous et Terre de liens avaient appelé les sénateurs à rejeter ce texte, qui constituent selon elles un « permis de bétonner ». Leur appel n’a guère été entendu.

Un « détricotage massif des règles qui protègent notre environnement »

C’est sur le volet des collectivités que la chambre haute a été convaincue. Le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste-Kanaky (CRCE-K) a ainsi choisi de voter ce texte qui, a déclaré en séance sa présidente Cécile Cukierman, donne « davantage de lisibilité aux élus locaux », tout en soulignant que « l’artificialisation des sols est un enjeu important, dont nous aurons certainement à rediscuter », avec les « retours d’expérience ». Ronan Dantec, sénateur du groupe Écologistes, a, lui, au contraire, dénoncé « une loi de posture, de surenchère » et « à contretemps ».

« Assouplir » et « simplifier » : ce sont les maîtres mots pour justifier ce texte qui prévoit la suppression de la définition des termes « artificialisation des sols » du Code de l’urbanisme, « au détriment de la protection des sols vivants, de la qualité de vie dans les villes et villages et de la lutte contre le changement climatique », selon la FNH. Il ouvre également la possibilité pour les communes de dépasser de 20 % les objectifs de réduction de l’artificialisation sans justification. Et crée de nombreuses exemptions, notamment pour les industriels : « Des dizaines de milliers d’hectares seront exemptées, déplore Thomas Uthayakumar, directeur programmes et plaidoyer au sein de la FNH. Tout le monde sait que les espaces ne sont pas infinis. Il est impossible de continuer à grignoter deux fois la superficie de Paris par an. »

La proposition de loi supprime également l’objectif intermédiaire de diviser l’artificialisation par deux d’ici à 2031. Un objectif pourtant déjà intégré dans les documents d’urbanisme, ce qui revient, selon le directeur programmes et plaidoyer de la FNH, « presque à dénigrer le travail déjà entamé par plusieurs collectivités, qui s’étaient hâtées pour les produire ». « Si on doit atteindre la neutralité en 2050, l’objectif intermédiaire est primordial pour poser des jalons et crédibiliser le ZAN issu de la loi », explique Thomas Uthayakumar. Pour ce faire, il insiste pour « lui donner une structure financière qui soit à la hauteur pour accompagner des collectivités qui sont aujourd’hui démunies, notamment techniquement ».

Dans un contexte de « détricotage massif des règles qui protègent notre environnement, regrette-t-il, la loi Trace ne fait pas exception ». Adoptée en procédure accélérée avec un soutien en demi-teinte du gouvernement, elle devra entrer en vigueur avant l’été si elle est votée par l’Assemblée nationale.

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