Ce jeudi 18 septembre, la France a de nouveau fait la une des journaux du monde entier. Un peu plus de 500.000 manifestants selon les chiffres du ministre de l’Intérieur (au moins un million selon la CGT) ont défilé dans les rues de l’Hexagone contre les politiques d’austérité.
Une mobilisation qui intervient à peine une semaine après la nomination de Sébastien Lecornu comme premier ministre. L’événement n’a pas échappé à la presse étrangère qui trouve là une nouvelle occasion d’analyser la crise politique et sociale française.
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Passer la publicitéLe ras-le-bol français
Outre-Manche, le Telegraph dresse un tableau sombre de la situation. Le quotidien conservateur rapporte que «plus de 300 personnes ont été arrêtées parmi les centaines de milliers qui ont manifesté contre les politiques d’austérité». Le journal londonien souligne les affrontements avec la police antiémeute et note que «des manifestants ont brièvement pris d’assaut le ministère des Finances dans le quartier de Bercy à Paris».
Son compatriote The Times s’attarde plutôt à décrire le ras-le-bol français vis-à-vis de l’exécutif. «Les manifestants français peuvent s’accorder sur une chose : Macron doit partir», titre le journal. Adam Sage, correspondant à Paris, rapporte les propos d’un manifestant : «On en a marre de lui et de sa politique. C’est le chef d’État le moins respecté au monde.»
Quant au Guardian, journal de centre gauche, il donne largement la parole aux manifestants et aux syndicats. Le journal cite notamment Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT : «La colère est immense, la détermination aussi. Mon message à M. Lecornu aujourd’hui est le suivant : c’est la rue qui doit décider du budget.»
Réduire les dépenses ou taxer les riches ?
De l’autre côté de l’Atlantique, le New York Times offre une lecture économique de la crise. Dans un article titré «Taxez les riches, crient les manifestants français», le journal new-yorkais met en avant la proposition de l’économiste Gabriel Zucman d’imposer une taxe de 2% sur les fortunes supérieures à 100 millions d’euros. «Cette proposition touche au cœur d’un débat qui déchire la France : le gouvernement doit-il redresser ses finances en réduisant les dépenses de retraite, de santé et d’éducation, ou en taxant les ultra-riches à un moment où les rangs des super-riches ont augmenté ?» s’interroge la correspondante Liz Alderman.
Plus alarmiste, le Wall Street Journal fait état «des centaines de milliers de manifestants qui se sont déversés dans les rues à travers la France ce jeudi». Leur objectif ? «Faire pression sur le président Emmanuel Macron et son nouveau premier ministre pour qu’ils abandonnent toute mesure d’austérité.»
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Passer la publicité«La France reprend la grève»
De retour en Europe, le journal allemand Die Zeit propose, lui, une couverture différente. Sous le titre «Ils veulent le chaos», l’hebdomadaire libéral de gauche se concentre sur le Black Bloc et les mouvements anarchistes. «Pour de nombreux Français, le Black Bloc fait partie intégrante de la manifestation au même titre que le stand de saucisses syndical», écrit la journaliste Annika Yeares depuis Paris. Citant l’historien Sylvain Boulouque qui assure que le Black Bloc veut «abolir l’État», le journal hambourgeois note que «des personnes issues de la classe ouvrière adhèrent de plus en plus» à ce mouvement, autrefois composé principalement «d’enfants de familles aisées et universitaires».
En Espagne, El País couvre sobrement les manifestations françaises avec ce titre : «La France reprend la grève pour rejeter les coupes budgétaires ». Le quotidien madrilène souligne que «si Bayrou tout comme son plan ne sont plus à Matignon, le mécontentement a ramené des centaines de milliers de personnes dans les rues».
La journée de contestations a aussi interpellé nos voisins suisses. Le Temps parle d’une «mobilisation contre l’austérité injuste». Le journal genevois cite une manifestante parisienne : «Ce budget rassemble tous les problèmes du moment, on n’en peut plus de se serrer la ceinture.» Pour le quotidien helvétique, les syndicats ont cette fois-ci «prouvé leur puissance de mobilisation et d’organisation, notamment en comparaison des mouvements nés sur les réseaux sociaux».
«Une journée typique»
Au-delà de leurs différences éditoriales, les médias internationaux convergent sur plusieurs points. D’abord, tous soulignent l’ampleur de la mobilisation, même si les chiffres varient selon les sources. Tous évoquent ensuite les affrontements en fin de journée à Paris. Et surtout, tous décrivent un pays dans l’impasse politique, avec un président affaibli et un nouveau premier ministre déjà sous pression.
La presse étrangère reste toutefois fascinée par cette «exception française» où les manifestations de rue constituent un mode d’expression politique à part entière. Comme le résume le Times doté d’une pointe d’ironie british : «C’était une journée typique dans une capitale connue des visiteurs pour son romantisme et des locaux pour son insurrection.»