Budget 2026 : qu’est-ce que la règle de l’entonnoir, censée limiter la durée des débats parlementaires ?
Cette règle permet d’éviter de prolonger inutilement les discussions sur les articles déjà validés par les deux assemblées. Elle a cependant une efficacité limitée dans le contexte actuel puisque les parlementaires peinent à trouver un compromis sur les textes.
Passer la publicité Passer la publicitéLa règle dite de l’entonnoir est censée accélérer les débats. Mais, cette année, la tonalité des discussions en a décidé autrement. En effet, les députés ont rejeté en bloc le projet de loi de finances (PLF), qui est sur la table du Sénat en séance publique depuis le 27 novembre dernier. Quant au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), sans surprise, la commission mixte paritaire (CMP), composée de sept députés et sept sénateurs, a échoué à se mettre d’accord sur ce texte. Le budget de la Sécurité sociale entre donc en deuxième lecture aujourd’hui à l’Assemblée nationale.
C’est là que la règle de l’entonnoir intervient. Après la première lecture, et dès la CMP, les députés ainsi que le gouvernement voient leur pouvoir d’amendement limité. Selon cette disposition, si le parlement et le Sénat ont adopté «en termes identiques» des articles, ils sont «exclus de la navette» précise le règlement des deux chambres. Les amendements portant sur ces articles sont donc déclarés irrecevables, de même que «ceux introduisant une disposition additionnelle sans relation directe avec les dispositions restant en discussion». Cette règle traduit donc l’idée selon laquelle la navette tend à un rapprochement progressif des points de vue, explique le site de l’Assemblée nationale.
Passer la publicitéUne règle à valeur constitutionnelle
Cette règle, qui a valeur constitutionnelle, notamment depuis une décision du Conseil constitutionnel en juin 2000, a trois exceptions. «Ne sont ainsi pas soumis à cette règle les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution» ou «à opérer une coordination avec d’autres textes en cours d’examen ou à corriger une erreur matérielle», précisent les Sages de la rue de Montpensier.
En théorie, ce principe de l’entonnoir permet d’accélérer les débats, en se concentrant uniquement sur les points de désaccord. Mais cette année, les points de divergence sont nombreux, à tel point que la partie recettes du PLF a été rejetée en bloc par les députés. «Comme l’Assemblée n’a pas adopté le PLF en première lecture, la règle de l’entonnoir est moins stricte», détaille Éric Coquerel, le président LFI de la commission des Finances.
Quant au PLFSS, députés et sénateurs ne se sont pas mis d’accord à l’issue de la CMP. «Sur ce texte, tous les articles sont en discussion», décrypte Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à l’université Paris-Panthéon-Assas, contacté par Le Figaro. En effet, faute de vote à l’Assemblée nationale, aucune disposition n’est considérée comme ayant été adoptée conforme. Concrètement, cela signifie que les articles supprimés, comme l’article 45 bis sur la suspension de la réforme des retraites, peuvent être rétablis. «Cela ne tombera pas sous le coup des irrecevabilités financières», détaille Benjamin Morel. L’application de la règle de l’entonnoir a donc un effet limité. Mais le professeur nuance : les parlementaires «ne peuvent pas proposer d’articles additionnels : tous leurs amendements sont bornés à la modification d’articles déjà existants dans le texte en discussion ou dans le texte originel», détaille-t-il sur X.
Or les délais sont de plus en plus serrés. Sébastien Lecornu s’étant engagé à ne pas avoir recours à l’article 49.3 sur le budget, il restera deux options au gouvernement en l’absence de vote sur le budget : une loi spéciale ou le recours aux ordonnances.