Il aura eu le temps de déposer une canette de Coca-Cola light et une noix de coco en guise d’offrandes... Avant de se faire arrêter par les autorités. Jeudi 4 avril, la police des îles Andaman-et-Nicobar, dans l’océan indien, a annoncé l’arrestation d’un touriste américain qui s’était introduit sur l’île très réglementée de North Sentinel, a rapporté le journal The Guardian . Peuplé de la tribu isolée des Sentinelles, l’îlot de l’archipel indien est interdit d’accès à moins de cinq kilomètres de la rive - étrangers et indiens compris.
En essayant d’entrer en contact avec cette peuplade coupée du monde, Mykhailo Viktorovych Polyakov, 24 ans, a dérogé à la règle. Bilan : le citoyen américain a été arrêté deux jours après son périple, avant d’être «présenté devant le tribunal local», a déclaré le chef de la police des îles Andaman-et-Nicobar, HGS Dhaliwal. Il est désormais en détention provisoire «pendant trois jours pour un interrogatoire plus approfondi».
Arrivé sur l’île, le jeune homme ne s’était pas contenté d’y déposer des présents : « il a brièvement accosté pendant environ cinq minutes, a laissé les offrandes sur le rivage», et «a prélevé des échantillons de sable», précise le chef de la police. Le tout, après avoir sifflé au large de l’île pendant une heure environ, afin d’attirer l’attention des quelque 150 autochtones. Le touriste américain - youtubeur à plusieurs milliers de vues d’après les médias - avait également «enregistré une vidéo» avec sa caméra GoPro, permettant aux autorités de confirmer «son entrée et son atterrissage sur l’île interdite de North Sentinel».
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Un homme avait été tué en 2018
L’hostilité du peuple autochtone au monde moderne n’est plus à prouver : l’affaire Mykhailo Viktorovych Polyakov fait écho au destin tragique de John Allen Chau, jeune missionnaire de 27 ans, qui s’était aventuré sur les côtes de l’archipel en 2018. Entré illégalement, son corps n’avait jamais été retrouvé et aucune enquête n’avait été ouverte, en raison de l’interdiction d’accès à moins de cinq kilomètres de la rive de North Sentinel.
L’arrestation de ce touriste américain est donc un nouveau coup de projecteur sur l’îlot de 56 km2, au grand damne du groupe de défense des droits des peuples autochtones Survival International : qualifiant cet acte de «profondément troublant», le porte-parole de l’ONG Jonathan Mazower craint la visibilité offerte par les réseaux sociaux et redoute des «menaces pesant sur les populations tribales isolées».
Protégée des maladies extérieures par la législation indienne rigoureuse, la tribu des Sentinelles demeure un mystère. En octobre 2024, Mykhailo Viktorovych Polyakov avait déjà essayé de déceler leurs secrets en se rendant sur l’île, avec l’aide d’un kayak gonflable. Sa tentative avait été infructueuse - tout comme la suivante, en janvier 2025 -, arrêté par le personnel de l’hôtel. Cette fois-ci, Mykhailo Viktorovych Polyakov a parcouru «les quelque 35 kilomètres de mer ouverte» à bord d’un bateau pneumatique à moteur. Les autorités indiennes poursuivent leurs recherches, et tentent «d’identifier toute personne qui aurait pu aider Polyakov».