Allemagne : sous pression des écologistes, Merz repeint en vert son bazooka budgétaire
Le futur nouveau chancelier Friedrich Merz a éliminé vendredi, le dernier obstacle politique qui se dressait sur sa route avant de voter un plan massif de dépenses. Le SPD et la CDU, partenaires de la prochaine coalition gouvernementale, ont réussi à rallier les Verts à leur projet de stimulation budgétaire, permettant ainsi de s’assurer au Bundestag, le 17 février, d’une majorité des deux tiers, condition indispensable à cette réforme de nature constitutionnelle. Pour ce faire, outre la suppression du frein à la dette pour les dépenses de défense, un fonds spécial de 500 milliards d’euros en faveur des infrastructures comprendra une enveloppe spéciale de 100 milliards dédiée au climat. Ce même Fonds ne pourra pas servir, en outre, à financer des dépenses courantes, comme le craignaient les écologistes.
« Nous nous sommes mis d’accord, ça n’a pas été une mince affaire », a avoué le chef de la CDU Friedrich Merz. « Il s’agit de montrer en temps de crise que notre démocratie fonctionne, que le centre politique en Allemagne est capable de prendre ensemble des décisions difficiles », a renchéri le président de la fraction CSU (bavaroise) au Bundestag, Alexander Dobrindt.
Après une entrée en fonction chaotique, le soulagement dominait au sein du parti conservateur qui a dû dans l’urgence renverser ses fondamentaux politiques. Prise à contrepied par l’alignement russe de Donald Trump sur le dossier ukrainien, la formation de l’ex-chancelier Adenauer, traditionnellement transatlantique, a accepté de sacrifier les garde-fous de la politique budgétaire allemande pour rééquiper la Bundeswehr et aider Kiev. Ainsi, le frein à la dette (Schuldenbremse) qui limite à 0,35 % du PIB les nouveaux emprunts fédéraux, sera supprimé dès lors que ces frais de défense excéderont 1 % de la richesse nationale. Concrètement, près de 40 milliards d’euros pourront être librement empruntés chaque année afin de se rapprocher des nouveaux objectifs militaires fixés par l’OTAN (3 % du PIB).
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Les gagnants du compromis
Si ce premier volet du projet a rapidement fait l’objet d’un compromis, les Verts avaient en revanche apposé leur véto à l’utilisation du Fonds spécial de 500 milliards. Ces derniers craignaient que le SPD et la CDU piochent dans cette enveloppe pour financer des cadeaux électoraux, tels qu’une baisse de la TVA sur la restauration (7 %), ou des subventions anti-écolo pour les agriculteurs. Outre le fait de faire voter l’Assemblée sortante au mépris du résultat des élections du 23 février - seule condition pour réunir le quorum des deux tiers - Friedrich Merz a dû offrir des garanties aux Verts, ceux-là mêmes qu’il n’avait cessé de critiquer durant sa campagne électorale. Ainsi, les 500 milliards ne pourront concerner que des dépenses « additionnelles » en faveur des infrastructures, dont 100 milliards spécialement affectés à la défense de l’environnement.
Enfin, les Verts ont obtenu d’être associés à une future réforme « structurelle » du frein à la dette, qu’ils craignaient de voir sacrifier à l’urgence. Vendredi après-midi, les écologistes passaient pour les principaux gagnants du compromis alors même que le parti n’est pas associé aux négociations gouvernementales.