Bon et pas cher, le maquereau est un habitué des étals de poissonniers. Comme la sardine et le hareng, il fait partie de ces (relativement) petits poissons pélagiques, vivant non loin de la surface, qui sont présents en assez grandes quantités et se renouvellent vite. Autrefois considéré comme durable et très populaire en France, en Allemagne ou au Royaume-Uni, il voit pourtant aujourd’hui ses stocks s’effondrer. De là à être menacé de disparition?
Cette semaine, la Marine Conservation Society (MCS) sonne l’alerte dans son « Good Fish Guide », un guide utilisé par les entreprises britanniques pour s’assurer qu’elles vendent des produits de la mer durables : les populations de maquereaux chutent dangereusement. « On les trouve dans l’Atlantique Nord, la Méditerranée et la mer Noire, détaille Alice Moore, responsable du guide. La plupart des maquereaux de l’Atlantique (environ 79 %) sont pêchés au chalut pélagique [qui ne racle pas le fond, ndlr]. Les autres captures sont réalisées à l’aide de sennes coulissantes [filets qui encerclent le poisson, ndlr], et une très faible proportion est pêchée à la ligne. »
« Effondrement »
« La grande majorité se trouve donc en Atlantique et on considère qu’il y a une seule population de maquereaux qui va du Portugal jusqu’à l’Islande », note Youen Vermard, chercheur à l’Ifremer. L’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer évalue chaque année l’évolution des populations de poissons pêchés en France. Et cela fait plusieurs années qu’il met aussi en garde sur la situation du maquereau. Fin 2024, le Marine Stewardship Council (MSC), organisme délivrant un label de pêche durable, avançait également des chiffres inquiétants : « Le stock de maquereau est passé de 7,26 millions de tonnes en 2015 à 2,8 millions de tonnes aujourd’hui, et se rapproche du seuil critique » au-dessous duquel il est considéré comme effondré.
Le problème, explique les experts, c’est la surpêche, sur toute l’aire de répartition des poissons. Cela fait des années que les quantités prises (de l’ordre du million de tonnes par an) vont trop loin, les pays qui en pêchent le plus étant le Royaume-Uni, la Norvège, les îles Féroé, l’Islande ou encore la Russie. Selon le Conseil International pour l’Exploration de la Mer (CIEM), les captures de maquereau ont dépassé les limites recommandées par les scientifiques de 35 % en 2023.
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« La très large répartition du maquereau pose des problèmes de gestion assez complexe, car l’Europe, le Groenland, les îles Féroé, l’Islande, la Norvège, le Royaume-Uni doivent se mettre d’accord sur le volume à prélever tous les ans, explique Youen Vermard. Or ces dernières années, du fait notamment du réchauffement climatique, le maquereau a eu tendance à migrer vers des zones plus au nord. Ce changement fait que les États ont de plus en plus de mal à se mettre d’accord sur le volume à extraire. Cela fait donc plusieurs années que les volumes prélevés sont supérieurs aux préconisations scientifiques. » Le merlan bleu est d’ailleurs dans la même situation.
Pour Alice Moore, les données scientifiques sont claires : « Le danger est réel si aucune mesure n’est prise rapidement. » Faut-il pour autant craindre la disparition des maquereaux ? « Non », assure Youen Vermard, en tout cas pas encore : « On ne parle pas d’extinction mais de niveaux de biomasse trop faibles par rapport à une population saine, qui se reproduit et que l’on peut exploiter de manière durable, poursuit-il. En tout cas, ce qui va finir par se passer, c’est que les professionnels vont avoir de plus en plus de mal à en trouver. » Dans son bilan 2024, l’Ifremer rappelle qu’un poisson sur cinq débarqués en France est issu de stocks surpêchés.