Ce jeudi, le Parlement a définitivement voté la proposition de loi interdisant ces cigarettes électroniques jetables, à usage unique. Ce texte «vise à protéger la santé des plus jeunes», «à mettre un terme à la production irresponsable de déchets fortement polluants» et condamne «la détention en vue de la vente, de la distribution ou de l’offre à titre gratuit, la mise en vente, la vente, la distribution ou l’offre à titre gratuit».
Packagings flashy, goûts marshmallow, pastèque et autres fruits du dragon... Les «puffs» visent principalement les jeunes consommateurs et cela, bien qu’elles soient souvent chargées en nicotine. Une stratégie marketing qui fonctionne pour le sénateur (LR) Khalifé Khalifé selon qui «l’expérimentation de la puff progresse également chez les adolescents : 15% des 13-16 ans en ont déjà consommé et, parmi eux, 47% déclarent avoir commencé leur initiation à la nicotine par ce biais», comme le rapportait Le Figaro , le 13 février.
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«Ça devenait n’importe quoi»
Si cette proposition de loi sonnait comme une évidence dans l’hémicycle (votée à l’unanimité par les députés), chez les jeunes, qui sont les principaux concernés, les réactions sont plus éparses. «C’est une bonne chose pour les collégiens», pense Clément, élève en terminal pour qui il était devenu trop banal de croiser des «ptit’s» avec une cigarette électronique jetable. Pour Salomé, 13 ans, ceux de son âge qui fument des «puffs» trouvent ça «stylé», tandis qu’elle considère que «c’est mauvais pour santé et que ça mène vers la cigarette». Ses propos résonnent avec ceux de l’Académie nationale de médecine qui dans un communiqué datant de février 2023, présentait l’objet comme «un piège particulièrement sournois pour les enfants et les adolescents.»
«Ça devenait n’importe quoi, ils ont sorti des modèles à ’’100k’’ [e-cigarettes fonctionnant jusqu’à cent mille bouffées, NDLR] et il y avait toujours plus de nicotines dedans», explique Emma, 16 ans, pour qui le phénomène est devenu incontrôlable. Néanmoins, elle se demande si les «puffs permettaient de ne pas passer à la cigarette trop vite ?». Une idée contredite par les chiffres présentés par les députés, mais partagée par beaucoup d’autres lycéens. «Quand je suis arrivé en seconde, nous étions 70% à fumer des cigarettes, aujourd’hui, je pense qu’il n’y a que 30% des secondes qui fument et c’est en partie grâce à la puff», estime dans ce sens Maxime, 18 ans. «C’est plus accessible que les cigarettes, ça coûte moins cher et c’est moins dangereux», précise Lola, une élève de première qui vapote régulièrement.
Si certains jeunes doutent encore de la véritable nocivité de ces cigarettes électroniques jetables sur leur santé, elle constitue pour eux un problème pour l’environnement. «C’est nul pour la planète», «ça pollue», «on ne sait pas comment c’est fabriqué et c’est même pas recyclé»... Des arguments qui reviennent systématiquement dans les témoignages d’adolescents interrogés par le Figaro. Cette rhétorique fait aussi partie du discours d’élus comme la députée écologiste Francesca Pasquini qui expliquait au Figaro que «les milliers de puffs jetées chaque jour dans la nature sont constituées de plastique et d’une batterie en lithium, ce qui est une aberration pour la biodiversité et la préservation des ressources rares».
Une mesure efficace ?
«Cette loi ne va servir à rien», tacle pourtant Augustin, persuadé que l’interdiction n’aura aucune influence sur la consommation des jeunes. «Les épiceries continueront à en vendre et sinon, on en trouvera encore sur les réseaux sociaux», explique le lycéen de 17 ans. Il semblerait effectivement que les adolescents puissent se procurer des «puffs» en contactant des vendeurs sur TikTok ou sur Snapchat. Emma ajoute que «parfois, ce sont eux qui nous contactent, c’est comme des dealers». Des circuits de ventes parallèles existant déjà, c’est logiquement que les jeunes s’interrogent sur l’efficacité d’une interdiction inscrite dans la loi. En novembre 2023, un rapport sur la proposition de loi expliquait que «la commercialisation des “puffs” est promue en ligne par le biais de publications ludiques et de partenariats camouflés sur les réseaux sociaux Instagram et TikTok qu’utilisent massivement les adolescents».
Pour tous ces jeunes, la solution se trouverait plutôt dans la prévention et l’accompagnement. Certains ont des idées plus concrètes comme Augustin qui propose que «la vente continue d’être autorisé mais que les produits soit plus sobres et plus chers, comme les paquets de cigarettes». Depuis le 1er janvier 2017, les produits de tabac sont distribués avec un emballage neutre et standardisé. En mars 2023, un dossier de la rédaction de vie-publique.fr indiquait notamment que l’usage quotidien du tabac concernait 15,6% des jeunes en 2022 contre 25,1% en 2017 (-9,5%).