Qu’est-ce que la «retraite à points» plébiscitée par la CFDT ?

Un système «profondément juste». C’est en ces termes que la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon a récemment plaidé pour relancer le débat sur la retraite à points, dans un contexte où il serait question de suspendre la réforme mise en place le 1er septembre 2023. Mesure qui «vaut le coup» d’un point de vue démocratique, selon elle. Envisagé par plusieurs gouvernements, le projet d’instaurer ce système «universel» à points, en remplaçant les 42 régimes existants, avait été engagé en 2019, puis mis en pause au moment de la crise sanitaire, et n’avait finalement jamais vu le jour.

Souvent jugée plus équitable, la retraite à points est aujourd’hui à nouveau plébiscitée par la syndicaliste, qui rappelle que ce système «permet notamment aux poly pensionnés, ceux qui font des allers-retours entre le public et le privé, d’avoir une équité de traitement». Pour d’autres pourtant, elle est jugée trop «incertaine» dans la mesure où elle dépend, in fine, de la valeur dite «de service» à laquelle les points acquis seraient convertis en pension. Celle-ci fixant la conversion de ces fameux points en euros sonnants et trébuchants.

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Le point, au cœur du système

Au cœur de ce système, les points ont en effet toute leur importance. En 2019 justement, le rapport Delevoye - du nom de celui qui était à l’époque haut-commissaire à la réforme des retraites auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn - préconisait la création d’un système universel de retraite à points, visant à remplacer les multiples régimes existants par un régime unique, «plus simple et plus juste».

Pour cela, la valeur du point serait la même pour tous les Français, quelle que soit la profession ou le statut (salarié, indépendant, fonctionnaire...). Concrètement, le rapport Delevoye proposait d’accorder un point de retraite pour 10 euros de cotisation. Il préconisait par ailleurs une rentabilité à 5,5% : autrement dit, 10 euros cotisés auraient alors permis de dégager 0,55 euro de retraite. Sachant que le nombre de points acquis dépend du montant cotisé et de la valeur d’achat du point, fixée chaque année.

Avec un tel «système universel», ce ne serait donc plus la durée de cotisation, ni le salaire de référence, mais bien le nombre de points - accumulés au cours de la carrière dans un «compte retraite» individuel - qui servirait de base pour calculer la pension. Avec un mode de calcul plus avantageux pour les personnes qui connaissent des carrières plus difficiles avec des périodes de travail courtes ou hachées. En somme, plus le nombre de points serait élevé, plus la pension de retraite le serait à son tour.

Insécurité autour de la valeur du point

Mais se pose alors la question centrale de la valorisation du nombre de points accumulés le temps d’une carrière. Ce système à points dépend en effet fortement de paramètres qui peuvent changer, créant ainsi une certaine forme d’insécurité pour les futurs retraités. Pour éviter tout risque, le rapport Delevoye prévoyait une règle d’or, précisant que la valeur du point ne pourrait en aucun cas baisser.

En outre, si les pensions de retraite sont aujourd’hui indexées sur l’inflation, le rapport Delevoye proposait plutôt qu’elles le soient sur le revenu moyen par personne, censé augmenter plus vite que l’inflation. La revalorisation des points selon les salaires moyens serait «plus favorable qu’aujourd’hui» et permettrait «à tous de bénéficier des progrès collectifs», note le rapport.

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Et de préciser : «même si, une année donnée, les revenus individuels stagnent voire baissent, les droits acquis, eux, continueront à progresser comme le revenu moyen de l’ensemble des actifs». De quoi augmenter le pouvoir d’achat des retraités par rapport au reste de la population.

Quid de l’âge de départ à la retraite ?

Pour Marylise Léon, la retraite à points est «un système où il n’y a pas besoin d’âge légal» car «on prévoit des âges de possibilité de départ à la retraite et les personnes choisissent». Ces dernières auraient ainsi «la main sur l’âge auquel elles veulent partir et sur le montant de la pension dont elles veulent bénéficier». Un point de vue qui n’est pas partagé par tous. Certains pointent en effet que cette technique de calcul n’a aucun rapport avec l’âge légal de départ à la retraite. Et que maintenir un âge minimum serait tout bonnement indispensable «pour éviter que les gens ne partent trop tôt à la retraite et que cela ne pèse trop lourdement sur les finances publiques».

D’ailleurs, le rapport Delevoye prévoyait un âge dit «d’équilibre», leur permettant de partir dès 62 ans. Au cas où ils décideraient de partir avant, leur pension subirait un malus, et après d’un bonus. À noter qu’il reviendrait aux partenaires sociaux de «fixer l’évolution de l’âge d’équilibre, ainsi que le montant du malus et du bonus». Le dispositif «carrières longues» serait maintenu pour permettre à ceux qui ont validé 5 trimestres avant 20 ans, de partir deux ans plus tôt.

Pour l’instant délaissé, ce système apparaît en outre «techniquement compliqué» à mettre en place, tant parce qu’il demeure des inconnues sur la façon dont le système à points pourrait évoluer dans le temps, surtout avec une population vieillissante. Mais aussi parce que passer d’un système à un autre pourrait impliquer d’importants coûts financiers.