BioMérieux encaisse les premiers effets des droits de douane
Le champion français des tests médicaux commence à sentir les premiers effets de la guerre commerciale initiée par Donald Trump. Depuis avril, bioMérieux subit, à l’instar des autres acteurs commercialisant des dispositifs médicaux, 20% de droits de douane sur tous ses produits exportés aux États-Unis. Un taux ramené à 15% depuis le 7 août.
Le groupe français réalise 47% de son chiffre d’affaires de 3,9 milliards d’euros aux États-Unis. Malgré l’importance du marché américain pour bioMérieux, cet impact reste pour l’instant modéré. Le spécialiste du diagnostic estime que la guerre commerciale amputera ses profits de 5 à 10 millions d’euros sur l’ensemble de l’année, un fardeau «très gérable», estime Pierre Boulud, le directeur général.
Passer la publicitéLe groupe fabrique aux États-Unis 85% des produits qu’il y vend. «Mais nous en importons les 15% restants. Nos usines américaines importent également de l’étranger des matières premières comme de l’aluminium ou de l’acier, explique Pierre Boulud, le directeur général de bioMérieux. Par ailleurs, en réaction aux droits de douane américains, la Chine a elle aussi instauré des droits de douane de 10%. Ils nous impactent car une partie de nos produits vendus en Chine sont fabriqués aux États-Unis».
Épidémies hivernales
Malgré ces obstacles, bioMérieux a revu à la hausse ses prévisions de marges pour 2025, à 12% au minimum contre 10% précédemment. Le laboratoire cueille les fruits des efforts de gestion des coûts qu’il a impulsés dans le cadre de son plan stratégique GO28, et de la forte croissance de ses ventes (+9,4% au premier semestre).
Les médecins se sont en effet habitués à faire tester leurs patients pendant la pandémie de Covid. Ils ont conservé ce réflexe, et prescrivent de plus en plus les panels proposés par bioMérieux, leader dans le domaine des pathologies respiratoires avec 75% de parts de marché.
Plutôt que de cibler une seule maladie, le laboratoire propose de tester 22 pathogènes, de la grippe au virus MERS du Moyen-Orient, en 45 minutes. «Ces tests ne sont pas destinés à tous les patients, explique Pierre Boulud. Mais ils sont très appréciés à l’hôpital, dans les situations d’urgence, pour identifier le plus rapidement possible un pathogène chez un nouveau-né, une personne âgée ou un patient immunodéprimé». Au premier semestre, les ventes de ces tests ont progressé de 12% grâce à la virulence des épidémies hivernales en ce début d’année.
Les panels non respiratoires, qui ciblent plutôt les virus et bactéries intestinales, sont un marché moins mature, en croissance de plus de 10% au premier semestre. À eux deux, ces panels représentent 40% des ventes du groupe. Le reste provient pour l’essentiel de tests microbiologiques, qui visent à identifier l’antibiotique indiqué pour le traitement d’un pathogène donné. Dans ce domaine, bioMérieux se partage l’essentiel du marché avec l’Américain Becton Dickinson.
Passer la publicitéTests dans les cabinets médicaux
Le groupe français mise par ailleurs beaucoup sur les tests décentralisés, réalisés à même le cabinet médical du médecin, ou dans les services d’urgence. Au premier semestre, ils ne pesaient encore que 79 millions d’euros de chiffre d’affaires. Mais ce service lancé en juillet 2023 est en très forte croissance (+143%) et bioMérieux compte bien doubler ses ventes de 2024 cette année. Il reste impossible, pour des raisons réglementaires, de réaliser ces tests dans les cabinets médicaux français, mais les médecins américains, eux, s’équipent. bioMérieux évalue le marché des tests hors laboratoire à 4 milliards d’euros, et compte à terme s’en arroger 10%. Il vient d’ailleurs de compléter son offre grâce à l’acquisition d’une société norvégienne, qui propose de détecter l’infarctus du myocarde en dix minutes.
Si la société continue de croître à un rythme soutenu, sa progression a néanmoins ralenti au deuxième trimestre. Et le groupe a révisé à la baisse ses prévisions de hausse des ventes pour 2025, à une fourchette comprise entre 6% et 7%, contre plus de 7% précédemment. Il pâtit du fort ralentissement de ses ventes en Chine, qui pèse pour 6% des ventes. «Dans ce pays, nous subissons les économies réalisées par l’État chinois. Des mesures de contrôle des coûts ont été prises, qui affectent le volume des tests vendus comme leur prix. Tout le marché en souffre», souligne Pierre Boulud. Le directeur ne s’attend pas à ce que ce climat s’améliore d’ici la fin de l’année.