Neil Young défie les éléments au Festival de Montreux
Fondé en 1967, alors que Neil Young faisait encore partie du groupe pionnier du folk rock américain Buffalo Springfield, le festival de Montreux a déjà accueilli le musicien natif du Canada à deux reprises, en 2001 (avec Crazy Horse) et en 2016 (avec Promise of the Real). Les deux concerts avaient eu lieu au sein de l’auditorium Stravinsky. Cette nouvelle édition du festival est la deuxième et dernière à offrir une nouvelle scène en plein air, La scène du Lac, le Centre de Congrès et d’expositions - épicentre de la manifestation suisse - étant en travaux de rénovation.
C’est accueilli par la pluie que Neil Young, accompagné cette fois d’une nouvelle formation, The Chrome Hearts, est monté sur scène devant une foule compacte de 5 000 personnes, neuf ans après sa dernière venue en Europe continentale. Chemise à carreaux, casquette, il a ouvert par un titre assez rare, Ambulance Blues, tiré de l’album On the Beach (1974).
Passer la publicitéBest-of
En près de soixante ans de carrière, Neil Young s’est continuellement distingué par sa capacité à ne faire que ce que bon lui semble. Alors qu’il vient de sortir un nouvel album, Talkin to the Trees , son meilleur depuis une dizaine d’années, il n’en joue pas un seul extrait pendant cette tournée européenne. La setlist se concentre sur un best-of, exercice qu’il goûte généralement assez peu, avec un accent particulier sur la période qui va de 1969 à 1979, son premier « âge d’or ».
Entouré d’un groupe composite formé par des membres de Promise of the Real ( les trentenaires Corey McCormick, Anthont Legarfo et Micah Nelson, fils de Willie Nelson) et de l’octogénaire Spooner Oldham, légende des studios, présent aux côtés d’Aretha Franklin dans les années 1960. Puissant et compact, le son de la formation permet à Neil Young de revisiter les plus belles pages de son répertoire électrique. De Cinnamon Girl et Cowgirl in the Sand à Hey Hey, My My, en passant par Like a Hurricane et Love and Only Love, ce sont les tours de force de son association avec Crazy Horse qui se taillent la part du lion. Et prouvent qu’à 79 ans, le maître n’a rien perdu de sa singularité vocale ni de son jeu de guitare bruitiste. « Les gens de mon âge ne font pas ce que je fais », chantait-il il y a trente ans, et c’est plus que jamais véridique.
Respiration bienvenue au sein d’un set très rock, le passage acoustique inclut les standards de Harvest The Needle and the Damage Down et Old Man, mais aussi Harvest Moon et la rarissime Daddy Went Walkin’, tendre évocation de son père, le journaliste Scott Young. S’il ne prend guère la parole sinon pour saluer et remercier chaleureusement le public, cet opposant farouche à la politique de Donald Trump - il a été naturalisé américain en 2020 - a veillé à inclure des chansons assez politiques dans son set. Notamment les deux hymnes écologiques Be the Rain et Sun Green, tirés de son album concept de 2003, Greendale, l’anti raciste Southern Man, mais aussi les pacifistes Name of Love, très rarement jouée, et l’abrasive Throw Your Hatred Down de 1995. En rappel, une version très énergique de Rockin’in the Free World, écrite pour dénoncer la politique de George Bush en 1989, est toujours d’actualité pour dénoncer les exactions de son lointain successeur, l’actuel locataire de la Maison Blanche.