"Si l'usine ferme, on devra quitter la région" : en Isère, les fermetures d'usines menacent toute l'économie locale
L'Isère est un département qui illustre à la fois les difficultés et les ressources de la France de 2024. Une France où les plans sociaux se multiplient depuis plusieurs mois à une vitesse inquiétante, notamment dans l'industrie. Si c'est aussi le cas en Isère, parallèlement, 30 000 emplois en trois ans ont été créés dans le département, qui profite d'un taux de chômage inférieur à la moyenne nationale. Mais ce chiffre pourrait bientôt augmenter, alors que la Banque de France se montre pessimiste côté emploi et table sur une hausse du taux de chômage en 2025. Ce dernier devrait atteindre les 8% contre les 7,3% de 2024.
À Pont-de-Claix, près de Grenoble, l'entreprise Vencorex, qui fabrique notamment des substances utilisées pour la peinture automobile, vient d'être placée en redressement judiciaire. Plus de 400 emplois sont directement menacés, et jusqu'à 6000 au total à long terme. Une catastrophe pour les acteurs locaux, tout à fait symbolique du décrochage économique actuel.
Une usine, c'est en effet, aussi, des sous-traitants. Jean Saraiva, patron de Smeg, une entreprise du bâtiment, sous-traitant de Vencorex et d'Arkéma - autre entreprise du secteur également menacée par ricochet - s'inquiète des répercussions sur son entreprise. "Au bout de 17 ans d'existence, on fait du porte-à-porte pour essayer de trouver d'autres clients, du particulier" confie Jean Seraiva, mardi 17 décembre, après des mauvaises nouvelles en cascade qui ont mis l'entreprise en grande difficulté. "On a perdu pas mal de chiffre d’affaires du fait de la mise en redressement de Vencorex, qui, avec Arkéma, est en grève actuellement", explique le patron de Smeg, qui ne cache pas son anxiété par rapport à la situation.
"On essaie de se dépatouiller, de trouver du travail à droite à gauche, mais le contexte actuel n'est pas évident parce que tout le monde a un peu peur. Même le particulier lambda aujourd'hui a peur d'investir".
Jean Seraivafranceinfo
Une situation de blocage qui a un impact sur tout le tissu économique local, jusqu'au restaurateur du coin, Richard Garcia, surnommé "Richy", qui accueille chaque jour les salariés de Vencorex à 300 mètres de l'usine : "ça va être 20% de la clientèle qu'on n'aura plus. Ça fait du mal à tous les commerces qui sont aux alentours", confie Richy. Jean Seraiva pourra le confirmer, cette fermeture d'usine serait une catastrophe à plusieurs niveaux : d'un point de vue personnel, "ça impacte beaucoup ma vie et celle de mes salariés, Aujourd'hui si l'usine vient à fermer, il faudra qu'on quitte la région".
De l'espoir, il faut en garder poursuit le patron, qui a déjà dû se séparer de huit intérimaires et craint désormais de devoir se séparer de ses salariés. "On essaie d'être solidaires à notre manière, mais c'est sûr que c'est compliqué. Nous allons subir, mais eux ? Qu'est-ce qu'ils vont devenir ?" s'interroge enfin Richy, qui soutient, avec Jean Seraiva, la grève des salariés.