«Grave et potentiellement très dangereux» : entretien «houleux» entre la première ministre danoise et Donald Trump, qui veut racheter le Groenland
«Avant, c’était difficile de prendre (ses menaces) au sérieux. Mais je pense qu’il l’est, ce qui est potentiellement très dangereux». Il est parfois difficile de savoir si Donald Trump plaisante ou s’il a vraiment l’intention de porter ses menaces à exécution. Depuis quelques semaines, il déclare à qui veut bien l’entendre qu’il souhaite prendre le contrôle du canal de Panama, du Canada, mais aussi du Groenland, réitérant un projet déjà évoqué au cours de son premier mandat.
La semaine dernière, avant son investiture, le milliardaire s’est entretenu pendant près de trois quarts d’heure au téléphone avec la première ministre danoise Mette Frederiksen. Selon cinq hauts responsables européens (actuels et anciens) cités sous couvert d’anonymat par le Financial Times , le 47e président américain a affirmé son sérieux quant à son projet d’achat du Groenland.
Bien que la Maison Blanche n’ait pas commenté l’entretien, Mette Frederiksen a attesté avoir rappelé au tonitruant milliardaire que la vaste île arctique, partie autonome du royaume du Danemark peuplée de 57.000 habitants, n’était pas à vendre. Les hauts responsables européens cités par le quotidien économique britannique ont rapporté que la conversation s’était très mal passée, et ont même qualifié l’appel d’«houleux». Après que la première ministre danoise lui a signifié que l’île n’était pas à vendre, Donald Trump se serait montré «agressif et conflictuel» et ce, malgré l’offre de Mette Frederiksen d’une plus grande coopération sur les bases militaires et l’exploitation minière du Groenland.
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«Douche froide»
«C’était horrible», a déclaré l’un des responsables. «Il a été très ferme. C’était une douche froide», a rapporté un autre. «Avant, c’était difficile de prendre (ses menaces) au sérieux. Mais je pense qu’il l’est, ce qui est potentiellement très dangereux». Une personne informée de l’appel décrit : «L’intention était très claire. Ils (les Américains, NDLR) le veulent. Les Danois sont maintenant en mode crise», tandis qu’une dernière estime que «les Danois sont complètement paniqués par cette situation». Selon un ancien responsable danois, Donald Trump a même menacé de «prendre des mesures spécifiques contre le Danemark, telles que des tarifs douaniers ciblés». Contacté par le Financial Times, le bureau de la première ministre danoise a déclaré qu’il ne «reconnaissait pas l’interprétation de la conversation», donnée par ces sources anonymes.
De nombreux responsables européens espéraient que les propos de Donald Trump sur sa volonté de contrôler le Groenland pour des raisons de «sécurité nationale» étaient un stratagème pour gagner en influence sur le territoire de l’OTAN. Mais cet appel a anéanti leurs espoirs, et ils craignent désormais que cet échange aggrave la crise de politique étrangère entre les alliés de l’OTAN.
«Protection du monde libre»
«Le président Trump a clairement indiqué que la sécurité du Groenland était importante pour les États-Unis, alors que la Chine et la Russie réalisent des investissements importants dans toute la région arctique», a déclaré un porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, cité par le Financial Times. «Le président s’engage non seulement à protéger les intérêts américains dans l’Arctique, mais également à travailler avec le Groenland pour assurer la prospérité mutuelle des deux nations».
Début janvier, Donald Trump a menacé d’imposer des droits de douane au Danemark s’il s’opposait à ses projets pour le Groenland. Le milliardaire a également refusé d’exclure la possibilité d’utiliser la force militaire pour prendre le contrôle de l’île.
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«Les gens ne savent même pas si le Danemark a légalement le droit d’y avoir accès, mais s’ils le savent, ils devraient y renoncer car nous en avons besoin pour la sécurité nationale», avait affirmé le 47e président des États-Unis lors d’une conférence de presse, quelques jours avant son entrée en fonction. «Je parle de la protection du monde libre», avait-il ajouté. «Il y a des navires chinois partout. Il y a des navires russes partout. Nous ne laisserons pas cela se produire».