Climat : le plan de la France pour s’adapter à un réchauffement de + 4 °C enfin présenté
Attendue depuis deux ans et régulièrement repoussée au gré des aléas politiques, une troisième version du Plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc-3) a été enfin présentée, ce lundi 10 mars, par la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher.
D’autant qu’il y a urgence : Il y a moins d’un an, le Haut Conseil pour le climat exhortait d’ailleurs le gouvernement à un « changement d’échelle dans l’adaptation » à ces phénomènes désormais inexorables, tandis que la Cour des comptes insistait sur l’urgence de « prendre conscience » de l’ampleur du chantier et du « mur d’investissements » qu’il représentait.
Accent mis sur les territoires les plus menacés
Concrètement, ce plan compte 52 mesures destinées à protéger davantage les populations, mieux anticiper les risques, assurer la résilience des territoires et adapter les activités humaines face à des conditions climatiques extrêmes. Il s’appuie sur la perspective d’un réchauffement de + 4 °C en France d’ici à la fin du siècle, alors que les précédents plans étaient basés sur une hypothèse de + 1,5 °C à + 2 °C d’ici à 2100.
L’accent est particulièrement mis sur les territoires et secteurs les plus menacés comme les littoraux, les montagnes, les forêts et l’agriculture. Parmi les mesures figurent le renforcement des protections pour les travailleurs exposés aux canicules, différentes études pour mieux adapter transports et exploitations agricoles, des feuilles de route pour adapter chaque secteur économique, une évolution des règles de rénovation des logements ou encore une protection des principaux sites culturels français (tour Eiffel, Mont-Saint-Michel…).
Une réflexion va également être engagée dans le but de donner une « valeur juridique » à la trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (Tracc), un document pour les acteurs publics.
Mais, sur le plan du financement, le compte n’y est pas. La ministre annonce avoir réservé environ 600 millions d’euros à l’adaptation aux changements climatiques. La moitié proviendrait du fonds Barnier, 30 millions du programme pour la prévention du retrait-gonflement d’argile, et 260 millions seraient issus du Fonds vert ciblé vers les collectivités locales. Deux milliards d’euros, sur cinq ans, émanant du budget des agences de l’eau, devraient venir s’y ajouter, « dont près de 40 % pour des interventions de solutions fondées sur la nature », indique le gouvernement.
Pour un certain nombre d’experts du climat, ces moyens sont d’ores et déjà jugés insuffisants. La ministre a d’ailleurs reconnu que « le coût des sinistres climatiques pourrait doubler au cours des trente prochaines années, atteignant 143 milliards d’euros cumulés sur la période 2020-2050 ». Selon Agnès Pannier-Runacher, la France pourrait perdre jusqu’à 10 % de son PIB d’ici à 2075 si la température mondiale augmentait ne serait-ce que de 2 °C.
« Il faut mettre beaucoup plus d’argent que ce qui est prévu, il faudrait un mur d’investissement, c’est de la protection pour l’ensemble de notre modèle social et économique », a réagi le vice-président de France Nature Environnement (FNE), Nicolas Richard. Pour ce dernier, le Pnacc-3 comporte « un certain nombre de bonnes intentions » et « montre la bonne direction », mais manque d’ « une tête et des jambes » puisqu’on ne sait pas bien si les mesures qu’il contient « sont financées et comment elles sont pilotées ».
« Une première étape »
Quoi qu’il en soit, la mise en œuvre du Pnacc-3 « est indispensable, car les investissements nécessaires pour que le pays soit adapté à 2050 doivent parfois être lancés dès demain », insistait Nicolas Richard, la veille de la présentation du plan, même s’il faut, selon lui, aller beaucoup plus loin en définissant « les défis et les besoins commune par commune » en associant les habitants.
« Faut-il renaturer ou construire une digue sur le littoral ? Faut-il abandonner ou se protéger ? Ce sont des décisions importantes, qui obligent aussi à réfléchir à une forme de démocratie participative », a-t-il précisé. De l’avis de Guillaume Dolques, expert adaptation chez I4CE, institut de recherches spécialisé dans l’économie du climat, interrogé par l’AFP, ce plan « n’est qu’une première étape » et n’aura « de sens que si certains arbitrages sont faits et que l’on se donne les moyens des ambitions ».
Malheureusement, il ne semble pas, malgré les effets d’annonce, que ce type de démarches soient dans les projets gouvernementaux. Le vote de la loi de finances pour l’année 2025, en février, en donne une triste illustration. Le volet écologie du budget de la nation a, à cette occasion, été amputé de plus de 2 milliards d’euros par rapport à 2024, impactant notamment le Fonds vert, destiné à soutenir les collectivités locales.
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