Budget : le gouverneur de la Banque de France appelle à «arrêter de jouer au chamboule-tout avec les pistes d'économies»

C’est un message franc, envoyé aux décideurs politiques. À la veille de la présentation d’un projet de loi de finances particulièrement attendu, le gouverneur de la Banque de France a appelé chacun à la raison et à accepter des efforts partagés, afin que la France puisse enfin retrouver la maîtrise de ses comptes publics. Une situation urgente, alors que le pays est «dans la situation d’une famille qui vit au-dessus de ses moyens» depuis trop longtemps.

«Il fallait absolument inverser la tendance qui affaiblit la France», dans laquelle toujours plus de déficit mène à toujours plus de dette et d’intérêts à payer. «Le projet de budget va dans la bonne direction», en diminuant les dépenses de quelque quarante milliards d’euros, a noté François Villeroy de Galhau. La marche à franchir sera difficile, mais nécessaire : «la France a le même modèle social, de services publics que nos voisins, mais cela nous coûte beaucoup plus cher, 260 milliards d’euros de plus que nos voisins. Il y a donc un écart d’efficacité qu’il faut traiter», a relevé le gouverneur.

La solidarité entre les acteurs - État, collectivités locales, entreprises - sera le maître mot pour relever ce défi colossal, a-t-il ensuite prévenu. «Chacun a tendance à avoir des idées d’économies chez les autres et à les refuser chez lui. Il faut que chacun arrête de jouer au chamboule-tout avec toutes les pistes d’économies sur la table», sans quoi le pays fera «zéro économie» et la dette continuera sa folle envolée. «Pour que l’effort soit juste, soit efficace, il faut qu’il soit partagé» entre les parties prenantes, a jugé François Villeroy de Galhau. «Ce n’est pas facile, mais c’est nécessaire et possible. [...] Il est temps que nous nous reprenions collectivement. Nous ne sommes pas plus bêtes que nos voisins européens», qui y sont parvenus, a insisté le gouverneur de la Banque de France.

Vers une baisse des taux l’an prochain

Le représentant a par ailleurs tablé sur une nouvelle baisse des taux d’intérêt, la semaine prochaine. «Très probable», cette décision sera prise par le conseil des gouverneurs et devrait «aider l’économie», par exemple en limitant le coût des emprunts immobiliers. Il ne s’agira pas de la dernière, a ajouté François Villeroy de Galhau, soulignant que les prochaines baisses dépendront «de la suite du combat contre l’inflation». Sur ce point, «la victoire [...] est en vue», s’est félicité le haut fonctionnaire, pour qui le taux devrait repasser «durablement» sous les 2% en France, dès l’année prochaine. La Banque de France ne modifie par ailleurs pas sa prévision de croissance, gardée à 1,1% pour cette année. «C’est aussi cohérent avec la prévision qui sous-tend le budget pour l’an prochain», a relevé le gouverneur.

La prise de parole de François Villeroy de Galhau intervient alors que les collectivités locales ont rejeté avec véhémence les pistes de dépenses du gouvernement. «Les grandes lignes présentées sont lourdes. C'est une ponction sans précédent sur une seule année. Nous n'acceptons aucune des mesures proposées», s’est ainsi insurgé le maire (PS) d’Issoudun, vice-président délégué de l'Association des maires de France (AMF), mardi. Le bras-de-fer ne fait que commencer.