Mort de François : qu’est-ce que l’anneau du pêcheur, que portent tous les papes ?

Le pape François refusait qu’on embrasse son anneau en signe de dévotion. D’ailleurs, il ne le portait qu’occasionnellement. L’anneau du pêcheur, aussi appelé anneau piscatorial, est pourtant l’un des principaux attributs détenus par le souverain pontife. D’or traditionnellement, mais d’argent pour François, il le désigne comme successeur de l’apôtre Pierre, et représente le signe de la communion de l’Église, dont le pape est d’ailleurs le garant.

Cette tradition trouve ses origines au XIIIe siècle. À chaque nouvelle élection de pape par le collège cardinalice, le nouveau dirigeant du Saint-Siège se voit remettre cet anneau spécifique, différent de celui qu’il reçoit lors de l’ordination épiscopale. L’anneau du pêcheur est le symbole de la charge qu’il accepte d’endosser. Cet ornement unique lui est remis au cours de la messe marquant le début solennel de son ministère pétrinien, en même temps notamment que le pallium, cet ornement liturgique catholique fait d’une bande de laine blanche que le pape peut porter sur ses épaules en toute occasion.

«Ce sont des hommes que tu prendras»

Cet anneau doit son nom à l’appel à devenir des «pêcheurs d’hommes» lancé par le Christ au premier des apôtres, Simon Pierre, qui péchait sur les bords du lac de Tibériade : «Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras» (Lc 5, 1-11). Une mission encore mise en lumière par le prédécesseur de François, Benoît XVI, lors de la messe inaugurale de son pontificat en 2005. «Aujourd’hui encore, l’Église et les successeurs des Apôtres sont invités à prendre le large sur l’océan de l’histoire et à jeter les filets, pour conquérir les hommes au Christ — à Dieu, au Christ, à la vraie vie».

Traditionnellement, la partie supérieure de l’anneau (appelée chaton) représente l’apôtre Pierre, premier des 266 membres de la dynastie papale. L’anneau que porte le pape François à l’annulaire de la main droite — le même modèle que celui que portait le pape Paul VI — représente par exemple saint Pierre tenant les clefs du Royaume. Celui de son prédécesseur allemand affichait quant à lui l’apôtre et ses filets lors de la pêche miraculeuse dans le lac de Tibériade (Lc 5, 1-11 et Jn 21, 1-11), précisait Aleteia en 2019.

Cet anneau faisait office de sceau jusqu’au pontificat de Grégoire XVI (1831-1846) - il cachetait à la cire ou au plomb les documents écrits par le pape, permettant également d’authentifier ces textes. De nos jours, cet ornement ne sert plus à sceller. Mais il reste un insigne du pouvoir pontifical. Lorsqu’il n’est pas porté par le pontife, il est conservé sous la responsabilité de la Secrétairerie d’État. Après la mort ou la renonciation du pape, il est solennellement rendu inutilisable par le cardinal camerlingue, en même temps que le sceau de plomb, en présence des cardinaux réunis en congrégations générales. Autrefois brisé à coups de marteau d’argent, il est désormais simplement rayé et griffé, pour éviter qu’il ne soit réutilisé.

Le pape Benoît XVI portant son « anneau de pêcheur », alors qu’il arrive sur la place Saint-Pierre pour sa dernière audience hebdomadaire, le 27 février 2013 au Vatican. GABRIEL BOUYS / AFP

Benoît XVI a été le premier pontife depuis le XIXe siècle à porter en permanence cet anneau du pêcheur, frappé du dessin de Saint-Pierre. Son prédécesseur, Jean-Paul II, préférait de son côté porter un anneau d’argent frappé d’une croix. Il causait d’ailleurs quelques frayeurs quand la bague papale glissait de ses doigts de plus en plus fins pour rester dans la main des personnes le saluant, raconte encore Aleteia. À la mort de Benoît XVI, son anneau (36 grammes d’or massif frappés d’un Saint-Pierre jetant ses filets) a été biffé avant d’être désormais exposé dans les Musées du Vatican.

Le bijou pontifical a également été une source d’inspiration pour l’écrivain français Jean Raspail, auteur de L’anneau du pêcheur, paru en 1995. L’ouvrage tire son inspiration du concile de Constance (1414-1418) qui met fin au grand schisme d’Occident en déposant le dernier antipape avignonnais, Benoît XIII. Dans L’anneau du pêcheur, cette lignée de pape rebelles ne s’est pas éteinte : elle a continué d’exister clandestinement, en parallèle des souverains pontifes de Rome.