Porter un nom célèbre est-il une chance, un fardeau, un moteur ? Philippe Spanghero connaît bien le sujet. Sa famille est réputée pour ses légendes du rugby. De ses oncles Walter et Claude, qui ont porté haut les couleurs du XV de France, en passant par son père, Guy, gloire locale du Racing Club narbonnais. Évidemment, avec un tel héritage, il n’a pu échapper au ballon ovale. Par envie ou par obligation? Par loyauté familiale, tranche-t-il. Avec la terrible conséquence de la comparaison, l’impression de n’exister qu’à travers son nom de famille.
«Tu es le fils de qui ?» Cette question, Philippe Spanghero l’a entendue «des centaines de fois». «Elle m’a longtemps maintenu dans le questionnement quant à ma propre place au sein du clan.» Un questionnement qu’il a mis des années à résoudre. Et qui lui a donné envie de se pencher sur le poids de l’héritage familial, de la transmission du flambeau.
Passer la publicitéÊtre fille de, c’est n’être rien
Marie Tabarly
Pour ce faire, il a choisi de raconter son histoire et, surtout, de récolter celles de fils ou filles de qui ont vécu le même dilemme : comment trouver sa place, sa voie, entre loyauté et émancipation. Les témoignages sont forts, parfois bouleversants. Marie Tabarly s’est rebellée, s’est éloignée, puis est revenue se confronter au passé paternel. Avec la volonté féroce de «sortir de l’ombre» d’Éric Tabarly. Car «être fille de, c’est n’être rien…»
Laurent Tapie évoque à son tour sa relation au père célèbre. Son combat pour la réhabilitation de Bernard qui, avant de disparaître, l’avait sans relâche encouragé à suivre ses traces. Aujourd’hui encore, le fils peine à se voir au niveau du père. «Ce sera toujours plus admirable que mon parcours personnel, même si je terminais président de la République.» Écrasant.
Entre les interrogations d’Emmanuelle Galabru, qui mit des années à se sentir légitime comme comédienne, ou l’envie d’Ariane Daguin d’en découdre, de prouver à son père chef étoilé qu’elle pouvait réussir par elle-même, quitte à réaliser son rêve américain pour cela, se glisse l’histoire de Pierre C. commandant d’antenne du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN).
«L’injonction familiale de sacrifice ultime»
Trois siècles que sa famille aligne les morts au champ d’honneur pour la France, les grands officiers et les fiers résistants. Dans son bureau, Pierre C. a, en permanence sous les yeux, les médailles qui ont récompensé nombre de ses aïeux. Comment, dès lors, se montrer digne de ce passé familial ? Comment, à son tour, faire honneur à cette tradition héroïque ?
Il aura la réponse lors de sa première intervention. Un assaut pour sauver deux enfants d’un preneur d’otages décidé à en finir avec la vie. Ce jour-là, Pierre C. a entrevu la mort de près, répondant à «l’injonction familiale induite de sacrifice ultime». La loyauté absolue au nom du clan.
Passer la publicitéAu nom du clan». Philippe Spanghero, Éditions Alisio
160 pages, 17 euros.