Notre critique de Mickey 17 : fable d’anticipation satirique et burlesque

Notre critique de Mickey 17 : fable d’anticipation satirique et burlesque

Robert Pattinson incarne avec Mickey Barnes, alias Mickey 17, employé cloné embarqué dans une odyssée spatiale vers un nouveau monde à coloniser Copyright 2024 Warner Bros. Entertainment Inc.

CRITIQUE - Le nouveau long-métrage du cinéaste sud-coréen Bong Joon-ho embarque Robert Pattinson pour les étoiles. Mais propose surtout un pamphlet mordant de la société américaine sous une façade de blockbuster.

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Bong Joon-ho n’avait pas donné signe de vie depuis six ans. Depuis le doublé palme d’or-Oscar du meilleur film en 2019 pour Parasite. On commençait à s’inquiéter. Mickey 17 lui assure un retour tonitruant dans la cour des grands. Son troisième film en anglais renoue avec les fresques d’anticipation dont il raffole, telles Snowpiercer, le Transperceneige ou Okja. L’intrigue de cette satire sociale déguisée en blockbuster futuriste burlesque s’appuie sur le roman d’anticipation d’Edward Ashton Mickey 7, paru en 2022.

Robert Pattinson y incarne Mickey Barnes, un pauvre type pas bien malin poursuivi par des créanciers redoutables qui veulent lui faire la peau. En 2054, rien ne va plus sur notre pauvre Terre. Un politicien mégalomane et despotique, Kenneth Marshall (campé par un Mark Ruffalo jubilatoire en figure trumpienne mâtinée d’Elon Musk), a décidé avec sa femme de lancer une expédition interplanétaire vers la lointaine planète Niflheim, un monde gelé qu’il compte coloniser.

Au dernier moment, Mickey s’embarque dans l’aventure, mais ne lit pas correctement les petites lignes de son contrat. Il faut toujours le faire… Il devient alors un « expendable », soit un travailleur en bas de l’échelle sociale, un employé « consommable » cloné, et dont on peut se servir pour plein d’expérimentations. S’il meurt durant sa mission, il est « réimprimé » et ses données psychologiques sont réimplantées dans son nouveau corps.

Action et effets spéciaux

Mickey va en voir des vertes et des pas mûres durant le voyage intersidéral. Arrivés à destination, les médecins s’aperçoivent que l’atmosphère de la planète gelée n’est pas respirable car elle contient un méchant virus mortel. Cobaye volontaire, Mickey teste des gaz toxiques, des radiations mortelles jusqu’à ce qu’il soit envoyé sur la planète. Là, sa 17itération est présumée morte, tombée au fond d’une grotte de glace, qu’on découvre habitée par d’étranges cafards géants. Mickey 18 est alors mis en service. Pourtant Mickey 17 a survécu. Le système commence à se détraquer.

Comédie de science-fiction politique à gros budget, Mickey 17 explore avec une bonne dose de cynisme et d’humour noir la déshumanisation des humains dépassés par leur condition. Le clonage est devenu une vulgaire séance de photocopie, désacralisant ainsi le transhumanisme. Avec cette fable subversive, Bong Joon-ho s’attaque aussi à la démocratie qui s’étiole sous les menées narcissiques d’un despote veule et stupide mené par le bout du nez par son épouse (Toni Collette) obsédée par la gastronomie et les fonds de sauce.

Robert Pattinson est très convaincant dans le rôle de Mickey, sorte de Buster Keaton un rien gaffeur, un peu crétin et résigné, mais tellement sensible. Bourré d’action et d’effets spéciaux, Mickey 17 rappelle le travail de Paul Verhoeven sur Starship Troopers (1998), cette fresque guerrière de science-fiction à double lecture. Le mordant pamphlet du cinéaste sud-coréen y ajoute un degré supplémentaire de dérision et de cynisme qui s’assombrit un tantinet vers la fin, saupoudré d’une singulière mélancolie.

La note du Figaro : 3/4