La reconstruction controversée d'une église allemande symbole de la prise officielle du pouvoir par Adolf Hitler en 1933 a franchi une étape décisive jeudi 22 août avec l'inauguration de sa tour flambant neuve, au centre de Potsdam, à une trentaine de kilomètres de Berlin.
Présent à la cérémonie, le président allemand Frank-Walter Steinmeier a reconnu que l'église de la Garnison rappelait «des épisodes douloureux et funestes» du passé allemand, notamment la «journée de Postdam» le 21 mars 1933 lors de laquelle le président du Reich Hindenburg reçut officiellement Hitler, son cabinet et les députés du parlement. Malgré cette lourde réminiscence le président allemand a justifié cette restauration en déclarant: «Un lieu qui n'existe plus n’aurait pas facilité pas un travail de mémoire critique». Témoin de l'opposition que le projet suscite depuis des années : une centaine de personnes ont manifesté dans le calme à proximité de l'édifice.
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L'histoire de l'église de la Garnison de Potsdam, bâtie entre 1733 et 1735 sur ordre de Frédéric Ier de Prusse, presque complètement détruite par les bombardements des Alliés en avril 1945, est particulièrement chargée.
C'est ce temple protestant que les nazis ont choisi, le 21 mars 1933, pour la séance inaugurale du parlement issu des élections législatives que venait de remporter le parti national-socialiste d'Adolf Hitler.
Une photo passée à la postérité montre Hitler, chancelier depuis moins de deux mois, accueillant à son arrivée à l'église le président du Reich, le vieux maréchal Paul von Hindenburg.
En choisissant cette église où se trouvent les tombeaux de Frédéric Ier et de son fils Frédéric II, Hitler entendait se poser symboliquement en héritier des rois qui ont fait la grandeur de la Prusse.
Adressée au président Steinmeier, une pétition signée par des milliers de personnes dénonce «une construction qui est non seulement un symbole central du nationalisme prusso-allemand mais aussi de l'extrême droite». Un texte qui a forcé le chef d’État allemand a donné cet éclaircissement: «Nous n'occultons pas les zones d'ombre du passé, mais nous les rendons visibles afin d'en tirer des enseignements». Une exposition dans l'édifice sera donc destinée à instruire les visiteurs sur l’histoire de ce lieu et du symbole national-socialiste qu’il représenta.
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La nouvelle église, dont la rénovation n'est pas tout à fait achevée, «n'est pas un lieu de vénération du militarisme, du nationalisme et de l'État autoritaire», a martelé le chef de l'État. Il adresse ainsi un message à l'extrême droite et notamment au parti Alternative pour l'Allemagne (AfD) qui est en tête des sondages avant l'élection régionale organisée le 22 septembre dans le Land du Brandebourg, dont la capitale est Potsdam.
La restauration de l'église de la Garnison, dont les derniers vestiges avaient été rasés à la fin des années 1960 à la demande des autorités est-allemandes , - Potsdam se trouvant alors en RDA communiste -, est largement financée par l'État fédéral.