Gard : qui était Estelle Méjean, cette pharmacienne «passionnée et discrète», tragiquement poignardée dans son jardin ?
Estelle Méjean-Paoli vivait sa profession avec passion, tout comme la course à pied qu’elle pratiquait assidûment. Autour de sa disparition plane l’incompréhension.
Passer la publicité Passer la publicité« Qui aurait pu lui en vouloir ? » La question revient sans cesse dans les rues de Connaux et devant la pharmacie de Tresques (Gard), où le rideau métallique est désormais recouvert de fleurs, de peluches et de lettres. Ce jeudi 11 septembre, en fin de matinée, Estelle Méjean-Paoli, 49 ans, a été retrouvée poignardée à plusieurs reprises dans le jardin de sa maison, entre Connaux et Saint-Paul-les-Fonts, dans le Gard.
Originaire de la région nîmoise, elle avait emménagé ici avec son mari il y a un peu plus de vingt ans, bâtissant de toutes pièces une pharmacie. Dans ce village de presque 2000 habitants, leur officine représentait bien plus qu’un commerce : « une vraie nécessité », note une habitante. La nouvelle de sa disparition a plongé la population dans la sidération. « Elle se coupait en quatre pour ses clients, toujours disponible », raconte une voisine, qui s’y rendait « deux fois par mois » pour sa mère handicapée. « On savait qu’on pouvait compter sur elle, même pour les pansements des enfants ou un médicament urgent : elle faisait immédiatement le bon de commande. »
Passer la publicitéCette proximité inspirait un profond respect. « Elle avançait les frais, faisait confiance, arrangeait tout le monde. Ce sont des gens discrets, très investis localement. On avait beaucoup d’estime pour eux. » Pendant la pandémie, elle allait elle-même livrer les traitements à domicile. « C’est une brave femme, une dame très gentille. Elle n’avait jamais fait de mal à personne », résume un habitant du voisinage, encore sous le choc.
Une tradition familiale
Le métier est dans les gènes des Méjean-Paoli. « Ses parents ont aussi une pharmacie aux alentours de Nîmes, et il leur arrive même d’envoyer un employé ici pour soutenir l’équipe », confie une cliente régulière. Depuis, l’officine de Tresques ne fermait pour ainsi dire jamais. Aujourd’hui encore, la transmission semble assurée : « Cet été, c’est sa fille aînée qui m’a servie au comptoir. Elle est en études de pharmacie », indique une patiente régulière. Mère de quatre enfants, Estelle vivait entourée d’une famille « très soudée, toujours présente dans les animations locales ». « On les voyait ensemble aux fêtes des écoles. C’était une famille posée, sérieuse, mais toujours avenante. »
Le mari, également pharmacien, partageait chaque journée de travail à ses côtés. C’est lui qui a découvert le corps sans vie de son épouse avant d’alerter les secours. Interpellé puis placé en garde à vue dans la foulée, il a été rapidement remis en liberté, les vérifications ayant confirmé qu’il ne se trouvait pas sur place au moment des faits. Une brève procédure qui a profondément secoué le village. « C’était évident que ce n’était pas un drame familial, souffle une voisine. Quand on connaît cette famille, on ne peut pas y croire. »
Une passion pour la course à pied
Loin de la pharmacie, Estelle cultivait une autre passion, toujours au bénéfice de la santé : la course à pied. Sa maison, perdue « au milieu des vignes, dans les chemins de gravier », l’isolait un peu des grands axes. « Peut-être qu’elle a été suivie, ce n’est pas une maison sur la route principale », note une commerçante, qui se souvient de l’avoir « croisée une ou deux fois, en footing ». Une habitude confirmée par un voisin : « Elle faisait beaucoup de sport. Elle était membre d’un club de course », explique-t-il avant de souligner : « Parfois elle courait avec ses chiens. D’ailleurs, ça nous surprend encore plus car on ne s’approchait pas facilement de sa maison avec ses bêtes. »
Un ancien adhérent du club d’endurance de Laudun-l’Ardoise explique qu’elle avait rejoint l’«ECLA» vers 2016-2017 : « Elle venait s’entraîner régulièrement avec des copines, elle participait aux courses locales. Une personne très gentille, très simple. »
Passer la publicitéAujourd’hui, cette image d’une joggeuse sereine et discrète contraste violemment avec l’horreur du crime. « C’est incompréhensible. Un cambriolage qui a mal tourné ? On se pose des questions… Le pire, c’est qu’il n’y a toujours aucune piste privilégiée », confie un voisin. À ce stade, l’enquête ne permet pas de déterminer ce qu’Estelle Méjean-Paoli faisait avant de rejoindre son mari à la pharmacie. Impossible de savoir si ce drame s’inscrit dans la série d’agressions touchant ces dernières années des joggeuses en France. « Tant qu’on ne saura pas la vérité, il restera cette peur, l’idée qu’un fou se promène peut-être dans la nature. Mais je ne vois pas qui aurait pu en vouloir à cette femme », conclut une commerçante de Connaux.