Fonction publique : trois questions sur les propos du ministre Stanislas Guerini qui veut "lever le tabou du licenciement"
"Je veux qu'on lève le tabou du licenciement dans la fonction publique." C'est la petite phrase choc du ministre Stanislas Guerini dans Le Parisien. Elle ne figure pas dans les documents remis mardi 9 avril aux syndicats à l'ouverture d'une concertation sur son futur "projet de loi pour l'efficacité de la fonction publique" attendu à la rentrée. Ce projet de réforme vise notamment à accentuer la rémunération au mérite des fonctionnaires et faciliter les mutations d'une branche à l'autre de la fonction publique.
1 Qu'est-ce que cette phrase signifie concrètement ?
Stanislas Guerini fait référence aux licenciements pour insuffisance professionnelle. Ce ne sont pas des licenciements pour faute comme il peut y avoir dans le secteur privé, assurent les syndicats, mais cela ressemble plutôt à une procédure de licenciement pour inaptitude à la suite d'une maladie ou un accident. Il y en a eu seulement 13 en 2023 selon les calculs du ministre, sur 2,5 millions d'agents de la fonction publique d'État.
Un chiffre dont il devrait "se réjouir", grince un responsable syndical, car cela prouve que l'accompagnement individuel et la formation, le cas échéant, permettent de reclasser des agents. Le même syndicaliste estime que le seul objectif de Stanislas Guerini est en réalité de réduire la masse salariale pour coller aux 20 milliards d'euros d'économies budgétaires déjà anticipés dans le prochain projet de loi de finances.
2 Comment est perçue cette phrase par les syndicats ?
Cette petite phrase est donc sans surprise très mal reçue. "Il est dingue de dire ça", résume un autre syndicaliste. D'autant que le ministre omet en revanche de parler du dispositif de rupture conventionnelle, testé depuis 2020 à l'image du privé et dont 5 300 agents de la fonction publique d'État ont bénéficié rien qu'entre 2020 et 2022. Un nombre jugé relativement important.
3 Quels sont les autres sujets soulevés par Stanislas Guerini ?
Le ministre a évoqué le temps de travail et l'absentéisme. Il affirme en effet que 200 000 fonctionnaires travaillent moins de 1 607 heures par an, le temps de travail correspondant à 35 heures par semaine, et que l'absentéisme dépasse 14 jours en moyenne. Ce qui engendre, selon le ministre, un coût annuel de huit milliards d'euros pour l'État. Des propos "démagogiques, symptomatiques d'un profond mépris" pour la fonction publique, s'étrangle la CGT. La concertation sur le projet de loi semble donc bien mal engagée.
D'autant que Stanislas Guerini rejette en revanche les demandes syndicales d'instaurer une négociation annuelle obligatoire (NAO), comme dans le secteur privé. Les responsables syndicaux déplorent unanimement que le ministre prétende vouloir renforcer l'attractivité de la fonction publique mais ne veut pas négocier et multiplie les provocations. Ils jugent le ministre "inconséquent". Au point que FO, la deuxième organisation de fonctionnaires a demandé et obtenu, selon nos informations, une audience auprès du cabinet de Gabriel Attal à la fin du mois.