REPORTAGE. L’aide humanitaire est-elle détournée en Ukraine ? "C’est le flou le plus total", dénonce un journaliste qui enquête sur le terrain

Dans le village de Pokrovske, à une quinzaine de kilomètres de la ligne du front du Donbass où des combats acharnés continuent à se livrer, Larissa, 69 ans, tente de soulever un colis rempli d’aide alimentaire. "C’est très important parce que les retraites sont toutes petites", confie-t-elle. 

Chaque carton distribué ici contient cinq kilos de farine, du sel, du sucre, des pâtes, quelques boîtes de conserves. "Nous travaillons avec des groupes vulnérables, comme des retraités", confirme Igor Kouliko, le responsable du centre de collecte. "C’est pour payer la nourriture, l’électricité. Nous leur donnons une aide alimentaire pour un mois, ça les aide beaucoup. La retraite ici, c’est 2 000 grivnas par mois, 50 euros", affirme-t-il.

Problème : le manque de transparence

Ivan Krassikov est journaliste indépendant. Il mène une enquête dans la ville de Dnipro, important centre logistique au cœur du pays. Selon lui, des fonctionnaires profitent de ce flou. "Ils reçoivent de l’argent de l’État, mais tous les salariés de la mairie ont une double position : ils travaillent comme fonctionnaires, mais ils sont aussi bénévoles, et il est très difficile de savoir et de comprendre d’où vient l’aide qu’ils apportent. C’est le flou le plus total, dénonce-t-il. Est-ce que ça vient de l’argent public ou est-ce que ça vient de dons et des organisations internationales ?"

"Ils prennent l’argent mais c’est impossible de savoir s’ils volent celui de l’État ou celui des organisations humanitaires."

Ivan Krassikov, journaliste indépendant

à franceinfo

Selon cet activiste, les représentants politiques ukrainiens, en pleine guerre, n’auraient aucun intérêt à plaider pour plus de transparence. L'Ukraine, qui était confrontée à de graves problèmes de corruption avant même l'invasion russe, s'est pourtant engagée à accroître ses efforts de lutte contre ce fléau pour soutenir son ambition d'intégrer l'Union européenne et pour rassurer ses bailleurs de fonds occidentaux.