Mort du pape François : comment le souverain pontife a transformé le collège électoral en vue du conclave
Après la mort du pape François, lundi 21 avril, les cardinaux du monde entier vont rejoindre Rome (Italie) pour les funérailles du souverain pontife. Après une période de deuil, il sera temps de préparer le conclave au cours duquel sera élu le nouveau chef de l'Eglise catholique, et qui débutera entre 6 et le 11 mai. Les observateurs s'interrogent déjà sur l'homme qui succédera à Jorge Bergoglio, élu en 2013 après la mise en retrait surprise de son prédécesseur, Benoît XVI.
Toutefois, le collège électoral n'a plus grand-chose à voir avec celui qui a choisi le premier pape argentin. Franceinfo vous résume les modifications apportées durant le pontificat de François, qui a duré douze ans.
Des cardinaux électeurs plus nombreux
A la mort du pape François, on recense 20 cardinaux électeurs de plus qu'il y a 12 ans. Conformément aux règles fixées en 1970 par Paul VI, les "princes de l'Eglise" de plus de 80 ans ne sont pas autorisés à voter. Ainsi, depuis l'anniversaire de l'Indien George Alencherry, samedi, on ne compte plus "que" 135 cardinaux électeurs et 117 cardinaux non votants, comme le signale le bureau de presse du Vatican. "Le pape François a eu ces derniers mois une frénésie cardinalice", a expliqué sur franceinfo Pierre-Hugues Dubois, journaliste pour RCF et Radio Notre-Dame. "Il en a nommé en Mongolie, à Kaboul, un peu partout...", a-t-il poursuivi, illustrant la volonté de François de déplacer le centre de gravité de l'Eglise catholique.
Parmi les hommes (aucune femme ne participe à l'élection du pape) désormais chargés de désigner le prochain souverain pontife, 108 ont ainsi été choisis par François. Au cours des 12 ans de son pontificat, François a organisé dix consistoires, au cours desquels il a "créé" au total 163 cardinaux (parmi lesquels 14 sont morts, et 41 sont aujourd'hui des non-votants).
De plus en plus de représentants des pays du Sud
"Le pape François a beaucoup renouvelé ce collège des cardinaux, notamment en changeant la manière de les choisir", a expliqué sur franceinfo Agnès Desmazières, historienne spécialiste du catholicisme. Traditionnellement, les cardinaux sont choisis parmi les archevêques des grands sièges de l'Eglise catholique, comme, Paris ou encore Venise, ainsi que parmi les responsables de la Curie, les institutions administratives du Vatican.
Dans une stratégie assumée, les cardinaux de l'ère François sont désormais souvent issus "de lieux de périphérie" : pays en guerre, pays du sud ou encore, pays dans lesquels les chrétiens sont minoritaires. Selon le média catholique américain EWTN basé au Vatican, François a créé des cardinaux dans 72 pays, dont 24 n'avaient encore jamais eu de cardinal auparavant.
En 2014, le premier consistoire convoqué par François a marqué la création du premier cardinal en Haïti, suivi, en 2015, des premiers cardinaux des îles Tonga, du Cap-Vert, du Panama ou encore de Birmanie. En 2022, un prêtre missionnaire et évêque italien installé depuis une vingtaine d'années en Mongolie, où les chrétiens représentent moins de 1% de la population, est devenu le premier cardinal du pays. En 2024, un missionnaire belge est devenu le premier cardinal nommé en Iran.
Si l'Europe fournissait, en 2013, 60 des 117 cardinaux en âge de voter, ils sont à ce jour 53 sur 135, signe d'un rééquilibrage entre les continents. La répartition géographique reste cependant inégale, avec une légère surreprésentation des nations asiatiques, qui comptent "11,1% des fidèles de la planète, mais 17% des cardinaux électeurs", a expliqué La Croix, soit 23 cardinaux, le même nombre que pour l'ensemble de l'Amérique centrale, l'Amérique du Sud et les Caraïbes. A l'inverse, le continent africain compte "19,6% des catholiques dans le monde [mais] n’est représenté que par 18 cardinaux, soit 12,1% du Collège."
Des jeux d'alliances encore incertains
Parmi les cardinaux, "les candidats se préparent, les réseaux d'influence jouent aussi", a expliqué sur franceinfo Agnès Desmazières. Or la présence de nouveaux venus originaires de pays autrefois absents des conclaves peut changer la donne. "Habituellement, les cardinaux se connaissent bien entre eux, parce que ce sont les grands évêques un peu partout dans le monde qui, en général, situent à peu près bien qui est qui", a ainsi rappelé Pierre-Hugues Dubois, sur franceinfo.
Cette fois, "les cardinaux ne se connaissent pas", ils vont devoir apprendre à se connaître rapidement, afin d'élire le prochain pape. "Dans les semaines à venir, il sera important de scruter les parcours de ces cardinaux dont on ignore beaucoup de choses", estime Agnès Desmazières.