Sur les podiums parisiens, la nouvelle garde marque des points
La saison dernière, Marie Adam-Leenaerdt avait convié « la caravane de la mode » à l’heure du déjeuner chez Terminus Nord, l’emblématique brasserie devant la gare du Nord. Cette fois-ci, toujours à la même heure, la Belge très inspirée nous donnait rendez-vous dans la galerie de design Paradis installée dans une ancienne usine de céramique du 10e arrondissement. Point d’œufs mayo mais de magnifiques objets pensés par Rodolphe Parente, Hugo Toro et Jean-Michel Wilmotte. Les paroles « Heathcliff, it’s me, I’m Cathy », de Kate Bush résonnent entre le premier et le deuxième sous-sol. Une fille descend l’escalier et slalome entre quelque 300 sièges standardisés et de magnifiques pièces signées. Elle porte un long pardessus gris en feutre sans boutonnage et sans poche. Une autre la suit avec une veste du même genre, puis un tailleur jupe, une redingote cintrée à la taille, une robe à grand col V, etc. Tout en feutre gris légèrement rigide. Les mêmes filles repassent : un pardessus noir, un trench beige, un manteau de satin, un costume noir, un blazer bleu marine, une robe léopard, une petite robe noire… Tous apparus grâce à un système de zips et de rubans ingénieux autant que radical. « Ce concept infuse mes collections depuis la première mais je ne l’avais jamais autant exploité, explique-t-elle en coulisse de son débit de mitraillette. Cette fois-ci, j’en ai accentué le principe en faisant deux fois le même show mais porté de deux manières différentes. Mon objectif est que ces vêtements deux en un fassent partie de l’ADN de ma marque car la multifonctionnalité d’une pièce est essentiel pour moi. Si on prend en compte qu’elle coûte cher, la cliente a légitimement l’envie de se l’approprier selon les occasions et de la porter longtemps. » V. G.
Un défilé qui commence par le finale, ce n’est pas banal… et assez génial. C’est aussi tout le concept de la nouvelle collection de Zomer, la jeune marque fondée en 2023 par deux jeunes Néerlandais Imruh Asha (d’origine caribéenne) et Danial Aitouganov (d’origine russe) rencontrés sur les bancs de l’Amsterdam Fashion Institute. « Nous voulions remonter le temps et refaire les choses à l’envers. Et donc le vêtement aussi. Certains sont conçus pour être portés devant-derrière, pour d’autres, c’est juste un effet de styliste. Nous avons également ajouté des éléments à des endroits inattendus comme ces cols de chemise amovibles aux ourlets des pantalons », explique Danial en backstage. Les poches arrière et l’étiquette griffée d’un jean sont à l’avant, le bouton et la boucle de ceinture à l’arrière, quand un col de chemise vert d’eau agrandi à l’extrême forme le revers d’un tailleur jupe sens dessus dessous. Un look abat-jour sur la tête et jupe tapis au motif fleuri a été inspiré au duo par un récent voyage à Marrakech. Et des sacs, il ne reste que l’anse et les charms. Ce n’est pas seulement drôle, c’est très désirable, étonnamment réel et, pour beaucoup de pièces, portable. Une très belle surprise que cette collection que les deux designers vont également présenter à la demi-finale du LVMH Prize ce mercredi… Quand on lui demande si ce « rembobinage » du temps trahit une certaine nostalgie, le jeune homme qui est né en République du Tatarstan, répond : « Il me semble surtout que le monde va aussi en arrière d’une certaine manière… Zomer n’est pas une marque politique. Nous ne cherchons pas à faire de déclarations. Il s’agit plutôt de joie, d’être positifs. » H. G.
Le bruit des machines, d’une photocopieuse ou d’une tricoteuse, rythme le pas des mannequins chez CFCL. Présenté à l’Ircam (Institut de recherche et coordination acoustique/musique), ce défilé du créateur Yusuke Takahashi fête la dixième collection de la griffe japonaise. Pour l’occasion, l’artiste nippone Miyu Hosoi a retracé le processus de fabrication des vêtements CFCL en échantillonnant les sons et en les reconstituant en un morceau mécanique et rythmique. À enjambées cadencées, les mannequins vêtus d’un vestiaire qui fait la part belle à la maille et au mouvement. Les volants des jupes remontent comme des lampions, les franges bougent comme des papillons. Parfois les torsades des tricots sont piquées de paillettes bleu électrique fines comme des aiguilles. Il y a du rouge et du bleu primaires qui viennent contrebalancer le doré. Mais notre préférence va tout de même aux silhouettes noires ou blanches. V. G.