Intelligence artificielle : la sélection des pépites européennes du Figaro Magazine
L’IA a amorcé un nouveau changement de paradigme. Conscientisée par le grand public grâce à l’arrivée de la version publique ChatGPT 3 en novembre 2022, l’intelligence artificielle est désormais au cœur de nos sociétés modernes. Pour certains, elle est la réponse à l’ensemble des problèmes de l’humanité ; pour d’autres, elle précipitera sa perte. Dans le monde du travail, elle est avant tout perçue comme l’était d’abord la machine : un remplaçant. C’est le cas dans beaucoup d’industries. Mais cette vision réductrice masque une réalité plus vaste et plus nuancée : l’IA ne se contente pas de remplacer, elle permet aussi d’inventer, de créer, d’élargir les possibles. Elle offre des outils inédits pour améliorer la recherche médicale, optimiser les chaînes logistiques, renforcer la sécurité numérique ou encore augmenter des œuvres artistiques.
Partout, des entrepreneurs et des ingénieurs s’emparent de ces nouvelles capacités pour bâtir des solutions originales, résoudre des défis anciens ou en relever de nouveaux. C’est pourquoi la rédaction du Figaro a sélectionné plusieurs entreprises européennes qui font un usage remarquable et audacieux de l’intelligence artificielle. Ces sociétés ne se contentent pas d’intégrer l’IA : elles s’en servent pour réinventer leur secteur d’activité, gagner en efficacité, conquérir de nouveaux marchés ou encore répondre à des enjeux sociétaux. Une liste, bien évidemment non exhaustive, de ces entreprises qui dessinent les contours d’un futur où l’homme et la machine ne sont pas en confrontation mais en coopération.
Aquemia : proposer un moteur de R&D pour les grands laboratoires pharmaceutiques
«La mission d’Aqemia est d’inventer des médicaments de façon rapide, précise et frugale», résume Maximilien Levesque, cofondateur et PDG. Pour y parvenir, elle a développé une technologie unique mélangeant physique théorique et IA générative. Et de tester des molécules thérapeutiques pour évaluer très rapidement leur capacité à créer des médicaments innovants. « Nous testons des millions de molécules et réintroduisons les résultats dans notre moteur. Nous lui enseignons non seulement quelles molécules sont bonnes, mais aussi pourquoi elles sont bonnes », précise le dirigeant. L’approche d’Aqemia est d’enseigner à une IA à mieux travailler. En 2024, la société a amorcé des essais cliniques pour certaines molécules, notamment dans le domaine de l’oncologie. Elle a aussi conclu une collaboration sur plusieurs années avec Sanofi.
Ask Mona : faciliter et augmenter l’accès à la culture et au patrimoine historique
Faire parler les tableaux, les sculptures et les livres : Ask Mona permet d’ajouter de l’interactivité aux visites culturelles. Grâce à sa technologie, prendre en photo une œuvre d’art permet… de lui poser des questions, à l’oral ou à l’écrit, via son smartphone. Et l’IA de répondre en temps réel. L’expérience se prolonge à domicile en donnant la possibilité de continuer à dialoguer avec des œuvres ou des personnages historiques. Pour garantir la fiabilité, Ask Mona s’appuie sur des données vérifiées et travaille avec des institutions culturelles pour tester ses produits. Dès le printemps 2025, grâce à un partenariat avec le Château de Versailles et OpenAI, vingt fontaines et statues des jardins du domaine pourront ainsi « parler » aux visiteurs, racontant leur histoire de manière ludique et instructive.
BeeBryte : améliorer la gestion de l’énergie pour réduire ses coûts à grande échelle
Dans un secteur très en tension comme celui de l’énergie, économiser de l’électricité permet de sauvegarder l’environnement, mais aussi et surtout de réduire ses coûts. BeeBryte est un logiciel service capable de contrôler en temps réel les équipements électriques et d’anticiper les besoins thermiques d’un bâtiment en analysant la météo, l’activité ou l’occupation. L’algorithme ajuste automatiquement les réglages rendant le système prédictif et plus efficace qu’une régulation classique. Résultat : jusqu’à 40% d’économies d’énergie revendiquées par l’entreprise, qu’elle partage avec son client. Une technologie qui a notamment permis à cette société lyonnaise d’être soutenue par Bpifrance et l’Ademe. Une solution qui vient s’ajouter à celles proposées par d’autres acteurs de l’IA énergétique comme les Anglais de Reactive Technologies ou les Suédois de Polarium.
Boby - Cegid : alléger la charge des artisans et des ouvriers en automatisant la création des devis
En finir avec la « paperasse » et gagner 4 heures par semaine. Ce sont les deux promesses de Boby, une entreprise filiale de Cegid qui propose, grâce à l’IA, aux artisans et ouvriers du bâtiment de réaliser des devis en 10 minutes en dictant les spécificités techniques à l’assistant virtuel. Une besogne autrefois chronophage pour des employés aux journées très chargées, et qui devait se faire tôt le matin ou tard le soir. Le devis peut désormais être créé depuis sa voiture ou les transports en commun. Intégré à l’application de messagerie WhatsApp depuis l’année dernière, Boby est multilingue et comprend une quinzaine de langues comme l’espagnol, le portugais ou le turc. Un bon exemple de la manière dont l’IA peut alléger la charge des employés pour leur permettre de se concentrer sur des tâches plus rentables et productives.
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Deepl : le David allemand de la traduction qui défie le Goliath américain
Préférez David plutôt que Goliath ; oubliez Google Traduction et embrassez Deepl. Quiconque a déjà essayé ce logiciel allemand, qui utilise des réseaux neuronaux brevetés pour fournir des traductions, sait qu’il est plus fluide, plus efficace et plus subtil que son homologue du géant américain. Certes, la version gratuite empêche de traduire d’un coup de trop gros textes, et il dispose – pour l’instant – de moins de langues que Google Traduction. En utilisant une adaptation d’un schéma et en puisant dans la base de données du site de traduction Linguee pour s’entraîner et apprendre, Deepl obtient régulièrement des scores supérieurs à ceux de ses concurrents sur les tests dits Bleu (Bilingual Evaluation Understudy). Évaluée à 2 milliards de dollars l’année dernière, l’entreprise a annoncé un investissement de 300 millions pour financer la recherche et l’innovation.
Dilepix : des vignes aux élevages, l’IA révolutionne aussi l’agriculture d’aujourd’hui et de demain
Correctement récoltées et exploitées, les données peuvent fournir aux exploitants agricoles une aide non négligeable pour gérer leurs champs et leurs domaines. Dilepix propose une plate-forme dopée à l’IA pour mieux agréger et interpréter les images et les données. Une technologie qui permet d’augmenter les capacités et la précision des machines agricoles, ou d’en développer de nouvelles pour continuer d’innover sur la gestion des exploitations de demain. La technologie permet aussi de mieux surveiller les élevages pour passer d’un traitement systématique à un traitement ciblé et individualisé, notamment pour les antibiotiques. Un outil parmi tant d’autres au service d’une agriculture plus précise, plus durable – et plus compétitive. Permettant ainsi d’envisager une capacité de production alimentaire plus souveraine.
Luminance : détecter, souligner et gommer les failles dans les contrats des grosses entreprises
Luminance est l’une des entreprises pionnières dans l’optimisation de la gestion contractuelle en entreprise, avec pour objectif d’améliorer la sécurité juridique de ses clients. Elle décrit sa technologie comme un « correcteur orthographique » juridique : un outil capable d’analyser automatiquement un contrat et de signaler visuellement les passages qui diffèrent des formulations précédemment validées. Fondée par des mathématiciens de l’université de Cambridge, Luminance ambitionne d’intégrer l’intelligence artificielle à chaque point de contact entre une entreprise et ses documents juridiques. La plate-forme est aujourd’hui utilisée par plus de 700 clients répartis dans 70 pays, opérant dans plus de 80 langues. Un gain de temps, mais aussi de vigilance, dans un domaine où la moindre faille peut coûter très cher.
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Stoïk : pouvoir mieux anticiper et prévenir les risques de cyberattaques
Au carrefour de l’assurance et de la cybersécurité, cette entreprise française spécialisée dans la couverture des risques informatiques pour les PME et les ETI utilise l’IA pour augmenter sa capacité à gérer très vite des grands volumes de données. À une époque où les attaques informatiques se multiplient, les risques deviennent majeurs pour les entreprises. Avec 10.000 entreprises assurées en France et en Europe, Stoïk préfère prévenir que guérir. « Notre but, c’est d’éviter au maximum que le client ne se fasse attaquer », explique Jules Veyrat, co-fondateur et PDG. Le centre des opérations de sécurité (Soc), reçoit constamment des alertes sur ce qui se déroule dans le système des assurés. La rapidité de réaction est fondamentale pour la prévention des potentiels dangers. « Notre IA nous permet d’optimiser notre Soc et de traiter des nombres d’alertes inimaginables. »
Wandercraft : redonner le pouvoir de marcher les mains libres aux personnes paralysées
La vidéo de Charlotte Fairbank, joueuse de tennis en fauteuil qui a perdu l’usage de ses deux jambes, se levant toute seule après s’être équipée de l’exosquelette de l’entreprise Wandercraft, suffit à résumer l’exploit qu’est parvenue à réaliser cette entreprise française. Atalante X est le premier exosquelette mains libres et autoéquilibrant au monde. Il permet aux personnes souffrant de lésions de la moelle épinière ou d’autres maux paralysants de se tenir debout et de marcher à nouveau, sans béquilles ni soutien extérieur. Contrairement aux exosquelettes conventionnels, Atalante utilise des algorithmes pilotés par l’IA pour imiter la démarche humaine, permettant aux patients de s’exercer à des tâches du quotidien. La démonstration que l’IA permet aussi d’accéder à un véritable progrès pour des centaines de personnes handicapées en Europe et dans le monde.
La sélection des pépites de l’IA est soutenue par BNP Paribas