Guerre à Gaza : pourquoi l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas mis sur la table par les Etats-Unis risque à nouveau d'échouer
Malgré la médiation des Etats-Unis, les dernières discussions entre Israël et le Hamas n'ont toujours pas abouti à une trêve. Le mouvement islamiste palestinien a remis, samedi 31 mai, sa réponse au dernier plan pour un cessez-le-feu proposé par l'émissaire américain Steve Witkoff. Il en acceptait certains termes, mais tenait à en négocier d'autres. Une position jugée "totalement inacceptable" par Washington, qui y voit un recul dans le processus diplomatique.
Derrière ces âpres négociations se dessine la principale revendication du Hamas, à laquelle Israël continue de s'opposer fermement : transformer une pause des combats en une fin définitive des hostilités. Signe que les discussions patinent, le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a ordonné dimanche à l'armée d'aller de l'avant dans la bande de Gaza, "indépendamment de toute négociation".
Le Hamas demande un cessez-le-feu permanent
Le plan initial proposé par Washington, et accepté par Israël, reposait sur plusieurs étapes clés. Selon le document obtenu par CBS News, il prévoyait une trêve de soixante jours, durant laquelle le Hamas s'engageait à libérer, en deux étapes, 10 otages israéliens vivants ainsi que les dépouilles de 18 autres détenus morts dans l'enclave. En échange, Israël devait libérer 125 prisonniers "condamnés à perpétuité" ainsi que 1 111 détenus palestiniens, et restituer 180 corps de Palestiniens décédés. L'accord incluait également le renforcement de l'acheminement d'aide humanitaire vers Gaza, sous l'égide des Nations unies et d'autres agences.
Si le Hamas a accepté les conditions d'échanges d'otages et de prisonniers, il a toutefois posé une condition : que la trêve de soixante jours ne soit pas une simple suspension des combats, mais le début d'un cessez-le-feu permanent. Il a aussi demandé le retrait complet des forces israéliennes de la bande de Gaza, ainsi que des garanties fermes pour l'acheminement continu de l'aide humanitaire à la population gazaouie.
Si l'accord n'était toujours pas signé dimanche matin, les deux camps se rejetaient mutuellement la responsabilité de l'impasse. "La proposition du Hamas est totalement inacceptable et ne fait que nous faire reculer", a dénoncé samedi Steve Witkoff sur X. L'émissaire américain a appelé le mouvement islamiste à accepter la base de discussion proposée par son pays afin de lancer rapidement des pourparlers. "C'est la seule façon de conclure un accord de cessez-le-feu de soixante jours dans les prochains jours", a-t-il insisté.
De son côté, le Hamas soutient avoir répondu de manière "positive" à la proposition américaine, dans le but de répondre aux attentes minimales de la population de Gaza. Basem Naïm, membre du bureau politique du mouvement, accuse auprès de la BBC Israël d'avoir rejeté les points sur lesquels un premier accord de principe avait été trouvé entre le Hamas et Washington.
Israël refuse tout retrait militaire complet
Si Israël a officiellement accepté le cadre général du plan proposé par Washington, l'Etat hébreu refuse plusieurs des conditions exigées par le Hamas, en particulier le retrait militaire complet de Gaza, rapporte le Washington Post. Le Premier ministre Benyamin Nétanyahou avait notamment affirmé que l'arrêt des combats n'interviendrait que lorsque le Hamas "déposera les armes, ne sera plus au gouvernement [et que] ses dirigeants seront exilés de la bande de Gaza", rapporte la BBC.
Ces conditions, martelées depuis des mois par Israël, sont jugées inacceptables par le mouvement islamiste palestinien, qui les considère comme une tentative d'éviction politique autant que militaire.
Les autorités israéliennes craignent que le retrait militaire complet permette au Hamas de conserver son influence sur la bande de Gaza. À long terme, Israël redoute que l'organisation palestinienne parvienne à reconstituer ses capacités militaires et à préparer de nouvelles attaques similaires à celle du 7 octobre. Le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou doit aussi composer avec des menaces internes. Ses partenaires d'extrême droite, partisans d'une guerre totale contre le Hamas, pourraient faire chuter son gouvernement s'il met fin à la guerre.
Les otages au cœur des négociations
Depuis le déclenchement du conflit, la question des otages reste au cœur des négociations et des tensions entre Israël et le Hamas. Selon les autorités israéliennes, une vingtaine de personnes encore vivantes, ainsi que les corps de plus de trente autres, sont toujours retenus dans la bande de Gaza. Si le Hamas est prêt à concéder des libérations dès les premiers jours d'une trêve, il doit obtenir des contreparties solides afin de préserver sa capacité à négocier.
De son côté, Israël insiste pour que toute pause temporaire dans les hostilités n'empêche pas une reprise des opérations militaires, si le Hamas ne se rend pas et ne désarme pas, rapporte le New York Times. Ce qui fait craindre au mouvement islamiste palestinien que l'Etat hébreu mette unilatéralement fin à la trêve une fois une partie des otages récupérés, comme cela s'était produit en mars dernier.
Dans ce contexte, des voix s'élèvent en Israël en faveur d'un compromis. Le Forum des familles d'otages, par exemple, soutient la nécessité d'un accord global immédiat pour ramener tous les captifs chez eux. "Ni Israël ni le Hamas ne veulent céder, mais en même temps, ils ne font rien pour modifier la trajectoire" de cette guerre, résumait Peer de Jong, vice-président de l'institut Themiis, samedi soir sur franceinfo.