Notre critique d’On ira, un joyeux requiem sur la route finale

Notre critique d’On ira, un joyeux requiem sur la route finale

Pierre Lottin et Hélène Vincent se retrouvent dans le premier film d’Enya Baroux après Quand vient l’automne, de François Ozon. Copyright BONNE PIOCHE CINEMA - CARNAVAL PRODUCTION - ZINC - 2025

CRITIQUE - Pour son premier film, Enya Baroux, la fille de l’humoriste Olivier Baroux, réussit un road-trip aussi hilarant qu’émouvant. Avec l’excellent duo Pierre Lottin et Hélène Vincent.

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Tout déraille dans la vie de Marie. Voilà cette charmante octogénaire (Hélène Vincent) coincée dans son monte-escalier alors qu’elle doit se rendre à une convocation médicale importante avec son fils, Bruno, qui n’est pas là. Auxiliaire de vie aux abois plutôt maladroit, Rudy (Pierre Lottin) la tire de ce mauvais pas. Désespérée par l’absence de son fils, Marie supplie Rudy de la conduire à son rendez-vous. La vieille dame, fine mouche, le fait passer pour son rejeton et lui fait signer les papiers d’un suicide assisté en Suisse. Le tour est joué.

Lorsque Bruno (David Ayala) arrive avec Anna, sa fille adolescente, un curieux quatuor se met en place. Chaque personnage joue la partition du quiproquo avec brio. Anna (Juliette Gasquet) tente de dissimuler à son paternel qu’elle vient d’avoir ses règles. Criblé de dettes, ce fils irresponsable se laisse embobiner par sa mère, qui lui demande de l’accompagner en Suisse, prétextant un mystérieux héritage tombé du ciel. Piégé dans cette famille dysfonctionnelle, le brave Rudy, qui ne se déplace jamais sans son rat apprivoisé, baptisé Lennon, accepte de conduire le vieux camping-car familial vers Zurich. Débute ainsi une équipée sauvage, pleine de drôlerie et de surprises.

Pour son premier film, Enya Baroux, qui a fait ses classes comme scénariste sur la série de Canal+ Fleur bleue, ne se trompe pas de chemin. La fille de l’humoriste Olivier Baroux (célèbre pour son duo comique Kad et Olivier) s’est principalement focalisée sur ses personnages. Elle a bien fait. L’alchimie fonctionne. Quant au tandem Pierre Lottin et Hélène Vincent, il fait une nouvelle fois des étincelles après Quand vient l’automne , de François Ozon.

Partie endiablée de Monopoly

L’autre point fort de ce long-métrage plein de délicatesse, ce sont les dialogues, qui sonnent juste. Le manque de communication est la clé de ce quartet dépareillé. Entre la séquence incongrue de la station-service, celle du cimetière dans le carré des indigents, la partie endiablée de Monopoly, la mémorable soirée au bowling ou la drôle de baignade avec flotteurs volés à une petite fille, le film déborde de légèreté qui contraste avec l’objectif final. C’est la troisième fois cette année, après La Chambre d’à côté,  d’Almodovar, et Le Dernier Souffle, de Costa Gavras, que la thématique du droit à mourir dans la dignité est évoquée sur grand écran.

La patte d’On ira, c’est son ton singulier, à l’équilibre entre le drame et l’humour badin. Calqué sur la trame narrative de Little Miss Sunshine, il offre aux spectateurs un road-movie solaire électrisé par les mélopées dansantes et très années 1980, comme le tube de Desireless Voyage, voyage. Peu importe la destination funèbre de ces protagonistes arc-boutés sur leurs secrets de famille, On ira parvient à exister avec pudeur et sincérité au-dessus des contingences d’un sujet de société aussi grave que l’euthanasie. Ce n’est pas donné à n’importe quel cinéaste.

La note du Figaro : 3/4