Théâtre au festival d’Avignon OFF : Assassiné pour une canette de bière

Envoyé spécial
Avignon (Vaucluse)

L’homme est là pour se raconter. Même s’il n’est plus là pour le faire. Difficile de cacher la fin, le noir absolu qui surgit au bout de cet ultime parcours, dans les sous-sols où sont stockées les réserves d’un supermarché. L’histoire s’inscrit au départ dans un fait divers qui s’est déroulé à Lyon en 2009. Sans témoin autre que les sinistres protagonistes et leur victime.

Laurent Mauvignier a écrit sur la base de cette réalité une fiction qui alterne entre le récit possible et l’imaginaire certain. Son texte est comme une partition sans début ni fin. Comme un long cri, un déchirement, une affaire minuscule à l’échelle planétaire, mais effrayante cependant. Glaçante et paniquante.

Le texte de la pièce débute par une lettre minuscule, et se poursuit sans ponctuation autre que des virgules et des tirets, sans point final non plus. Comme une porte laissée ouverte.

Un acte de barbarie

Ce projet, sélectionné par le Luxembourg pour ce Off 2025, est mis en scène par Sophie Langevin. Le dispositif scénique est dépouillé. Des lames de plastique souple symbolisent les délimitations entre les espaces permis au public, et ceux interdits. Derrière, en fond de scène, le musicien Jorge De Moura interprète ses compositions, respirations musicales toniques qui rythment le drame.

Car c’en est un. Un acte de barbarie, de racisme, de violence absolue. L’homme, la victime, est interprété par Luc Schiltz. Sans pathos ni forfanterie. Il est le pauvre type, le déclassé, celui qui n’a même pas en poche les quelques euros nécessaires pour s’offrir une canette de bière, de la moins chère, la plus ordinaire, celle qui se trouve tout en bas des rayonnages.

Alors il saisit une de ces canettes, et la boit, d’un trait, oubliant les caméras de surveillance. Les quatre vigiles ne se font pas attendre. Luc Schiltz fait dérouler le récit. Avec juste ce qu’il faut d’incrédulité, d’émotion, de peur aussi. Quel beau travail !

« Ce que j’appelle oubli », 11 h 45, le 11, réservations : www.11avignon.com

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