Emplois fictifs : François Fillon définitivement jugé coupable, un nouveau procès aura lieu pour les peines
Une cassation partielle qui ne change pas grand-chose au devenir judiciaire de François Fillon. La justice n'a pas accordé la grande victoire qu'attendait l'ancien premier ministre et candidat évincé de l'élection présidentielle de 2017. La Cour de cassation a en effet validé ce mercredi l'essentiel de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris qui l'avait condamné le 9 mai 2022 pour des emplois fictifs à l'Assemblée nationale.
S’il y aura un nouveau procès Fillon, l'ancien premier ministre espérait pouvoir plaider, devant une nouvelle Cour d'appel de renvoi, la nullité de toute la procédure pour défaut d'indépendance objective de la justice.
Nouveau procès concernant les peines et les dommages et intérêts
La Cour de cassation a confirmé ce mercredi la décision de la cour d'appel en ce qu'elle reconnaît la culpabilité de François Fillon, de son épouse et de son suppléant, notamment pour détournement de fonds publics et complicité. En revanche, elle casse la décision de la cour d'appel relative aux peines prononcées à l'égard du député et aux dommages-intérêts à verser.
La Cour suprême renvoie l'affaire devant la cour d'appel afin qu'elle soit rejugée sur les points suivants : la nature des peines à prononcer contre le député, le montant des dommages et intérêts que devront verser le député et son épouse à l'Assemblée nationale.
À l'issue de deux premiers procès, en 2020 puis en 2022, François Fillon, son épouse, et son ancien suppléant Marc Joulaud, avaient été condamnés pour des emplois fictifs à l'Assemblée nationale. Les trois prévenus ont formé des recours contre la décision de la cour d'appel de Paris qui, le 9 mai 2022, a infligé à l'ex-locataire de Matignon quatre ans d'emprisonnement dont un an ferme, 375.000 euros d'amende et dix ans d'inéligibilité. Penelope Fillon a été sanctionnée de deux ans de prison avec sursis ainsi que 375.000 euros d'amende (et deux ans d'inéligibilité) et Marc Joulaud, ancien député suppléant de François Fillon dans la Sarthe, de trois ans de prison avec sursis et cinq ans d'inéligibilité. Les prévenus, qui ont toujours clamé leur innocence, ont en outre été condamnés à verser 800.000 euros de dommages et intérêts à l'Assemblée nationale.
Méconnaissance des droits de la défense
La Cour de cassation, dans sa formation plénière, a ainsi suivi l'avocat général. La défense de François Fillon espérait que la Cour de cassation tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 29 septembre 2023 faisant suite à une question prioritaire de constitutionnalité posée par François-Henri Briard, avocat de l'ancien premier ministre sur la légalité de l'article 385 du code de procédure pénale, qui organise le régime des nullités. Ces dernières permettent à un mis en examen d'invalider un acte juridique ou même la totalité d'une procédure dans un délai restreint, avant l'ordonnance de renvoi des juges d'instruction. Pour une bonne administration de la justice, il n'est plus possible de les soulever après ce délai.
Or les juges constitutionnels ont estimé qu'aucune disposition du code de procédure pénale ne prévoit effectivement «d'exception à la purge des nullités dans le cas où le prévenu n'aurait pu avoir connaissance de l'irrégularité éventuelle d'un acte ou d'un élément de la procédure que postérieurement à la clôture de l'instruction». Il en est déduit que «les dispositions contestées méconnaissent le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense. Il les déclare donc contraires à la Constitution». En l'occurrence, il s'agissait du témoignage tardif d'Éliane Houlette, ancien procureur national financier ayant fait état, devant une commission parlementaire en juin 2020, de pression de sa hiérarchie lors de l'enquête préliminaire de 2017 en pleine campagne présidentielle.