Cérémonie des César : qui sélectionne et qui vote pour désigner les lauréats ?

La 50e cérémonie des César, récompensant les professionnels du septième art en France, a lieu vendredi soir à partir de 20 h 45 à l’Olympia, à Paris. L’occasion de revenir en détail sur le processus de vote, en deux temps, qui amène à élire les meilleures productions cinématographiques françaises de l’année. Bien qu’il s’agisse d’une élection secrète et anonyme, l’on sait à peu près tout de ses modalités.

Tout savoir sur le premier tour

Lancé début janvier, le premier tour détermine les nominations. À chaque édition des César, dix collèges électoraux composés à 80 % d’acteurs, réalisateurs, auteurs, techniciens, producteurs, directeurs de casting ou représentants des industries techniques et à 20 % de distributeurs, vendeurs internationaux, exploitants, industries techniques, attachés de presse, agents artistiques et membres associés, votent pour les personnes et les films qu’ils souhaitent retenir pour la cérémonie officielle.

Pour faire partie de ces votants, il faut faire expressément une demande par écrit auprès du secrétariat de l’Association pour la promotion du cinéma. Cette demande doit obtenir un double parrainage des membres actuels de l’Académie des arts et techniques du cinéma qui vérifient si elle remplit plusieurs critères. Le premier : être une personne majeure établie dans l’industrie cinématographique. Ces personnes doivent, en effet, avoir contribué dans au moins deux films récents. À noter que les nommés et les lauréats des années précédentes sont dispensés de toutes ces modalités. Les votants doivent également verser une cotisation annuelle de 90 euros pour rester dans l’Académie. Cette contribution permet de financer le vote, l’organisation de la soirée du 28 février et la projection des films éligibles par les votants.

Car pour que les 4 951 votants de cette 50e cérémonie puissent faire leur sélection, l’Académie propose des dispositifs validés par le bureau de l’Académie. Après avoir recensé les films sortis chaque année en France, entre le 1er janvier et le 31 décembre, et établit un guide des productions éligibles, des projections privées - et publiques si le film est encore exploité dans les salles obscures - sont organisées pour les différents collèges électoraux. Depuis la 30e cérémonie, un coffret avec les productions françaises, quelques films étrangers et l’intégralité des courts-métrages en compétition leur est également envoyé. Néanmoins, toutes les productions n’y figurent pas. Seules celles parues avant l’automne y sont intégrées. Les autres, qui ne figurent pas dans le coffret car sorties trop tard dans l’année, ou simplement car le producteur ne l’a pas souhaité - il faut débourser entre 4 500 à 10 000 euros pour y figurer -, sont recensés dans le guide des films de l’Académie. L’organisation indique que cette démarche permet de réduire les inégalités et les différences liées au box-office et au réseau de distribution en salles. En 2021, l’Académie a également ouvert une plateforme de streaming privée où sont répertoriés les différents films et courts-métrages.

La clôture du vote des nominations a lieu la veille du jour de l’annonce des nominations. Cette année, le premier tour s’est donc conclu le 28 janvier. L’Académie indique sur son site que « le dépouillement des votes du premier tour est contrôlé et clos par deux commissaires de justice ». Dès qu’il est terminé, « les commissaires de justice éditent la liste des nominations qu’ils placent immédiatement sous pli cacheté, qu’ils viendront ensuite remettre en main propre à la présidence de l’Académie quelques minutes avant leur publication officielle ».

Tout savoir sur le second tour

Ensuite, un second tour est organisé au début du mois de février. Cette fois, les votants n’ont plus la responsabilité de choisir les nommés, mais les gagnants qui se verront attribuer le César dans chacune des 24 catégories en lice. Pour les retardataires, qui n’ont pas encore visionné l’intégralité des films qui leur ont été envoyés lors du premier tour, des séances de rattrapage sont organisées aux cinémas Les 3 Luxembourg dans le Quartier latin et Le Balzac, à proximité des Champs-Élysées.

« Il est absolument impossible par qui que ce soit de connaître à l’avance les résultats »

Académie des Arts et Techniques du Cinéma

La clôture du second tour s’effectue à 16 heures le jour de la cérémonie des César, quelques heures seulement avant l’ouverture de la soirée de remise des prix. Cette fois, le site de l’Académie indique que le vote est « contrôlé et clos par deux commissaires de justice, dès 16 h 01. Ils préparent ensuite les enveloppes cachetées contenant les noms des 24 lauréats. À compter de ce moment, ils gardent en permanence et en sécurité les 24 enveloppes ». Ces deux commissaires sont chargés de transmettre en mains propres les enveloppes au remettant du César pour qu’il lise son contenu en direct. « Il est ainsi absolument impossible par qui que ce soit, hormis les deux commissaires de justice, de connaître à l’avance les résultats », précise l’Académie.

Par ailleurs, les cinq films en lice pour le César du meilleur film seront également soumis au vote de 2 617 lycéens pour le César des lycéens, une récompense adressée par des élèves en classe de Terminale, fruit d’un partenariat entre le ministère de l’Éducation nationale et l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma. Le lauréat de la septième édition du César du lycéen sera, lui, connu le 3 mars prochain.

Manque de diversité et de parité ?

Le fonctionnement du vote n’est pas sans faire des débats. À l’occasion de la 49e cérémonie des César, en 2024, le Collectif 50/50 a interpellé sur le manque de diversité et d’égalité au sein du collège électoral. Dans les colonnes du HuffingtonPost , deux membres de l’association ont notamment dénoncé l’élitisme dans le choix des votants. « Pour la distribution, ils (L’Académie, NDLR) ont fait en sorte d’aller chercher plus de diversité dans les profils, expliquait Fanny de Casimacker, déléguée générale du Collectif 50/50. Notamment sur les questions de parité. Mais ils y sont quand même relativement bloqués, puisqu’ils n’intègrent que des gérants d’entreprise ou des membres de la direction. » « Or, si on analyse un peu la parité dans les sociétés de distribution et de production, on aura toujours beaucoup plus d’hommes que de femmes dans les directions », ajoutait-elle.

« Ce système de cooptation, tel qu’il est aujourd’hui, est un système qui privilégie l’entre-soi »

Fanny De Casimacker, déléguée générale du Collectif 50/50

Son homologue, Fanny De Casimacker, déléguée générale du Collectif, dénonçait : « Pour devenir membre de l’Académie, il faut être chef de poste, être dans la direction de boîtes et être parrainé par deux personnes. Donc il faut déjà avoir un réseau, déjà être dans la “famille du cinéma” .» Avant d’ajouter : « Pour la production, il faut justifier d’avoir produit pas mal de choses donc cela veut dire qu’on intègre l’Académie qu’à partir d’un certain âge, ce qui limite beaucoup de choses parce qu’on sait qu’il y a aussi plus de diversité dans les plus jeunes générations. Et ce système de cooptation, tel qu’il est aujourd’hui, est un système qui privilégie l’entre-soi. C’est une cooptation entre hommes blancs d’un certain âge. »