Pour "exister sur d'autres problématiques", le Rassemblement national lève le pied sur les questions migratoires et sécuritaires, et investit le champ économique
Les questions de sécurité et d'immigration, le débat sur l'identité nationale, le meurtre de Louise dans l'Essonne, le vote de la loi Attal sur la justice des mineurs... L'actualité française est dominée ces derniers temps par les questions de sécurité et d'immigration.
Ce sont des thèmes de prédilection du Rassemblement national. Mais les élus du parti d'extrême droite sont pourtant restés très discrets ces derniers jours. Il y a eu très peu de réactions dans les médias ou sur les réseaux sociaux.
Le RN lève le pied sur ses fondamentaux
Le Rassemblement national préfère mettre en avant d'autres thèmes depuis le début de l'année, même si les questions sur l'immigration et la sécurité restent centrales dans le logiciel du parti. Nul besoin de surenchérir : Marine Le Pen se pense suffisamment identifiée par les Français sur ces questions. "On ne va pas crier plus fort qu'eux, ça ne sert à rien", confie un stratège du parti. Crier plus fort que Bruno Retailleau notamment, le très droitier ministre de l'Intérieur qui contribue à normaliser le discours lepéniste, les cadres du parti en sont persuadés.
L'un de ceux dont l'avis compte au sein du RN a même inventé une expression pour qualifier ce phénomène : la "marinisation des esprits". C'est le cas notamment sur l'un des sujets brûlants de ce début d'année : Mayotte et la question du droit du sol. Au Rassemblement national, on répète que c'est Marine Le Pen la première qui a mis le sujet sur la table. Le parti a semé des graines, et c'est l'heure de la récolte.
Les cadres du parti poussent plutôt les feux sur les questions économiques
"Le gouvernement et la Macronie occupent l'espace sur les questions régaliennes, ça nous permet d'exister sur d'autres problématiques", explique un proche de la patronne des députés du RN. Dernier exemple en date jeudi 13 février, avec une longue interview du patron du parti au magazine Valeurs actuelles, sur l'économie.
Jordan Bardella y affirme son soutien aux entrepreneurs, au monde de l'entreprise et appelle à un choc de croissance et de compétitivité : des mots nouveaux dans le vocabulaire du Rassemblement national. Mais Jordan Bardella assume clairement s'adresser aux électeurs de droite quand Marine Le Pen reste concentrée sur les classes populaires.
"Entre Marine Le Pen qui fait du socialisme et Jordan Bardella qui fait du Sarko..."
Tant pis si cette complémentarité vantée par les cadres du RN conduit régulièrement à des divergences de vue, notamment lorsque Jordan Bardella propose de s'inspirer du projet d'Elon Musk et Donald Trump pour créer un ministère de l'Efficacité gouvernementale en France.
Ce modèle dérange pourtant dans l'entourage de Marine Le Pen. "Entre Marine Le Pen qui fait du socialisme et Jordan Bardella qui fait du Sarko, les milieux économiques n'y comprennent plus rien, ça les exaspère", tacle un ténor de la droite. Pour convaincre sur l'économie, le parti devra peut-être d'abord accorder ses violons.