Nicolas Lerner nommé à la tête de la DGSE
Coup de tonnerre dans le ciel du renseignement français, qui n’avait jusqu’ici jamais vu un tel transfert à son sommet. Nicolas Lerner, jusqu’ici patron de la sécurité intérieure (DGSI), a été nommé ce mercredi, en conseil des ministres, à la tête de la Direction générale du renseignement extérieure (DGSE), en remplacement de Bernard Emié dont le départ était annoncé depuis des semaines.
«À l'heure d'ouvrir une nouvelle page dans l'histoire de la DGSE, je souhaite partager à Bernard Émié la reconnaissance de la Nation pour ses 6 années à la tête du service, a annoncé mercredi sur X (ex-Twitter) le ministre des Armées, Sébastien Lecornu . Tous mes vœux de succès à Nicolas Lerner pour continuer à protéger, dans l'ombre, la France».
Âgé de 45 ans, Nicolas Lerner s'est vite imposé comme l'un des principaux rouages du renseignement français. Affichant 20 ans d'expérience au sein du ministère de l'Intérieur, dont dix-huit dans des fonctions directement en lien avec la sécurité, ce brillant préfet avait pris les rênes de la DGSI en octobre 2018.
Tambour battant, ce stratège a structuré et mis en œuvre le chef de filât confié à la DGSI par le président de la République en matière de lutte antiterroriste à l'été 2018. «Depuis 2019, 18 attentats d'inspiration islamiste ont été déjoués ainsi que 10 autres projets inspirés par les mouvances radicales», rappelle-t-on au ministère de l’Intérieur qui souligne en outre que cette période a également coïncidé avec la montée en puissance de «tentatives d'ingérence et de déstabilisation extérieure». À ce titre, plusieurs opérations majeures de contre-espionnage ont été menées à bien ces 5 dernières années, dont une aboutissant à l'expulsion de 6 officiers de renseignement russes au printemps 2022.
Montée en puissance
Réputé pour son exceptionnelle force de travail, Nicolas Lerner s’était distingué en pilotant en direct les questions de renseignements et de lutte antiterroriste au sein de l'ex-cabinet de Gérard Collomb, dont il était directeur adjoint. Sous sa direction, la DGSI a changé de dimension, passant à près de 5000 agents fin 2023 contre 4200 fin 2018 et se préparant à rejoindre, d’ici à 2028, un site unique à Saint-Ouen au moment même où les «cousins» de la DGSE auront quitté leur caserne du boulevard Mortier pour s’installer dans le fort neuf de Vincennes.
À la tête de la DGSE, Nicolas Lerner devra accompagner une ambitieuse réforme interne visant à supprimer une organisation en «silos» devenue obsolète et à gagner en agilité en supprimant des échelons hiérarchiques. La boite a été pointée du doigt pour ne pas avoir anticipé la guerre en Ukraine, ni vu venir les coups d'État au Sahel.
La confiance de l’Elysée
Nicolas Lerner pourra compter sur un gros savoir-faire et sur la confiance de l’Élysée. Technicien expert dans les questions de sécurité et diplômé de l'ENA, il est issu de la promotion Léopold Sédar Senghor, la même qu'Emmanuel Macron. Ayant commencé sa carrière comme administrateur civil affecté au secrétariat général du ministère de l'Intérieur en 2004, il est sous-préfet et directeur de cabinet du préfet de la région Languedoc-Roussillon en 2006 avant d'arriver dès 2008 comme chef puis directeur adjoint de cabinet du préfet de police de Paris en 2008.
Nicolas Lerner sera remplacé à la tête la DGSI par Céline Berthon, longtemps promise à la tête de la direction générale de la police nationale, dont elle était numéro 2 après un fulgurant début de carrière. Sortie de l'École nationale supérieure de la police en 2000, elle a été successivement commissaire dans les Yvelines pendant cinq ans, puis était au sein de l'état-major de la Direction centrale de la sécurité publique jusqu'en 2009, avant d'être secrétaire générale du Syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN) de 2014 à 2018. En septembre 2021, ce fut la première femme à la tête de la Direction centrale de la sécurité publique.