« Les soldats israéliens ont brûlé tous les titres fonciers » : Reportage exclusif sur la ligne Bravo en Syrie occupée

Provinces de Deraa et Quneitra (Syrie), envoyé spécial.

La moto pétaradante tente de se frayer un chemin tant bien que mal entre les plaques de bitume. La route a été arrachée par les griffes d’une pelleteuse estampillée « armée israélienne ». Jussen, 24 ans, et son cousin, dont nous ne saurons pas le nom, keffieh rouge enveloppant leurs têtes, sont tellement surpris de nous voir qu’ils ont manqué finir par terre.

Il en faut plus pour doucher la bonne humeur de ces deux jeunes compères, même pas effrayés par la détonation assourdissante qui fait vibrer l’air au même moment. Le bruit est d’autant plus surprenant qu’on ne sait pas d’où il vient et s’il s’agit d’une grenade ou d’un tir de char.

Les mains accrochées au guidon de son deux-roues, d’abord réticent à parler, Jussen se laisse aller. Ils sont redescendus plus vite que prévu d’un de ces tell (collines) qui poussent en Syrie comme des champignons archéologiques. « Chaque jour c’est la même chose. On monte avec le troupeau et les Israéliens tirent devant nous pour nous empêcher d’avancer. Mais, chaque fois, c’est plus dangereux. Avant, c’était avec des fusils ; maintenant, c’est plus lourd. »

Il en faut plus, cependant, pour décourager nos deux pâtres. « Chaque fois, les Israéliens crient dans leur micro : ”Ne circulez pas ici, c’est une terre israélienne” », témoigne Jussen. « Mais qu’est-ce que je peux faire ? Moi, mes moutons doivent manger, c’est tout. »

« On entend dire que les Israéliens vont nous occuper »

Sur le sommet du tell, on aperçoit les baraquements construits par l’armée israélienne avec leurs...