Nouvelles, romans, fables... Quels livres offrir à vos enfants lors de la 11e édition de Partir en Livre ?

Dix nouvelles au poil

Souvenons-nous… C’était il y a tout juste un an. Paris avait couru, mangé, vibré au rythme des Jeux olympiques. À cette occasion, le Centre national du livre avait proposé gratuitement au public un recueil de nouvelles sur le thème du sport. Une lecture pour le moins endurante ! Pour la 11e édition de Partir en Livre, elle sera cette fois-ci… poilante. Le CNL met à l’honneur nos amies les bêtes. Dix auteurs emblématiques de la littérature jeunesse, d’Agnès Desarthe à Florence Hinckel, en passant par Nicolas Michel, Orianne Papin et Vincent Villeminot, pour ne citer qu’eux, ont ainsi rédigé dix textes inédits sur la condition animale.

Voilà donc un livre qui a du chien ! Chez Manon Fargetton, une jeune fille devient l’amie d’un petit rat baptisé Einstein. Chez Arnaud Cathrine, un ado se remet douloureusement de la perte de son labrador, Onyx. « Pourquoi a-t-on eu l’idée d’avoir un chien ? Tu prends un chiot, tu l’élèves, tu grandis avec, tu tombes amoureux de lui, et un jour il meurt. » C’est ainsi, on les aime autant qu’on les pleure. Après tout, ils font partie de la famille. Dans la maison de Sébastien Joanniez, chiens, chats, hamster, poissons sont en photo sur le frigo. Une sacrée ménagerie ! Et encore, plus loin dans le livre, on croise une oie, un koala, des oursins et même des ours… Un recueil sacrément poilant.

Dix nouvelles pour accompagner le festival Partir en livre 2025. À partir de 12 ans, ouvrage collectif, CNL, 179 p., gratuit. CNL

S’arracher, de Marc Daniau : les âmes sauvages

C’est la nuit, Lucas rentre à la maison. Il est encore « ivre de l’air du centre-ville », dans sa tête résonnent les rires de ses copains. Mais le voilà qui se réveille ; sa rue, d’habitude si tranquille, est pleine de voitures. Que se passe-t-il ? « Des invités ? Un dîner ? Une surprise ? » Une mauvaise. Son père vient de mourir. La famille défile. Les jours aussi. Il a besoin de partir, de fuir. Comme cette biche menacée par des chasseurs. « Ils ont surgi derrière nous. Les chiens, leurs cris, la course, la mort foudre. Fuir tant que battent nos cœurs. » Va-t-elle leur échapper ?

Quel magnifique livre que S’arracher de Marc Daniau ! L’auteur confronte deux récits : le premier, celui de Lucas, écrit à la deuxième personne du singulier. Il est nerveux, révolté, presque scandé. Le second, celui d’une biche, est en italique, aux aguets. « D’un bond à gauche, j’entre dans un jardin, rase un mur, piétine des légumes. (…) Les chiens gagnent du terrain. Mon cœur s’affole. Repartir, mais vers où ? »

D’abord en miroir, ces deux trajectoires vont se croiser. C’est brut, sauvage, oral. « Le grillage s’arrête, goudron, une route un pont, et il est là, désarmé au bord du vide. » Que va-t-il leur arriver ? L’auteur a la prose bondissante, les phrases sont courtes, impétueuses comme s’il courait après les deux indomptables. Pourquoi n’a-t-on pas plus parlé de ce texte cruellement poétique ? Un court roman, d’une grande force sur le deuil, la nature, la condition humaine et animale.

S’arracher, de Marc Daniau, Rouergue, 64 p., 9,90 €. Rouergue

Un abri, d’Adrien Parlange : un peu de fraîcheur

Imaginez deux pages orange et en son centre une pierre, non un rocher, baigné de lumière. C’est le matin, souffle Adrien Parlange. « Dès l’aube, le soleil brûlait déjà. » Or, voilà qu’une petite fille arrive d’un pas traînant. Que fait-elle là ? On ne saura pas, mais elle a de toute évidence chaud et s’installe au dos du gros caillou, dans son ombre verte. L’enfant se distrait d’un brin d’herbe, quand un serpent, lui aussi échauffé, vient chercher « un endroit où le sol ne brûle pas ». Si la fillette a peur et ramène ses genoux contre elle, elle décide aussi de rester dans son petit bout de refuge.

Alors, l’enfant et le serpent se partagent l’ombre pistache quand un renard fait à son tour son entrée, «la langue pendante et le pelage en feu». Les voici qui se serrent un peu plus. Et un peu plus encore tandis qu’un lièvre s’installe à l’abri du soleil, suivi d’un hérisson. La ménagerie rivalise d’inventivité et d’acrobatie pour tenir dans ce filet de fraîcheur. Mais les choses vont se compliquer quand un sanglier, une petite bique et une volée d’oiseaux vont arriver… Vont-ils parvenir à trouver une place dans ce monde hostile ?

Pour cette jolie fable muette, Adrien Parlange a reçu deux belles récompenses : prix Sorcières catégorie Carrément beau maxi 2025 et grand prix de l’album Lu et partagé 2025. Et l’on comprend pourquoi : d’abord, l’ouvrage est immersif, avec ces teintes pastel et la douceur de son trait de crayon. Poétique, ensuite, alors que « partager l’ombre » devient une manière d’abandonner ses peurs et ses préjugés. On ne se lasse pas de le contempler!

Un abri, d’Adrien Parlange, La Partie, 40 p., 20 €. Dès 3 ans. La Partie

Jean-Chat voit dans le noir, de Sabine Zovighian : un chat sur le toit

«C’est le soir. Bientôt le ciel sera tout noir. Une première étoile s’est allumée. Elle est jaune, presque dorée. » La rue est calme. Les maisons aussi. Tous les enfants se préparent à aller au pays des rêves, sauf Hector. Accoudé au rebord de sa fenêtre, le petit garçon aux cheveux roux a le cœur triste : il a perdu Jean-Chat, son chat aux yeux d’or. Comment pourrait-il s’endormir sans lui ? C’est Jean-Chat qui le protège, d’habitude, des monstres sous le lit.

Que lui est-il arrivé ? Hector réfléchit : « Peut-être qu’un voleur l’a capturé ? Peut-être qu’un renard l’a mangé ? Comment savoir ? » Et maintenant, il est si tard… Mais Hector a une idée. « C’est décidé, même si ça fait peur, il ira tout seul sauver son chat dans la nuit. » Ni une, ni deux, il embarque un ballon, un lasso de cow-boy, une clochette et une longue-vue de pirate. Et le voici qui sort, marche au bord de la grande route et s’enfonce dans la ville… Le sauvetage de Jean-Chat peut commencer !

Il y a une grande poésie qui émane de ces petites pages. L’heure est bleue, Hector, avec ses cheveux de fauve et son pyjama stellaire, baigne dedans. Un ballon jaune perce la nuit. Des ombres rose et vert se déhanchent. Une chanson douce semble le guider. Serait-ce donc Jean-Chat ? Le dessin de Nathaniel H’Limi est absolument envoûtant. Quant au texte mélodieux de Sabine Zovighian, il embrasse parfaitement ces teintes chatoyantes. Un joli périple onirique !

Jean-Chat voit dans le noir, de Sabine Zovighian, illustré par Nathaniel H’Limi, L’École des loisirs, 33 p., 18 €. Dès 3 ans. L’École des loisirs