Un recours, une polémique et déjà du retard pour le super bus des écologistes à l'est de Lyon

Le Figaro Lyon

Après les banderoles sur les commerces et les réunions autour de gobelets de café fumants, ils ont finalement décidé de saisir la justice. L'Association des habitants et commerçants de la route de Genas a déposé un recours au tribunal administratif mardi 22 octobre pour contester le projet de Bus à haut niveau de service (BHNS) qui doit innerver cet axe de l'est de la métropole lyonnaise marquant la frontière de Bron et Villeurbanne. Ils reprennent les réserves émises par le commissaire enquêteur dans les conclusions de son avis pourtant favorable à la déclaration d'utilité publique (DUP).  

Porté par l'autorité régulatrice des transports locale (Sytral Mobilités), où les élus écologistes sont largement majoritaires, ce super bus doit bénéficier d'un couloir dédié permettant de relier l'est de Bron à la Part-Dieu en 25 minutes. Il sera doublé d'une super piste cyclable, la Voie Lyonnaise 11, du nom de ce réseau vélo express de 250 kilomètres prévu pour 2030. Des aménagements qui, mis bout à bout, nécessitent 24 mètres de large de chaussée, afin de conserver une voie de circulation automobile à sens unique vers le cœur de Lyon. C'est plus qu'en offre la route de Genas, même en supprimant les places de stationnement.

La boulangerie Paneo risque l’expropriation de son parking et d’une partie de son commerce.

Très chers propriétaires

Pour rentrer dans leur métrage, les élus écologistes entendent donc grignoter sur le foncier et le bâti existant. Les discussions avec les propriétaires en vue de procédures de rachat ont commencé depuis près de deux ans. Ces procédures pourraient aller jusqu'à l'expropriation en théorie

«“Votre logement est frappé d'alignement”, m'a-t-on dit au téléphone, C'est-à-dire qu'il se trouve sur le tracé du bus et va devoir être abattu». Des coups de fil comme celui-ci, reçu par Sylvie au cours de l'hiver 2023, les chargés de relations du Sytral en ont passé des dizaines. Le rapport du commissaire enquêteur parle de 250 courriers envoyés à des propriétaires, particuliers ou commerçants, souvent installés depuis des décennies. 

Au total 130 personnes sont concernées, certaines propriétés étant des immeubles, le chiffre monte vite. L'addition aussi. Plus de 16% des 120 millions d'euros investis seraient dédiés aux frais d'expropriation. L'enquête préalable à la DUP a souligné un coût d'aménagement de 17,6 millions d'euros par kilomètre «qui paraît nettement supérieur à la fourchette des coûts située entre 5 et 10 millions».

«C'est énorme, le projet aurait pu coûter beaucoup moins cher s'il avait été adapté», attaque Sandrine Claudin, porte-parole de l'association à l'initiative du recours. Le rachat est certes proposé au prix des domaines, mais les propriétaires peuvent faire monter les enchères.

Friture sur la ligne

Face à ces contretemps annoncés, le président du Sytral et de la métropole, Bruno Bernard (EELV), a d'ores et déjà acté le report de la partie orientale du tracé à horizon 2027. Il a frontalement attaqué le maire de Bron, Jérémie Bréaud (LR), opposé au projet (un vœu défavorable avait été voté l'an dernier au conseil municipal). L'écologiste a accusé ce proche de Laurent Wauquiez, initialement partisan d'un tramway, d'alimenter la fronde.

«Quand vous avez une commune qui n'est pas en accompagnement mais en opposition, ça n'aide pas à tenir le planning», a-t-il attaqué . «Il cherche un bouc émissaire au lieu d'assumer ses erreurs», répond le conseiller régional qui se dit désormais en accompagnement du projet tout en entendant le mécontentement de sa population.

En l'état actuel, une piste cyclable borde chaque côté de la chaussée de deux fois une voie. A.S. / Le Figaro

Dans son recours, l'association attaque l'absence de parc relais au terminus de la ligne du BHNS, aux Sept Chemins. Un écueil souligné par le commissaire enquêteur, d'autant que 601 places de stationnement doivent être supprimées le long de la ligne, limitant l'accessibilité des personnes venues de l'est de la métropole. La route de Genas voit passer chaque jour 20.000 véhicules. 

L’inquiétude concerne aussi le report de la circulation et de la pollution vers les rues adjacentes. Des études sont lancées mais elles n'ont pu être terminées à temps pour la DUP. L’avis néanmoins favorable souligne plusieurs facteurs positifs, dont le gain environnemental de l'aménagement à terme, alors que Sytral Mobilités mise sur 27.000 voyageurs quotidiens en 2030.

Le Sytral ne compte en tout cas pas s'arrêter en chemin et a déjà acté le prolongement de la ligne de BHNS de neuf kilomètres vers Parilly, à Vénissieux, pour 70 à 90 millions d'euros supplémentaires. Dans un secteur ou les voies sont suffisamment larges pour éviter d'avoir à les élargir. De quoi poursuivre aussi le maillage de cet est lyonnais en perpétuel développement tandis qu'une nouvelle ligne de tramway a été annoncée la semaine dernière entre Vénissieux et Vaulx-en-Velin, via Bron.