Racisme systémique : La CEDH condamne la France pour un contrôle d’identité discriminatoire, mais rejette cinq autres requêtes

Alors que la France est régulièrement rappelée à l’ordre par la Cour Européenne des droits de l’homme, cette dernière a rendu une décision attendue, ce jeudi 26 juin. Elle a condamné la France pour un contrôle d’identité discriminatoire, mais a rejeté les requêtes de cinq autres Français.

Six Français, d’origine africaine ou nord-africaine et résidant à Roubaix, Marseille, Vaulx-en-Velin, Saint-Ouen et Besançon, dénonçaient des « contrôles au faciès » durant les années 2011 et 2012. Ils demandaient donc une condamnation pour discrimination, violation de la vie privée et de la liberté de circulation. Ces derniers souhaitaient également contraindre les autorités françaises à mettre en place des mesures pour empêcher les contrôles discriminatoires et garantir une traçabilité de ces contrôles.

Ces six requérants font partie d’un groupe de 13 hommes qui s’étaient lancés dans un combat judiciaire, dénonçant des contrôles injustifiés, parfois associés à des palpations, des insultes ou du tutoiement.

« 4 fois plus de risque d’avoir été contrôlés »

Après avoir perdu en première instance en octobre 2013, l’ensemble des plaignants avaient fait appel et en juin 2015, la cour d’appel de Paris avait donné raison à cinq d’entre eux, condamnant l’État à verser 1 500 euros de dommages et intérêts à chacun. En novembre 2016, la Cour de cassation avait définitivement condamné l’État dans trois dossiers, une première historique. Les six hommes qui n’avaient pas obtenu gain de cause ont donc décidé de porter l’affaire devant la
CEDH en 2017.

La décision rendue ce jeudi s’inscrit dans un contexte où l’ampleur de cette pratique raciste est confirmée par la Défenseure des droits Claire Hédon, dans un rapport publié, mardi 24 juin, sur le site internet de l’institution. « Les jeunes hommes perçus comme noirs, arabes ou maghrébins ont 4 fois plus de risque d’avoir été contrôlés que le reste de la population, et 12 fois plus de risque de faire l’objet d’un contrôle poussé », évalue l’autorité administrative qui s’appuie sur les témoignages des 5 024 personnes interrogées par l’institut de sondage Ipsos.

La Défenseure des droits Claire Hédon préconise de mettre en place la traçabilité des contrôles d’identité afin de garantir aux personnes contrôlées la possibilité d’exercer un recours, notamment en cas d’allégation de discrimination. Elle suggère aussi de modifier le cadre légal des contrôles d’identité en précisant à l’article 78-2 du Code de procédure pénale que les contrôles d’identité ne doivent pas être fondés sur les critères de discrimination prévus par la loi, et que le motif du choix de la personne contrôlée doit être objectivé et énoncé à la personne contrôlée, dans la mesure du possible.

Dès 2021, l’État était déjà condamné par la cour d’appel de Paris pour faute lourde, après le contrôle d’identité de trois lycéens en 2017 par des policiers à la Gare du Nord. Force est de constater pourtant que depuis, aucune mesure n’a été prise. Un état de fait d’autant plus inquiétant dans le contexte où le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a mis en branle, une semaine plus tôt, une véritable chasse aux exilés dans les gares et les trains contre laquelle plusieurs syndicats du monde de la justice ont déposé un recours au Conseil d’État.

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