REPORTAGE. "C'est plus fort qu'une Coupe du monde" : à Paris, la fête et l'ivresse après la victoire du PSG en Ligue des champions
Le moment dont ils avaient rêvé depuis des années est arrivé à 23h07, au terme d'une soirée incandescente. Les 48 000 spectateurs parisiens réunis au Parc des Princes, samedi 31 mai, ont explosé d'une seule voix en voyant, sur les écrans géants, le capitaine Marquinhos soulever la coupe aux grandes oreilles de la Ligue des champions, celle qui fait rêver tous les amoureux de football et qu'ils ont enfin remportée après leur démonstration en finale face à l'Inter Milan (5-0). Des supporters ont brandi leur écharpe, d'autres ont sorti leur téléphone pour immortaliser le moment. Et puis il y a ceux qui ont pleuré, appelé un proche ou embrassé leur voisin qui était encore un inconnu il y a quelques secondes.
"Certains ne réalisent peut-être pas, mais ce titre signifie beaucoup : on a tellement souffert avec le PSG, on a connu des défaites, des années compliquées, des éliminations en Ligue des champions. Personne ne la mérite plus que nous", explique Dalil, 19 ans, qui a passé le match tantôt torse nu, tantôt dans les bras d'autres supporters après les cinq buts parisiens. Paris, "ma ville, ma vie", dit-il, venait d'entrer au Panthéon du foot en rejoignant l'Olympique de Marseille, seul club français vainqueur de la compétition jusque-là (en 1993).
48 000 spectateurs réunis au Parc des Princes
Ce vœu d'entrer dans l'histoire du football français avait animé les nombreuses discussions des supporters parisiens réunis dès la mi-journée, partout dans la capitale, et notamment au Parc des Princes. Le club avait vu les choses en grand : réunir 48 000 spectateurs dans son stade pour une soirée qu'il espérait mémorable. Les longues heures qui se sont étirées avant le match ont permis aux supporters de réviser leurs classiques, de craquer leurs premiers fumigènes, de boire quelques bières, sous l'œil de très nombreux policiers déployés (5 400 au total dans Paris). Et de se rappeler le chemin parcouru depuis le milieu des années 2000, quand le club luttait pour se maintenir en Ligue 1.
"Les jeunes n'ont connu que le Qatar [qui a racheté le PSG en 2011] et les nombreux succès qui vont avec, mais on a tant galéré pour en arriver là", confie Bernard, dont le premier match au Parc date de 1976. Pour lui, ce match était une occasion en or de rattraper le "rival" marseillais et d'écrire une nouvelle page de l'histoire du PSG.
Les 48 000 spectateurs réunis au Parc des Princes ont fait un boucan monstre : après un petit show musical en lever de rideau – les rappeurs Gazo et Franglish ont donné la réplique au public – tout le stade a passé le match debout, une rareté dans les stades de football où seuls les ultras passent habituellement le match debout à chanter.
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Ce samedi soir était différent. A l'image du scénario, et de ces buts en pagaille : le premier, signé Achraf Hakimi après douze minutes de jeu, a fait exploser le Parc, qui s'est coloré de rouge avec les fumigènes allumés aux quatre coins du stade. Rebelote pour le deuxième but de Désiré Doué, huit minutes plus tard, à l'origine d'une accolade mémorable entre Jo et Alexis, deux copains venus de Bourges. Le premier avait parié un paquet d'argent sur la victoire du PSG. A la vue du public en transe, le second nous a fait remarquer que le moment avait un petit côté irrationnel : "Les gens ne se connaissent pas mais s'embrassent et portent dans leur cœur des joueurs qu'ils ne connaissent absolument pas."
"We are the champions", feu d'artifice et défilé de klaxons
Comme le reste du stade, les deux ont passé une bonne soirée : à 3-0, ils ont chanté le fameux tube de la finale France-Brésil en 98 – "et 1, et 2, et 3-0" – avant d'entonner les "Ici c'est Paris" et tout le répertoire des chants parisiens, pour les quatrième et cinquième buts qui ont définitivement propulsé le stade et la soirée dans une autre dimension. Au coup de sifflet final, un feu d'artifice géant a illuminé le Parc des Princes, We are the champions de Queen a résonné, et le public a commencé à faire la fête, même si tout le monde avait compris depuis longtemps que la soirée allait être longue et belle.
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Dans les rues, les pétards ont explosé, les klaxons ont sonné et toute la ville s'est transformée en un grand n'importe quoi. Tout y est passé : des belles images (rassemblements géants aux ronds-points, photos de famille en liesse, spectacles de pyrotechnie) et d'autres qui ont, un peu, gâché la fête. Quelques poubelles ou voitures brûlées, des vitrines vandalisées et des CRS qui chargent la foule. A 2 heures du matin, 294 personnes avaient été interpellées, selon la préfecture de police de Paris, qui avait déployé un dispositif XXL dans Paris et aux abords des Champs-Elysées. Quelques heurts ont d'ailleurs éclaté sur l'avenue parisienne comme à la porte de Saint-Cloud, près du Parc des Princes, où le périphérique a été bloqué quelques minutes.
"Une soirée comme ça, ça n'arrive qu'une fois dans une vie"
Pas de quoi gâcher la fête de Marie, Karim, Melissa, Isaiah, Stéphane et tous les Parisiens croisés dans la ville. "Une soirée comme ça, ça n'arrive qu'une fois dans une vie", prévenait un supporter, à un autre qui se croyait "dans un rêve". "C'est plus fort qu'une Coupe du monde, car c'est Paris, notre club", en pleurait Diego, qui avait promis de lâcher une petite larme, que le PSG gagne ou perde.
La pièce est retombée du bon côté. Mathieu, venu de Nîmes pour le week-end et croisé sur les Champs-Elysées, se souviendra de cette soirée dans trente ans. "Marseille a remporté la Ligue des champions à Munich, Paris la gagne aussi ici. Je ne suis pas superstitieux, mais c'était écrit", riait le trentenaire, qui sait déjà ce qu'il fera ce dimanche : il reviendra sur les Champs pour assister à la parade des Parisiens et achètera le journal L'Equipe qu'il encadrera sûrement chez lui. La une ? "Ici, c'est Paradis".