Malgré le séisme, des milliers d'Afghans contraints de quitter le Pakistan
Alors qu’un séisme vient tout juste de frapper l’Afghanistan dimanche 31 août, le Pakistan a demandé à des milliers d'Afghans détenteurs de carte de réfugiés de l'ONU de repartir dans leur pays lundi, rapportent des responsables pakistanais et afghans à l'AFP mercredi.
Si les autorités d'Islamabad ont commencé à expulser fin 2023 les Afghans présents sur leur sol - ils sont trois millions au Pakistan -, elles ont fortement accéléré leur campagne d'expulsion en avril. Après avoir supprimé les cartes de résidence qu'elles avaient délivrées à des Afghans parfois installés depuis des générations dans le pays, elles avaient annoncé qu'elles considéreraient également, à partir du 1er septembre, comme résidents illégaux les détenteurs de carte dites «PoR», délivrées par l'ONU.
Passer la publicitéEt le séisme de magnitude 6 qui a ravagé l'est de l'Afghanistan dimanche soir juste avant la date butoir n'y a rien changé - alors même qu'une bonne partie des plus de 1400 morts étaient des Afghans tout juste rentrés du Pakistan. Depuis lundi, «plus de 4000 personnes ont traversé» le poste-frontière de Chaman, dans le sud du Pakistan, vers l'Afghanistan, a indiqué sur place Habib Bangulzain, un responsable de district pakistanais, à l'AFP.
«À Islamabad, c’est l’enfer»
Côté afghan de ce point de passage, à Spin Boldak, Abdul Latif Hakimi, en charge du recensement des migrants de retour, confirme que le nombre de traversées a augmenté et estime que «chaque jour, 250 à 300 familles rentrent au pays, soit 1200 à 1300 personnes». À Torkham, l'autre point de passage plus au nord, plus de 6300 Afghans détenteurs de PoR ont traversé durant la seule journée de mardi, indiquent les autorités pakistanaises gérant le poste-frontière. Elles ajoutent que depuis avril, près de 63.000 détenteurs de PoR ont rejoint l'Afghanistan.
Sous la pression, Khan Wali, un autre réfugié, a fini par quitter Lahore, la grande ville de l'est frontalier de l'Inde. «Nous étions harcelés, on ne pouvait plus vivre ni travailler. La police nous interpellait et saisissait nos biens», raconte-t-il à l'AFP au poste-frontière de Spin Boldak.Depuis fin 2023, le Pakistan et l'Iran ont poussé plus de quatre millions d'Afghans à rentrer au pays. Pour nombre d'entre eux, l'ONU s'alarme de «retours forcés».
Mardi, le rapporteur spécial de l'ONU sur les droits humains en Afghanistan Richard Bennett avait exhorté le Pakistan «à au moins suspendre les expulsions prévues», un «geste de voisin compatissant». «À Islamabad, c'est l'enfer», a raconté à l'AFP un Afghan détenteur d'une carte de réfugié au Pakistan, sous couvert d'anonymat par peur de représailles. Les raids menés par la police dans les hôtels et pensions où vivent des familles afghanes, parfois en attente de visas vers des pays tiers, se sont intensifiés ces dernières semaines, ont constaté des journalistes de l'AFP.